Re: Thérapie Divine [Loki]

**Proserpine** Sam 7 Sep 2019 - 17:12

J'aime les cas compliquées. Les esprits tortueux et insondables. J'ai tendance à penser qu'ils me ressemblent. Et j'aime ce qui me ressemble. Qui, de Loki ou de moi est le plus secret, en réalité ? Nous nous évaluons, nous nous protégeons à notre façon. Il est certain que les réponses ne s'obtiendront pas dans des questions trop directes, pour l'un comme pour l'autre, mais elles sont toujours amusantes à poser. Il est toujours intéressant de voir de quelle manière l'information sera déviée. Loki joue sur la vantardise. Ce qui est mieux que lui ? Nous n'agissons pas pour satisfaire nos certitudes, mais pour dissiper nos doutes. Je lui réponds pas un sourire en coin. Je ne ferai pas de la psychologie de bas étage en me trompant de cause. Je sais qu'il est possible de s'aimer, de se trouver supérieur à la plupart des êtres que l'on croise. Je le sais puisque je le pense, sinon je n'aimerais pas ce qui me ressemble. Mais être convaincu seul de sa valeur doit être plutôt déprimant, d'où le monde du spectacle, le besoin d'être admiré. N'a-t-il pas tout d'abord été rejeté et préféré à un simple d'esprit ? On préfère toujours les individus manipulables, c'est une leçon cruelle, l'intelligence effraie. Alors, pour ma part, je joue souvent l'idiote. Ou, comme dans le cas présent, je me tais, je souris. Je ne dévoile pas mes cartes. Je complète mon analyse, je laisse avec plaisir les connexions se mêler et se croiser sous mon front. Loki continue ses tours de passe-passe qui inquiètent sans doute les humains. Ses mises en scène sont dignes du grand méchant qu'il est dans ce monde, elles laissent craindre un être excessif et fou, inutile d'insister sur la schizophrénie. J'observe ses doubles à tour de rôle, puis je reviens à lui lorsque la dernière illusion s'efface. Ainsi, ce nouveau tour devait me prouver ses désordres mentaux ? Lui assurer mon intérêt pour sa personne. Je lui réponds amusée :

– Il n'était pas utile d'en faire tant, je pensais déjà qu'une série de rendez-vous allaient s'imposer. Je ne lâche pas mes patients les plus troublants au bout d'une seule visite.

A quoi suis-je en train de jouer exactement ? Je crains que cette rencontre ne dépasse le motif premier qui l'a provoquée, à moins que cette histoire de Phobos ne soit qu'un prétexte depuis le début. Je suis parfois trop naïve, et je réponds souvent sans réfléchir aux attentes que je perçois chez les autres. J'ai même un certain plaisir à les devancer, mais je ne réalise pas toujours tout ce que cela pourra impliquer. Pourquoi ai-je choisi une position aguicheuse ? Par habitude certainement. Dans mon bureau, je suis maître de tous les scénarios. Je fais languir, je trouble, je crée l'attente, et j'obtiens plus facilement les réponses que je souhaite. Mais Loki n'est pas un humain dont je pourrais capturer l'âme, il n'est pas un simple jouet que je pourrais briser dans une pulsion d'ennui. Je ne suis même pas certaine, lorsqu'il se rapproche à quelques centimètres de moi qu'il soit bien ma proie. Je ne perds mon sourire, mon visage se fige, mon regard se perd dans des interrogations multiples. Je ne peux pas dire que ce soit désagréable. Je ne peux pas dire qu'il soit désagréable. Mais suis-je autorisée à le penser ? L'idée de la trahison brûle ma poitrine. Loki reprend mes propres termes pour m'inviter à passer pour de temps avec lui, à avoir un rôle à ses côtés, un rôle privilégié. C'est très soudain. Ce qui est soudain cache souvent quelque chose mais, l'asgardien serait-il du tempérament des hommes dont le cœur s'emballent et qui vous feraient mille promesses sous l'inspiration du moment, pour les oublier dans une autre humeur. Il paraît réfléchi, il pèse ses mots. Alors, pourquoi cet élan soudain ? A-t-il vu quelque chose de si particulier en moi ? Pense-t-il que je pourrais réellement lui apporter quelque chose ou trouve-t-il juste séduisant de faire son numéro à une divinité olympienne ? Je pourrais tout aussi bien être une conquête intéressante, représenter un défi qu'il n'aura jamais avec une simple humaine. Je pourrais comprendre ce point de vue, mais il n'a pas autant à perdre que moi dans cette affaire. Veut-il être séduit ? Son besoin de reconnaissance est-il à ce point qu'il aimerait être flatté que la déesse des enfers cherche à lui plaire ? Encore plongée dans mes pensées, je lui réponds un peu plus froidement que je ne le devrais, en plantant un regard terne dans ses yeux espiègles.

– Tu as raison, je ne trouve aucune raison logique de décliner ta proposition.

Que dois-je à Hadès aujourd'hui ? Il a payé pour ses propres folies. Il n'est plus que l'ombre de lui-même. Il reviendra à lui dans quelques siècles, peut-être, et je ne sais pas si nous devons le souhaiter. Ma nostalgie des meilleurs moments de notre relation me fait occulter ceux qui ont été les plus douloureux. A-t-il pensé à moi lorsqu'il a manqué de déclencher la fin du monde ? Même si j'en parle comme d'une bonne blague, je culpabilise tous les jours d'avoir contribué à le plonger dans cet état végétatif. J’éprouve autant de peine que de colère. Parce qu'il m'a forcée à en arriver à cette extrémité, il m'a mise dans une position où je n'ai pas eu d'autre choix, où je n'ai pas pu le protéger de lui-même, comme des autres. Les mots de Loki sont durs, même s'il n'en a sans doute pas conscience. Je voulais aider Hadès à gravir les échelons et briller, non à ses côtés, mais dans son existence. Mon époux ne m'a jamais vraiment laissé l'aider. J'ai fait survivre notre royaume seule tandis qu'il affirmait avoir des projets plus grands – Et quels projets ! – en méprisant mes réticences. Ses excès ne nous ont jamais vraiment permis de nous mettre d'accord. J'ai dû composer avec ses phases mégalomaniaques et ses phases dépressives. Maintenant, je dois composer avec un absent en appréhendant l'état mental dans lequel il sera à son réveil. Je continue pourtant d'accepter de l'attendre, je m'occupe avec des humains comme je jouerais à la poupée, je refuse mon échec. Mais, voilà, j'ai ce qui ressemble à une nouvelle possibilité. Elle est dangereuse, à bien des égards. Je le sais. Tout ceci n'est qu'un beau vernis social, une image que je maîtrise, qui me laisse calme. Je ne parierais pas sur ma santé mentale si mon quotidien qui me maintient à moitié éteinte devait être perturbé. Mais Loki le sait-il, lui ? J'avance vers la porte qu'il me désigne. Je sais que je ne trouverai pas de couloir en l'ouvrant. Et j'ignore, à tous les niveaux, ce que je pourrai y trouver. La tentation de lâcher prise est terrible lorsqu'elle s'empare de vous. Pourquoi y résister ? Je caresse un instant la poignée, et, sans me retourner, je commence d'une voix grave :

– Il faut que je t'avertisse d'une chose, Loki, je suis du genre à prendre très au sérieux tout ce qu'on me demande, et je déteste l'échec par dessus tout. – Je me retourne vers lui, un sourire à la fois joueur et menaçant sur mes lèvres. – Es-tu bien certain de vouloir me laisser ouvrir cette porte ?

Ce qui est dangereux pour moi l'est aussi pour lui. On ne se lie pas avec la déesse des enfers romains, avec une autre immortelle, sans s'attendre à des conséquences si certaines parties du contrat ne sont plus respectées. Je ne garantis pas d'être d'excellente compagnie si cela devait arriver. Je ne promets pas de ne pas essayer de le tuer. Qu'il en soit donc averti avant de prendre le risque de me provoquer.

**Loki Odinson** Ven 20 Sep 2019 - 12:51

Le sourire unilatéral, méprisant, de Proserpine est autant délicieux pour les yeux, du fait de son visage, que pour l’esprit, du fait de son esprit à elle. Que s’y passe-t-il ? Les réactions à ce que j’y sème. Quelles sont-elles ? Une appréciation supérieure. Le détail de mes alter-égos, que leur nature ait été comprise ou non. Le détail de ce nouveau patient que je représente. "Inutile d’en faire tant, une série de rendez-vous allaient s’imposer" ; il faudra au moins cela pour comprendre l’ampleur. Je m’indiffère du fait que la déesse psychiatre ne "lâche pas mes patients les plus troublants au bout d'une seule visite", ce qui m’intéresse c’est de savoir jusqu’où elle peut aller au bout d’une seule visite. Pour ma part, je tente toujours que la première fois inclue une première fois, sinon pourquoi l’appeler ainsi ?

Il y a une crainte chez Proserpine, après sa réponse, après son assurance. Elle se jette dans une aventure qui dépasse le cadre de sa petite vie comme de sa grande, où tout peut arriver à une exception près : l’ennui. Elle fait le grand saut, comme je l’ai déjà pensé, comme elle l’a déjà pensé, et se demande alors qu’elle ne touche plus terre jusqu’où peut-elle chuter. Jusqu’où je peux l’entrainer. Elle n’en sait rien, devant me faire "confiance". Je n’en sais rien non plus, mais je me fais assurément confiance !

Est-ce d’arriver à similaire conclusion qui lui fait perdre son sourire ? Ça ne saurait être notre proximité physique, j’espère. Sinon, je le prendrais fort mal. Son mépris, oui. Sa surprise, évidemment ! Sa joie, avec plaisir. Sa peur, si elle veut. Sa colère, si ça l’amuse. Sa tristesse, si ça m’amuse. Mais son dégoût, jamais de la vie, de la mort et du reste. Le dégoût est une émotion réservée à ceux qui ont trop d’étroitesse d’esprit ! Elle vaut mieux que cela. Je vaux mieux que ça aussi ! Je vois les doutes. Je vois la tristesse. Je vois la surprise. Je vois les doutes, à nouveau. J’ai touché un point sensible, extrêmement sensible. Peut-être trop. Ne serait-ce pas Proserpine qui, finalement, cherche à ce qu’on gagne son amitié en passant du temps avec elle ? En l’aidant à gravir quelques échelons ? En cherchant à devenir l’être le plus lumineux de son existence ? Pluton n’est plus ce qu’il était. Les Humains sont toujours ceux qu’ils sont. Elle, dans tout cela, s’y retrouve-t-elle ? S’intéresse-t-elle tant à la vie des autres pour oublier les creux de la sienne ? Si tel est vraiment le cas… il me faudra la culbuter avant de l’aider. Sinon elle pourrait croire que l’aide est dans l’objectif de la culbuter. Alors que pas du tout, l’aide est un bonus !

Quoi qu’il en soit, cela arrivera en son temps. Celui-ci appartient à un autre projet. Un projet que Proserpine "ne trouve aucune raison logique de décliner". Un projet vers lequel elle s’avance, à ma demande. Un projet qui la fait parler. Se retourner. Me sourire ; joueuse, menaçante. Je fixe ses yeux. Son avertissement est entendu. Son sérieux, compris. Sa dépréciation de l’échec, notée. Comme tant d’autres choses. Je fixe ses yeux. Suis-je bien certain de vouloir lui laisser ouvrir cette porte ? Qu’a-t-elle à perdre, réellement ? Qu’ai-je à perdre ? Je souris. Je lui souris.

« Tu as raison, concède-je alors qu’un double apparait à côté de la porte. L’inégalité des sexes "galanterie" me propose de te la tenir. »

Le double ouvre une porte toute aussi illusoire que lui, le portail ainsi encadré donnant sur les Champs Elysées. J’aurais pu me rendre à l’Hadès et prendre Phobos sans la permission de Proserpine, après tout l’âme ne lui appartient pas, selon le point de vue. Du mien, si. Surtout, cela m’a permis de la rencontre, de la tester, de tenter de la culbuter aussi mais c’est une affaire qui reste en suspens car extensible dans le temps ; à l’inverse de l’âme de Phobos. Très bientôt, je prendrais Diana de Themyscira au piège. Proserpine ne sera pas aux remerciements. Mais elle n’en sera pas moins remerciée ; polysémie volontaire.

L’âme de Phobos se trouve non-loin du portail, de même que la fin de notre rencontre. Je ne franchis le second qu’en second. Je laisse la première aller voir le premier. Je laisse Proserpine faire ce qu’elle a à faire avec Phobos. Je le réenchanterai plus tard, à ma convenance. Pour l’heure, je fais mon touriste dans cet équivalent de Valhalla, réunissant mes mains dans mon dos et regardant se paradis souterrestre qui n’est, au final, qu’une dimension de plus. Aussi accessible que bien d’autres. Cerbère ? Quoi Cerbère ? J’en ai pondu un plus gros, même s’il a moins de cerveaux, alors c’est pas le Gardien des Enfers qui allait me poser d’insurmontables problèmes. Après, faire de sa maitresse la mienne… je dirais bien que ça facilite les choses mais ça reste à prouver.

« Je te laisse t’occuper de ce cas. Ensuite, que dirais-tu d’aller voir celui de tout à l’heure, à l’hôpital ? Régler nos affaires du jour nous permettra d’avancer dans la nôtre. »

Je me penche légèrement en avant à ma conclusion. Je ne souris plus. Je ne joue plus, d’ailleurs. J’en suis arrivé à ma réussite mineure, celle que je me serais assuré quoi qu’il advienne. Reste à réussir mieux encore, le succès majeur ayant été envisagé. M’en contenterai-je désormais que j’entrevois succès plus grand encore ? On en revient à cette histoire de choix. Pourquoi me limiterais-je quand je peux tout tenter ?

**Proserpine** Mar 1 Oct 2019 - 20:05

L'ennui et l'absence de certitudes m'empêchent de refuser la situation qui s'impose à moi. Loki me demande de réfléchir trop vite. Or, j'aime prendre mon temps. Les bonnes idées ne viennent qu'après maturation. Quand j'ai un doute, je préfère attendre. Si je reçois plusieurs messages d'alerte dans mon esprit, alors un danger non identifié m'attend. La personnalité de Loki est déroutante. Je ne m'attendais pas à quelque chose de simple avec lui, mais, d'une certaine manière, je ne m'attendais pas non plus à l'attitude qu'il m'a présentée. Je dois me recomposer une image plus juste de l'asgardien, une image totalement débarrassée de ce que sa réputation a pu me laisser croire de lui. Il y a ce que les gens pensent et disent, ce que l'on pense être et revendique, puis la réalité. Et, dans cette réalité, Loki vient brutalement de décider que nous pourrions passer un peu plus de temps ensemble. C'est une sorte de piège, j'en suis bien consciente. Il se lance parce qu'il ne doute pas de son ascendant. Il se sent fort et se refuse à l'humilité. Je ne suis peut-être qu'un nouveau caprice dans sa propre vie d'ennui, ou dans son besoin de prouver sa valeur, sa capacité à dominer. Ceci dit, les deux ne sont pas incompatibles. En venant me trouver, il s'est ouvert une autre possibilité dans l'espèce de chaos qu'il souhaite faire de son existence. Je pourrais écouter mon instinct et tout arrêter avant qu'il ne soit trop tard. Mais, en même temps, il soulève quelque chose de mauvais en moi, l'envie de répondre à sa provocation implicite, de la curiosité pour ce qu'il est, après de trop longues années à m'ennuyer sur des humains passables. J'ai perdu mon seul vrai complice, je me sens livrée à moi-même. Je pourrais m'en remettre à l'avis de mes esprits les plus brillants, mais ils sont morts, de toute façon, et je crois que je n'ai pas très envie qu'ils me dissuadent d'agir. Parfois, il faut savoir tomber pour mieux se relever. De toute façon, j'ai assez confiance en mes capacités pour garder le contrôle sur la situation. Je peux accorder de petites victoires, jamais les grandes. Mais Loki ne tient pas compte de mes avertissements. Ou peut-être que le goût du risque l'y pousse aussi, le pousse à ouvrir la porte avec l'un de ses tours de passe-passe pour accélérer mon engagement. Si le geste ne vient plus de moi, il est effectivement plus facile de céder.

Nous arrivons dans un univers familier, puisqu'il s'agit de mes Enfers. Il est temps d'honorer le premier accord, celui de « prêter » l'âme de Phobos. Le geste me reste assez désagréable, mais je lui ai accordé que ça n'avait pas une importance majeure pour moi, tant que Phobos était d'accord sur le principe. Le sort de Diana était déjà décidé, de toute façon. Je n'avais aucune raison d'intervenir pour l'aider et perturber les plans de Loki, qui déambule dans les plus belles allées de mon territoire, tout à son aise, peut-être même un peu trop. Hadès aurait-il toléré de le voir se promené par ici ? Probablement pas s'il pensait qu'il avait d'autres idées derrière la tête. Mais je ne pense pas que les Enfers l'intéressent réellement. C'est à moi, toujours, qu'il veut affirmer son assurance. Il me suggère de retourner à mes affaires quand j'en aurais terminé avec Phobos, ceci afin d'avoir l'esprit tout à fait libre pour m'intéresser à ce que nous pourrions faire ensemble. C'est une proposition qui me convient, et même me soulage. Elle me laisse le temps de finir ce que j'ai entamé, d'une part, et je déteste l'inachevé, et de prendre un peu de recul de l'autre, pour définir mon attitude future. Maintenant que j'ai enregistré suffisamment d'informations sur le cas de Loki, il ne me reste plus qu'à les assimiler, avant de les compléter.

– Oui, je serais bien ennuyée de devoir renoncer à un patient sur lequel j'ai déjà passé tant d'heures. Tu lis décidément en moi. – Je lui tourne ces mots avec un petit sourire amusé, mais un regard appuyé. – Retrouves-moi quand tu le souhaites, j'imagine que tu n'auras aucune difficultés à le faire, où que je puisse être.

Il ne m'est pas difficile de me mettre dans une posture d'attente, car je n'attends rien de particulier, en vérité. Je n'ai donc pas la nécessité d'avoir un contrôle sur cette relation. Je ne sais même pas ce que valent les paroles de Loki. Il reviendra peut-être vraiment, ou ne reviendra pas. Vérifier la fiabilité de ses propos est important. S'il est assez tenace, il se présentera de nouveau devant moi. Dans l'autre cas, il ne vaut pas la peine que je me donne du mal pour maintenir un contact.

[Fin]

Contenu sponsorisé