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Traduire ou être traduit [PV Nate Wade & Yitzhak Anavim]

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Message  Nathaniel Wade Mar 12 Mai 2015 - 11:35





Traduire ou être traduit


Deux mois, cela faisait déjà deux mois que j’étais de retour dans mon époque. Après avoir retrouvé mon appartement de fonction mis à sac, j’avais déserté Londres pour réintégrer mon appartement de New York. J’avais sans difficulté fait comprendre à mon conservateur de client, qu’on pouvait toujours discuter du travail que je faisais pour lui via le net. Il me restait deux livres à lui traduire. Je m’y étais remis à fond dès mon retour. Je m’étais abruti de travail pour ne plus songer à Max que j’avais laissé à Londres… en 1941. Avant de rejoindre les États-Unis, j’avais fait quelques recherches pour, dans le meilleur des cas, trouver sa tombe. Mais Max avait été porté disparu. Cette seule information me minait. Que lui était-il arrivé ? Avait-il souffert ? Ces questions rebondissaient dans mon cerveau. L’émotion sur le moment avait été si forte que je me serai de nouveau « déplacé » dans le passé pour… pour faire je ne sais quoi. Mais le voyage retour avait été éprouvant et il me faudrait un bon mois pour récupérer mon don. La traduction de ces livres en chinois me prenait toutes mes ressources intellectuelles et empêchait aux pensées traitres , de s’immiscer sournoisement dans mon cœur ravagé. J’essayai de me persuader que je n’étais pas à ma place dans ce passé en pleine seconde guerre mondiale, me convaincant même que c’était dangereux, qu’avec mes connaissances sur le futur, je pouvais créer de dangereux paradoxes.

***

Je me relève pour me refaire un café serré. J’ai bien avancé sur le deuxième volume de cette trilogie. Par contre je n’adhère toujours pas à la romance qu’elle décrit entre un prince oriental et une courtisane. Mon client anglais est féru de ces histoires à l’eau de rose écrites dans la Chine du XIXème. S’il a fait appel à moi, c’est que je suis le seul non-chinois à pouvoir traduire le plus exactement possible cette langue qui a évoluée. Surtout que ce n’est pas du Mandarin, ni du Cantonais, mais du Xiang qui prend des racines dans le tibétain. Ce type me paye un salaire scandaleux pour être certain que la traduction retranscrira toutes les subtilités employées par l’auteur. Ma traduction du premier volume l’avait enchanté, si bien qu’il m’avait promis une prime honorable si je terminais en avance.

Dehors il fait soleil. Je décide de faire une pause et d’aller trainer au parc. La température clémente me permet de rester en tee-shirt. J’achète un burger au vendeur du coin et une canette de coca et vais m’assoir sur un banc. J’observe les joggeurs qui passent, un casque vissé sur les oreilles. Des hommes d’affaires reconnaissables à leurs chemises de bonne facture font également une pause entre deux réunions ou rendez-vous. Quand je finis mon sandwich, je me rends compte que j’avais faim et que j’ai sauté le repas du midi sans même y penser. Je descends ma canette et vais jeter mes déchets à la poubelle la plus proche avec l’intention de m’acheter de nouveau quelque chose à manger. Un journal économique qui traine là attire mon attention, enfin une publicité pour une nouvelle librairie qui ouvre ses portes. Elle semble s’orienter sur des ouvrages de toutes langues. Je prends le journal et vais commander un donut à la roulotte au centre du parc. Machinalement je feuillette le journal et tombe sur une annonce. Une importante conférence sur les nouvelles technologies a lieu à New York dans quelques semaines à peine et ils sont toujours à la recherche de traducteurs. Je souris en voyant que je peux prétendre à chacun des postes demandés. Les pays industriels seront présents, ce qui donne un panel de langue assez usuel et pour une fois, ils ne demandent pas de traducteurs chinois. La conférence s’étale sur quelques jours, j’ai bien envie de postuler, ça me sortirait de l’eau de rose chinoise et me donnerait un salaire conséquent.

***

J’ai revêtu mon uniforme de travailleur, à savoir un costume et une cravate. Je me présente à l’entrée et on me donne un badge spécial qui permet d’avoir accès aux rangs des traducteurs. Nous sommes parqués en hauteur avec des vitres entre nous pour pas interférer quand on traduit. Je m’attarde un peu au stand des rafraichissements et discute avec une connaissance spécialisée en espagnol. Je suis là pour des industriels russes. Comme toujours dans ces conventions, traducteurs et participants ne se croisent presque pas. On fait presque parti des meubles et cela me convient parfaitement. Une hôtesse nous appelle pour qu’on aille s’installer, ça va commencer.



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Message  Yitzhak Anavim Ven 15 Mai 2015 - 11:34

Il m’arrive de faire d’autres choses que traquer des petites frappes pour leur foutre les jetons ou les envoyer là où ils ne risqueront plus d’embêter personne. Parfois, j’ai aussi l’air d’être un étudiant de dix-neuf ans totalement lambda. Bon, peut-être pas tout à fait avec le look qu’on attend d’un aspirant ingénieur, vu ma dégaine de fashion victime tout droit sortie d’une école de commerce, mais avec un quotidien banal, partagé entre les cours et les soirées ou le rushage intensif le week-end. Je vous jure, j’arrive à être aussi crédible en mec inoffensif qui pense diriger le monde derrière son clavier d’ordinateur qu’en menaçant un anti-mutant avec un bon gros glock dans une ruelle sombre. J’ai même des amis ! Ou, en tout cas, une apparence de vie sociale équilibrée. C’est un truc que j’ai toujours su plutôt bien faire, passer pour quelqu’un de cool, m’entourer d’une bande, séduire par l’insolence pour être à la fois le bon pote amusant, et celui auquel on osera jamais demander le moindre compte s’il se désinvite d’une fête au dernier moment. Quand je vois les problèmes que rencontrent les super-héros à cause de leur identité secrète, je me dis qu’ils n’ont rien compris… Faut pas essayer de passer pour le gentil ou le méchant, juste faire en sorte que les gens n’attendent rien de toi tout en trouvant ta compagnie distrayante. Et aujourd’hui, je me suis trouvé un camarade de galère pour une « activité extra-scolaire obligatoire ». J’aime bien Colin, c’est une force tranquille, un type intelligent qui bosse sérieusement et ne se laisse jamais disperser – pas comme moi. Avec tout ce que je dois gérer pour la confrérie à côté, j’ai pas le temps pour sympathiser avec le destroy de service, je préfère tout miser sur un petit intello nolife pour les travaux d’équipe. On s’apporte tous les deux. Je suis la fréquentation la plus originale qu’il ait eue de sa vie. Je peux même me laisser aller à lui donner des points de vue un peu extrêmes, il temporise quand je vais trop loin, mais sans réelle conviction, parce qu’au fond, ça lui plairait aussi de ne pas toujours se sentir obligé d’agir selon une morale acceptable. En fait, Colin, c’est juste un sociopathe qui essaye de se convaincre de sa parfaite normalité. Ça doit être pour ça que je l’aime bien, même si, à nous voir ensemble, c’est un peu le jour et la nuit. A vingt ans, il a déjà l’air tout miteux. C’est pas qu’il est laid, mais il est tellement timide qu’on pourrait difficilement imaginer un mec avec moins de charisme que ça.

Aujourd’hui, on s’est motivé pour passer notre samedi à des conférences sur les nouvelles technologies. Ça fait des mois que les profs nous bassinent sur le fait qu’on est censés s’intéresser à tout ce qui a rapport de près où de loin aux innovations techniques même en dehors des cours et apparemment, se documenter soi-même ça ne suffit pas. Il faut aller au contact des professionnels et prouver qu’on est pas des inadaptés sociaux liés par intraveineuse à leur ordinateur. Et notre bonne parole ne suffit pas. Non, avant la fin de l’année, il faut rendre un rapport détaillé débile en dix pages sur « pourquoi avoir choisi telle convention ? Qu’est ce qu’on y a vu d’important ? blablabla… » Je pique du nez rien que d’y penser. Bref, c’est chiant. Ça me les brise profond d’être obligé d’aller à un truc qui doit se conclure par l’un des devoirs les plus ennuyeux que le système éducatif ait jamais inventé. Colin, par contre, il le prend plutôt bien. Il est au taquet même. Je l’ai laissé faire son petit programme, en l’écoutant vaguement se lamenter que trop de conférences intéressantes se déroulaient en même temps et assister à un dilemme profond – souffrance mentale visible à ses sourcils froncés – avant de faire une croix devant un intitulé. Il a tellement blindé l’emploi du temps qu’on en a en quasi continu de huit heures à vingt heure sur le papier. Mais pour moi, la journée a commencé à dix heures vu que j’ai estimé la première conférence moins importante que le confort de mon lit. De toute façon, je sais bien que Colin ne pourra pas refuser de me passer ses notes. Après, je ne dis pas que les sujets m’ennuient. Ce qui m’ennuie, c’est d’être vissé sur une chaise, obligé de ne rien faire d’autre qu’écouter un truc que je pourrais me mettre en audio en bossant utilement sur quelque chose. Puis bon, le format de ce genre de séances ouvertes à tous fait que tout est relativement survolé. Y’a pas tellement de contenu. Ou pas celui que j’aimerais vraiment trouver en tout cas.

Je tiens une première conférence avec un peu de sérieux, et on enchaîne direct sur la deuxième, sur un thème un peu plus cinglant, du style : les dangers des nouvelles technologies en cas de guerre. Colin est à fond, mais moi ça me fait plus trépigner sur place qu’autre chose, le discours ultra consensuel qu’ils s’obligent à tenir, surtout avec des intervenants russes, la blague. C’est presque drôle de les regarder se passer le micro en pesant bien leurs mots pour ne surtout pas dire quelque chose qui pourrait être mal interprété et risquerait – ô drame – de lancer un vrai débat. Mais, finalement, la voix du traducteur dans mon oreillette me ramène à d’autres préoccupations. Ça serait pas mal de pouvoir comprendre le russe, et d’autres langues aussi d’ailleurs. Quand je fais de l’espionnage dans les réseaux anti-mutant et mafieux des Etats-Unis, l’anglais n’est pas systématique. Trop d’étrangers dans ce fichu pays. Je peux chopper tout ce qui est en hébreu et en arabe, décoder pas trop mal l’italien et l’espagnol, capter quelques trucs en allemand, mais pour le reste, je sèche. Récemment, je me suis impliqué dans un conflit entre la mafia sicilienne et les russes, et j’avoue que c’était un peu gênant de ne pas pouvoir récupérer les infos qui circulaient d’un côté. C’est comme ça que ça a provoqué une fusillade que j’aurais peut-être pu empêcher. Bon, je pourrais demander à Erl mais, c’est compliqué. Même s’il acceptait, c’est pas des affaires qui sont censées intéresser la Confrérie. Je préfère qu’il se concentre sur ses missions, plutôt que l’obliger à se disperser pour moi. Donc, il faudrait une personne extérieure… Chose tendue à demander. Pas sûr que beaucoup de gens aient une folle envie de savoir ce qu’il se passe dans les coulisses d’une organisation criminelle pour arrondir leurs fins de mois. Je mets quand même ma vision en zoom pour voir la tête du traducteur dans la loge, il est plutôt jeune, plutôt mimi aussi mais c’est pas le sujet. Juste comme ça, je me dis que je pourrais au moins trouver son nom. Alors je prends le programme à Colin, soudain passionné par la liste des intervenants et je lance rapidement une recherche sur mon téléphone. Nathaniel Wade. Il a déjà fait quelques trucs, on peut même trouver un cv sur internet, parfait. Et… woh… C’est un genre de polyglotte en fait ! Je pourrais peut-être essayer de le sonder un peu pour voir, en plus, si j’en crois le programme, les russkovs sont pas de la partie dans les prochains rounds. Il devrait avoir un trou de deux heures.
Quand tout le monde se met à applaudir, je sens que Colin a très envie de me faire partager son opinion le temps de rejoindre la prochaine salle, mais je l’arrête direct :

- Ouais, ouais, c’était cool. On en reparlera plus tard. J’aurais aimé qu’ils approfondissent quelques points quand même alors je vais essayer de les attraper avant qu’ils se tirent. On se rejoint dans deux heures ok ?

Il n’a même pas le temps de me répondre que j’ai déjà filé vers ce qui est la sortie des loges. Ma cible a pas l’air vraiment occupée à discuter avec ses collègues, ça tombe assez bien, même si j’ai pas la moindre idée de comment l’aborder. « Hey ! J’ai trouvé ta traduction vraiment remarquable ! » C’est nul… « Alors, qu’as-tu pensé de l’opinion de la personne que tu traduisais, pour ou contre ? » Il va me prendre pour un cinglé. « Voilà donc le visage qui se cachait derrière cette voix si sensuelle, je t’offre un verre ? » So creepy. Parfois, y’a vraiment pas moyen d’aborder une personne de manière détournée, naturelle et efficace. On s’arrêtera juste au plus efficace du coup :

- Hello ! Excuse moi mais je n’ai pas pu m’empêcher de googleliser ton nom et de ce que j’ai cru comprendre, ils auraient presque pu se limiter à un seul traducteur pour toutes les conférences, vu tes compétences. Plutôt impressionnant. Tu as du temps pour prendre un verre ?

Ne pas trop en faire, montrer assez d’intérêt pour retenir l’attention, ça devrait le faire non ? J’essaye en tout cas de paraître le plus agréable possible. Je me la joue « gentil étudiant qu’il serait cruel de remballer ». Parce que bon, je me fais pas d’illusions, dans ce genre de situations, les gens acceptent parce qu’ils sont trop pris ou dépourvu pour refuser, et parce qu’une réponse négative semblerait trop brutale.


Dernière édition par Yitzhak Anavim le Jeu 21 Mai 2015 - 14:12, édité 1 fois
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Message  Nathaniel Wade Sam 16 Mai 2015 - 16:00





Traduire ou être traduit


J’ai posé ma veste sur la patère mise à ma disposition. Il fait chaud dans ces box de Plexiglas. La conférence commence par un italien, c’est une de mes connaissances qui se colle à la traduction. Rital d’origine mais né sur le continent américain, il n’a aucun mal à passer d’une langue à l’autre. Alors que je rêvasse en regardant l’auditoire dans les rangées en contrebas, j’entends un crachouillis provenant de mon casque que je n’ai pas encore mis. En fait, c’est l’industriel russe qui souhaite évaluer mon niveau de compréhension de sa langue. Je colle le casque sur les oreilles et clique sur l’icône qui renvoie mon micro à son oreillette.  La console que j’ai devant moi est imposante. Il ne faut pas se tromper. Il y a un canal par langue traduite. Les auditeurs choisissent leur langue d’écoute, les traducteurs le canal de la langue qu’ils traduisent. Mon box a un numéro spécifique sur lequel les conférenciers peuvent me parler directement. C’est ce que fait donc cet industriel qui doit être originaire de Kiev si j’en crois son accent. Serait-il Ukrainien ? L’actualité est particulièrement chaude entre la Russie et l’Ukraine, je reste sur mes gardes pour ne pas faire de gaffes diplomatiques.

Le type me parle rapidement, c’est clair qu’il me teste. Je réponds à ses questions avec aisance. Je parle le russe depuis mes sept ans. Ce n’est pas sur cette langue où je peux être pris en défaut. Au bout de cinq minutes, il me demande si j’ai des origines russes. Je lui assure être un pur produit britannique. Il semble satisfait de mes compétences et me salut. Il reste une vingtaine de minutes avant qu’il ne passe. Pendant ce temps, je m’amuse à écouter les différentes traductions. Avec la console j’ai accès à tout. Je ne m’intéresse pas vraiment à ce qui se dit, mais j’aime basculer d’une langue à l’autre. L’industriel que je dois traduire ne passe pas par moi pour comprendre ce qui se dit. Il a son propre traducteur par manque de confiance. Son gars n’étant pas un traducteur officiel, c’est pour cela que je suis ici et aussi pour une autre délégation de moscovites.

Par curiosité, je bascule sur sa ligne, le voyant vert m’indiquant qu’il a oublié de couper le canal de son côté. Ce que j’entends ne me plait pas. Cela sent la magouille et l’espionnage industriel à plein nez. Je devine sans mal que ce que je vais traduire sera vide de sens pour les auditeurs. Je m’en moque, ce n’est pas mon problème. Je suis payé pour traduire par pour dire que l’orateur est un beau menteur.

Comme je m’y attendais, je n’ai que des banalités à traduire. J’accorde ma voix et mon flux de parole pour que ce soit agréable à ceux qui m’écoutent. Je veille à ce que ma traduction ne soit pas hachée. Je me suis un peu documenté sur les nouvelles technologies afin d’en connaitre le vocabulaire et le jargon technique, puis le sujet n’est pas trop rébarbatif. Une demi-heure plus tard, je descends d’une traite ma bouteille d’eau. Ce type est quand même doué pour parler et ne rien dire ! Car les gens applaudissent. J’ai traduit fidèlement ce qu’il a dit, vu son message de remerciement sur mon canal personnel. L’être humain est soit un mouton, soit un loup…

Je sors de ma bulle de plexiglas dans laquelle j’étouffe. J’ai du temps avant ma prochaine intervention, et me dégourdir les jambes me parait une bonne idée. Dans les couloirs je salue quelques confrères, claque une bise à l’une d’elle et lui fait une vague promesse pour un restau un de ces quatre. Ce sont les fadaises habituelles d’un milieu qui ne joue qu’à l’apparence. Je fuis ces futilités vers une baie vitrée et regarde ma messagerie. L’ouvrage que j’ai commandé est arrivé à la librairie où j’ai mes habitudes. Je réponds à quelques SMS, mais l’entrain n’y est pas. Comme à chaque fois que je ne suis pas plongé dans le travail, mes pensées dérivent dangereusement sur un passé où je ne suis plus.

J’ai quitté le Londres de 1941 il y a à peine deux mois et je me sens toujours aussi minable de n’avoir rien dit à Max. Comme un lâche, je lui ai juste mis un mot pour qu’il ne tente par me chercher. Comment l’aurait-il pu, puisque j’ai fait un bond dans l’avenir ? Je reprends tout juste la pleine capacité de mon don, mais je m’en moque. Ma mutation n’est qu’une malédiction qui m’a envoyée dans le passé pour m’y faire trouver l’amour et me ramener seul. Je ne pouvais pas prendre le risque de « déplacer » Max avec moi, je n’étais déjà par certain de retrouver mon époque, puis je n’avais pas le droit de le déraciner de son époque. Je soupire en regardant dehors. Tomber amoureux d’un gars qui vit soixante-treize ans avant mon époque n’est pas la meilleure chose qui me soit arrivé. On pourrait presque en faire un film pour adolescentes. Dans le film évidemment, cela se terminerait bien, les scénaristes trouveraient la pirouette nécessaire pour réunir de nouveau les deux amoureux. Mais dans le monde réel…

- Hello ! Excuse-moi mais je n’ai pas pu m’empêcher de googleliser ton nom et de ce que j’ai cru comprendre, ils auraient presque pu se limiter à un seul traducteur pour toutes les conférences, vu tes compétences. Plutôt impressionnant. Tu as du temps pour prendre un verre ?

Je me retourne vers celui qui m’interpelle. Jeune, un étudiant sans doute, la peau mate au type latino.

- Il y a besoin de plusieurs traducteurs, car je ne peux pas traduire simultanément dans toutes les langues. Mais en effet, je parle et comprends toutes celles qui sont traduite aujourd’hui.

Je lui souris, un peu gêné de son intérêt manifeste pour mes capacités linguistiques. Je n’hésite pas vraiment, l’invitation de ce type est une bonne alternative à mes pensées moroses.

- Oui, avec plaisir, j’ai un peu moins de deux heures devant moi.

Je le suis dans un salon qui est au même niveau que la salle de conférence qu’on vient de quitter. A ma question, il me répond être là sur une forte insistance d’un de ses professeurs. On s’installe au bar où je commande une boisson sans alcool. Le jeune homme ressemble à tous les étudiants, du moins ceux qui passent leur scolarité dans la joie et la bonne humeur. J’ai quitté le cursus scolaire depuis pas si longtemps si on tient compte de ma thèse sur les langues orientales. L’ambiance doctorale est un peu différente de celle qui règne dans les écoles d’ingénieur quoi que cela dépend aussi des cursus. Parler de tout et de rien avec cet étudiant me fera du bien et reprendre un peu pied dans une certaine normalité, un quotidien et une routine.




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Message  Yitzhak Anavim Jeu 21 Mai 2015 - 16:29

De ce que j’ai pu voir rapidement, Nathaniel Wade n’est pas un habitué des traductions live dans des conférences de ce type. Il n’est même pas originaire des États-Unis. Du coup, l’événement n’est pas forcément un prétexte pour retrouver les copains du milieu. Ça m’arrange bien. J’aurais été un peu contrarié de repartir avec une pauvre carte de visite et deux heures à occuper en attendant la fin des débats en cours. Après, je pourrais toujours me pointer en retard dans un amphi, mais j’ai pas envie d’être « le mec qui débarque ». ça me semble plus gênant qu’entrer en cours à la bourre, je sais pas pourquoi, peut-être parce qu’absolument rien ne m’oblige à aller à ces conférences. Mais il faut croire que le problème ne se posera pas. Le traducteur ne fait pas d’histoires pour me suivre dans l’espace bar. Il semble même content de me parler, genre je lui crée une animation pendant sa pause. Il me confirme aussi ses vastes compétences dans le domaine des langues et cela sans se transformer en gars qui se la ramène un peu trop. En fait, il a vraiment l’air super sympa, du type à parler de tout et de rien en restant toujours naturel et très poli. Un climat de confiance ne devrait pas être trop compliqué à installer dans ces conditions. Le plus dur sera de casser l’ambiance en me révélant moins post-ado naïf que je ne m’amuse à en donner l’impression. Mais, pour l’instant, je reste dans mon rôle social. Je feins d’être très intrigué par sa profession en misant sur la tendance qu’ont beaucoup de jeunes de se rêver traducteur. Des potes de dix-huit piges qui se voient déjà assurer la traduction d’un futur best-seller parce qu’ils font du sous-titre bénévole sur des séries en streaming et que les vrais traducteurs ont l’air franchement incompétents, on en a tous connu au moins un. Je peux devenir celui-là si je veux.

En chemin, je lui explique vaguement les raisons de ma présence ici. Je suis en deuxième année d’école d’ingé, on n’est obligé de prouver notre motivation à travers nos activités en dehors des cours et, pour ça, commencer par récolter les billets autour des conventions sur la technologie ou l’informatique peut sauver une moyenne générale. Je reste cependant assez désinvolte pour lui faire comprendre que je ne tiens vraiment pas à me taper tous les trucs au programme. Enfin, je suis un étudiant plutôt normal au final. Assez sérieux pour s’en sortir, mais toujours prêt à dévier de la trajectoire pour des occupations plus amusantes. Tant que Nathaniel ne me presse pas pour savoir ce que je lui veux concrètement, je peux prendre mon temps. On se prend un verre au bar. Je reste au coca vu que c’est pas tellement l’heure de l’apéro ni le moment de me rendre mentalement paresseux, de renoncer à rejoindre Collin pour regarder où sont les bonnes soirées sur facebook. Je lui ai promis de rester un minimum sérieux, il m’en voudra. Une fois qu’on s’est callé dans un fauteuil, je poursuis :

— Et tu fais plutôt de la traduction de livres alors ? Tu ne t’ennuies pas trop ici ? Je te souhaite que ton prochain round soit un peu plus intéressant que celui-là. Je suis venu ici parce que j’ai l’intention de me spécialiser dans la robotique, mais le débat était vraiment mou du genou, pas vrai ? On t’aurait donné une plaquette promotionnelle sur les dernières innovations de l’Ukraine en matière d’armement que ça aurait été pareil. Enfin… Y’a toujours un côté vitrine dans ce genre d’événement, faut impressionner le plus grand monde, surtout les journalistes qui ont révisé vite fait leur sujet sur wikipedia.

Je lui tourne un sourire un peu moqueur. Alors, a-t-il révisé à l’arrache lui aussi ? La pique est sous-entendue mais sans méchanceté. C’est un moyen simple d’abattre quelques barrières. J’ai toujours eu un débit facile et une assurance quasi innée. On me le reproche parfois. Paraît que ça fait un peu trop jeune sûr de lui qui mériterait de se prendre quelques claques pour revenir à la réalité. Ceci dit, faut pas s’inquiéter là-dessus pour moi. C’est déjà arrivé, ça arrivera sans doute encore, mais j’espère bien que ça ne suffira pas à me calmer ou me faire taire. Dans mon élan, je me rends compte que je n’ai pas pris le temps de me présenter. J’hésite entre lui donner un surnom ou mon prénom complet, chose assez rare en fait. Si la personne en face n’est pas juive, elle a tendance à froncer les sourcils et à me demander avec une expression inquiète si on peut faire plus simple. Du coup, je vais toujours au plus simple. Mais un traducteur capable de maîtriser une trentaine de langues – de ce que j’ai compris – ça ne devrait pas lui poser de gros problèmes.

— Ah et je m’appelle Yitzhak au fait ! Je suis bien né ici, mais comme beaucoup d’américains, j’ai de la famille à l’étranger aussi. J’ai remarqué que les personnes confrontées très jeunes à plusieurs langues ont plus de souplesses dans leur apprentissage. Pour moi, ça se limite surtout à trois, je dirais, hébreu et arabe. Je suppose que pour maîtriser tant de langues, tu as dû baigner assez tôt là-dedans non ?

J’essaye de trouver un lien commun entre nous, un bon point d’entente. Souvent, parler de l’expérience qu’on a soit même avec les langues aide bien. C’est le genre de truc que les gens aiment partager, leur expérience avec différentes cultures, différentes manières d’exprimer une même idée. Même si je le fais surtout pour sonder Nathaniel et voir si je peux espérer passer un « contrat » avec lui, ça reste agréable d’ailleurs. Ce n’est pas si souvent que je me pousse à une conversation dans laquelle je m’autorise à ne parler de tout et de rien. En général, je fais surtout l’imbécile pour éviter de laisser échapper des éléments un peu trop gênants. Ma vie est devenue un terrain trop miné pour que je m’amuse à m’aventurer dans le passé avec n’importe qui. J’ai l’impression que le moindre chemin finit par me conduire à une impasse où de « gentil compagnon », je vais passer à « mec à problèmes ». J’essaye à tout prix d’éviter ça. Cependant, vu ce que j’aimerais demander à ce charmant jeune homme, je peux m’autoriser quelques risques. Il finira assez rapidement par me trouver bizarre dans tous les cas.
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Traduire ou être traduit [PV Nate Wade & Yitzhak Anavim] Empty Re: Traduire ou être traduit [PV Nate Wade & Yitzhak Anavim]

Message  Nathaniel Wade Lun 25 Mai 2015 - 11:42





Le traducteur à l’œuvre


Je souris quand il me dit que beaucoup de jeunes s’imagine traducteurs car à force de regarder des séries en streaming, il se sentent capable de les sous-titrer.  C’est vrai qu’il y a un sentiment de valorisation et parfois de puissance de savoir parler plusieurs langues. Car c’est justement ce qui sépare les hommes sur terre, ne pas pouvoir se comprendre directement et n’importe où sur le globe. Ayant cette faculté depuis mon plus jeune âge, je n’ai jamais mis sur ce don un espoir ou une espérance quelconque. Je ne suis pas idiot pour savoir le potentiel extraordinaire que j’ai. Beaucoup diraient que je gâche mes facultés en restant le nez sur des traductions de livre ou plus rarement maintenant depuis mon enlèvement sur la transcription en temps réel lors de conférences.

Je suis heureux de m’être sorti le nez de cette trilogie à l’eau de rose chinoise pour ce colloque. Si j’arrivais à faire oublier ma mutation et me faire reconnaitre en tant que hyper-polyglotte exceptionnel  – nous sommes moins de trente à perler plus de dix langues depuis les cent dernières années–, je pourrais de nouveau voyager la conscience plus tranquille et ne plus me contenter de traduire des livres mais bien de pratiquer oralement les langues que je connais.

- Et tu fais plutôt de la traduction de livres alors ? Tu ne t’ennuies pas trop ici ? Me demande ce jeune étudiant.

J’acquiesce sans donner les réelles raisons de ce choix. Et lui explique que non, je ne m’ennuie pas, car je ne me focalise pas sur le fond des discours que je retranscris, mais me plais à analyser les variations de langage d’un individu à l’autre. Il me souhaite que ma prochaine intervention soit tout de même plus intéressante que l’intervention de l’ukrainien dont il a parfaitement analysé la pauvreté de l’exposé.

- C’est souvent ainsi que ce soit pour des conventions professionnelles ou plutôt politiques. Beaucoup d’effet d’annonce, mais jamais vraiment rien de concret ou d’établi. Ce genre d’évènement sert à montrer qu’on est là et de se rendre compte qui sont ses concurrents.  Les vraies informations filtreront dans les coulisses de ce colloque, pas en assemblée plénière.

L’étudiant à un regard moqueur quand il évoque les journalistes qui bachotent leur sujet sur Wikipédia. Je lui rends son sourire. Je ne vais pas lui faire l’affront de m’y connaitre en nouvelles technologies, du moins pas plus ce que le tout un chacun sait quand il s’intéresse un peu de près aux technologies qu’il utilise au quotidien, ce qui est mon cas.

- J’ai en effet potassé le vocabulaire. Les mots relatifs à la science sont souvent des néologismes propres aux domaines d’application, et donc  fréquemment absents des dictionnaires. Enfin tu dois connaitre les phrases assez… originales que te sort Google translate. Je n’ai pas le droit à ce genre de défaut.

- Ah et je m’appelle Yitzhak au fait ! Dit l’étudiant se présentant enfin.

Je ne m’offusque pas du côté cavalier de son approche initiale. De toute manière on ne se reverra pas une fois que je reprends mon tour dans ma bulle de plexiglass.

-Je suis bien né ici, poursuit-il. Mais comme beaucoup d’américains, j’ai de la famille à l’étranger aussi. J’ai remarqué que les personnes confrontées très jeunes à plusieurs langues ont plus de souplesses dans leur apprentissage. Pour moi, ça se limite surtout à trois, je dirais, hébreu et arabe. Je suppose que pour maîtriser tant de langues, tu as dû baigner assez tôt là-dedans non ?

- Enchanté d’en connaitre un peu plus sur toi… Isaac. Ma mère est traductrice, elle ne m’a jamais parlé dans notre langue maternelle. Dis-je dans un hébreu moderne.

J’aime les accents de cette langue chamito-sémitiques. On dit que l’italien est celle qu’on doit utiliser pour parler d’amour, mais la sémantique moyen-orientale a des couleurs musicales qui s’y prête aussi… Mais l’occidental de base préfère entendre une langue latine, qu’une issue d’une région « problématique pour l’homme blanc », pour décrire une situation politiquement délicate.

-  A cinq ans je parlais couramment le français et l’allemand, en plus de l’anglais, poursuivais-je en arabe. A sept ans j’avais un niveau honorable en russe et en italien.

Je lui fait un sourire malicieux pour qu'il comprenne que je peux aussi être taquin, en le testant sur ses affirmations et connaissances potentielles. Je reprends en anglais avec mon aisance habituelle à passer d’une langue à l’autre comme si en fait, je n’en voyais qu’une seule et unique.

- A l’école on me surnommait l’extra-terrestre car je ne captais pas que les autres enfants parlaient difficilement deux langues. Je ne suis pas un extra-terrestre hein ! J’ai juste une prédisposition exceptionnelle pour les langues. Et toi qu’est-ce qui te motive dans ta formation ?




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Message  Yitzhak Anavim Mer 3 Juin 2015 - 16:16

C’est clair qu’il ne vaut mieux pas faire de la traduction ici en espérant apprendre des choses intéressantes. Après, je donne mon avis, il est un peu élitiste. Je suis certain que plus de la moitié de l’amphi était sincèrement intéressé par la vacuité du débat avec les ukrainiens. Les gens adorent qu’on leur rabâche des choses qu’ils savent déjà, ça flatte leurs connaissances, ils se sentent plus malins quand ils comprennent direct les références et peuvent hocher du chef d’un air entendu en regardant autour d’eux pour bien s’assurer qu’ils sont les seuls à afficher leur grande maîtrise du sujet. Ça me fait toujours rire ça, les teubés qui secouent la tête d’un air profondément concerné. On dirait qu’ils guettaient leur moment depuis des heures tellement ils ont l’air heureux de le faire. Au moins, Nathaniel est assez renseigné pour partager mon sentiment, ce qui nous permet d’échanger un peu. Il semble assez vif, je pourrais lui faire confiance là-dessus si on doit bosser ensemble à l’avenir. En même temps, ça n’aurait un peu étonné de tomber sur un mec intellectuellement limité vu son background. Je hausse les épaules, la mine un peu blasée pour lui donner la réplique :

— Ouais, dans les coulisses, ou si on sait comment se servir sur internet… Vu le prix du billet, ça serait pas bon pour eux d’attirer que les gens hyper pointus de toute façon hein. Puis faut penser à ces pauvres étudiants de licence qui ont besoin de choses simple pour faire des compte-rendu tout aussi assommants !

On a aussi l’occasion de plaisanter sur les journalistes et traducteurs pas trop au point sur des sujets qu’ils sont censés présenter. C’est toujours drôle, ou désespérant, d’entendre une traduction approximative, ou une définition totalement à côté de la plaque. Nathaniel prend son travail au sérieux mais on ne peut pas vraiment dire que ce soit le cas de tous les autres professionnels, d’autant plus quand il faut assurer plusieurs traductions de sujets différent. Pour leur excuse, certains disent qu’ils n’ont vraiment pas le temps de tout assimiler au mieux, mais je trouve beaucoup plus drôle de me plaindre de leur incompétence, surtout que mon interlocuteur se montre suffisamment à l’aise pour ne pas s’en offusquer. Je suis pas à la recherche d’un type « approximatif » de toute manière. Il me faut du consciencieux, du lourd. Une erreur de traduction, c’est mignon dans une conférence grand public, mais quand il s’agit de courrier privé entre criminels, ça peut vite avoir des effets désastreux. Du coup, je préfère le sonder en plaisantant et en essayant d’évaluer, à son attitude, s’il est vraiment sincère. Les guignols prétentieux, ça existe, mais il prend aussi le temps de me décrire son parcours assez particulier. Avec des capacités comme les siennes, on aurait pu le soupçonner d’être un mutant polyglotte, et sans doute qu’il en existe parmi les meilleurs traducteurs du monde, mais Nathaniel a visiblement été formé au berceau par sa mère. Assez spécial. Genre elle l’a prédestiné à suivre la même voie, une sorte de transmission familiale. Je crois qu’il s’amuse à me tester aussi vu qu’il tient ce discours dans un hébreu vraiment très correct. Je ne réagis pas plus que ça, mais je suis un peu surpris tout de même. Autant je peux comprendre qu’il soit intéressait de parler arabe pour sa profession, autant je reconnais que l’hébreu est relativement moins utile. Néanmoins, savoir qu’il le maîtrise est une bonne chose pour lui faire passer des informations orales un peu plus discrètes. Je lui fais un sourire complice. Il poursuit assez logiquement en arabe en ajoutant toutes les langues avec lesquelles il pouvait jongler à moins de dix ans. Tu m’étonnes que ça a dû le mettre en retrait du reste des gamins. C’est pas bon d’être trop intelligent quand t’es gosse, c’est pas une différence que l’esprit très tribal d’une classe d’enfants pardonne.

— Un extra-terrestre non, tu pourrais être un mutant mais l’histoire avec ta mère semble suffire comme explication. Moi, c’est avec mon grand-père que j’ai appris l’hébreu, puis l’arabe par la force des choses. Puis, enfin, j’ai fait un bout de ma scolarité en Israël. En tout cas, je te plains un peu, t’as dû morfler à l’école non ? J’avais de bonne prédispositions aussi, mais plus pour les matières scientifiques. Je dirais que c’est un des premiers trucs qui m’a motivé à suivre cette formation. J’aime me casser la tête à trouver des solutions qui semblent impossibles, trouver le moyen de casser des clés informatiques, ce genre de choses. Y’a du défi, c’est génial. Mais pour ma spécialisation, c’est surtout la robotique qui m’intéresse. Pour ne rien te cacher, ma mutation y a pas mal contribué. J’aimerais pouvoir perfectionner ce que je suis capable de créer et je trouverais frustrant de ne pas pouvoir exploiter totalement ma particularité.

En disant cela j’ouvre ma paume et fait apparaître un drone très rudimentaire qui fait le tour de nos têtes avant de se poser sur la table. Qu’est-ce que vous croyez, que je vais garder ma mutation secrète ? Je ne précise jamais en quoi elle consiste exactement, mais je ne milite par pour le droit des mutants pour continuer à me cacher moi-même, au contraire. Je suis convaincu qu’un des premiers combat réside dans le fait de se montrer tel qu’on est. Sinon, après tout, comment savoir si les gens que l’on fréquente valent vraiment la peine d’être aimés ? Je ne m’inquiète pas d’effrayer Nathaniel parce que je ne travaillerai de toute manière pas avec quelqu’un qui rejetterait les êtres dotés d’un gène x. Ceux-là, je leur pourris la vie, les tues parfois, mais je n’en fais jamais des alliés, sauf si j’ai déjà prévu de les trahir quand ils auront cessés de m’être utiles.


Dernière édition par Yitzhak Anavim le Mer 17 Juin 2015 - 16:48, édité 1 fois
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Message  Nathaniel Wade Mar 9 Juin 2015 - 9:53





Mutants ²


Yitzhak semble avoir un regard assez acide sur ses contemporains. Toutefois je partage son avis sur le genre d’individus qui assistent à ces conférences. Ce sont globalement des gens instruits, ou du moins avec un minimum d’études supérieures. Néanmoins, il est évident que l’intelligence d’un individu ne se mesure pas uniquement aux diplômes qu’il a obtenus. Le jeune étudiant souligne la place démesurée de l’égo de chacun qui veut paraître savant aux yeux des autres. Je souris en repensant à une phrase que répétait mon père dans ses moments de philosophie de comptoir « L’intelligence, c’est comme la confiture, moins on en a, plus on l’étale. » Ma mère plus nuancée dans ses positions et aussi par gout de provocation, le contrait par la citation d’un humoriste français disant que « L’intelligence, c’est comme les parachutes, quand on n’en a pas, on s’écrase. » Loin des joutes parentales où mon père finissait généralement bon perdant, sans vraiment s’en rendre compte, je pense que le troupeau d’aujourd’hui qui dodeline du chef comme un chien-bascule à l’arrière d’une voiture, manque de confiture plus que de parachute. Car, ils ont tout de même assez de malice pour se faire offrir par leurs sociétés respectives, un bon gueuleton et une journée à jouer au coq.

Je trouve ma conversation avec Yitzhak plaisante et divertissante. Le jeune homme me semble allier un subtil mélange de décontraction et de sérieux. Il n’est peut-être pas premier de classe, ou du moins ne semble pas en avoir le genre, mais son analyse de l’environnement qui nous entoure est juste et pertinente. Je sens aussi une pointe désabusée dans ses propos, ou est-ce une caractéristique de ceux qui comme lui vont entrer bientôt dans la vie active ? Nous reparlons du métier de traducteur et des imprécisions ou même des grossières erreurs qui se glissent parfois dans cette activité. Je lui explique que le plus difficile dans une langue qui n’est pas la sienne, n’est pas sa grammaire ou son orthographe, mais son usage qui change aux grés des protagonistes, du moment de la journée, voir même du temps qu’il fait. Ce qui est impoli en Asie du sud-est est tout à fait acceptable à l’ouest et inversement. Ce sont des nuances que l’on apprend naturellement avec sa langue maternelle mais qui sont très difficile à appréhender pour une langue étrangère. Je lui explique qu’à un an, un enfant a formaté son oreille sur sa langue maternelle, rendant les autres plus obscures. Et que c’est justement ce blocage que ma mère a cassé en ne me parlant jamais dans ma langue maternelle, me laissant ainsi perméable à tous les langages. Ça, plus une prédisposition naturelle et vraisemblablement génétique font celui que je suis maintenant. Mon grand-père maternel, sans être polyglotte, parlait tout de même trois langues couramment.

Yitzhak m’apprend qu’il a justement appris l’hébreu avec son grand-père. Je salue l’initiative de cet homme à transmettre son langage et ne pas laisser l’anglais devenir la langue mondiale, même si c’est la mienne. L’anglais étant une des langues les plus facile à apprendre car elle est l’une des plus pauvre dans ses nuances. Il m’explique qu’il est intéressé par la robotique. C’est un domaine qui me fascine, mais où je suis totalement néophyte.

Je tique cependant quand il me dit que je pourrais être un mutant et non pas un extra-terrestre avec mes capacités. Car mutant, j’en suis bien un. Mais cela ne m’a apporté que galères et malheurs. Ce « don » convoité par les voleurs… ce « don » qui me balance dans le passé pour m’y faire connaitre un amour impossible… ce « don » qui a coupé mon petit frère en deux. Je le vis comme un fardeau plus qu’un apport bienfaiteur. C’est donc étonné que je l’écoute me parler de sa propre mutation comme il me conterait ses exploits sportifs. Là où je m’évertue à me faire oublier comme mutant, il m’exhibe ses capacités en faisant apparaître un minuscule drone dans la paume de sa main.

L’étonnement passé de cette différence d’attitude vis-à-vis de nos dons respectifs, c’est amusé que je regarde cette mécanique miniature voler autour de nous pour finalement se poser sur la table. Ces engins sont pour moi comme magiques. J’ai un niveau standard côté sciences me permettant de comprendre les principes fondamentaux qui permettent à un tel objet de voler,  et que tout ceci est régi par des équations et non pas par de la magie. Mais les mathématiques sont un langage que je ne comprends pas et comme tout ce que l’on ne comprend pas, cela fini par prendre une dimension magique. Yitzhak semble être capable de faire apparaître et de fabriquer cet engin. Son don est différent du mien, car je n’ai pas senti l’espace-temps bouger. Je ne jalouse pas ses capacités qui me semblent bien plus utiles que les miennes.

Je me rends compte que je dois avoir l’air d’un gamin à qui on vient de faire un tour de magie. Alors pour le rassurer sur ma position envers les gens qui ont muté, j’escamote le drone dans un espace-temps parallèle, courbe cette dimension et refait revenir l’objet  qui se pose en équilibre sur son verre. La taille de l’objet et la courte distance font que je suis extrêmement précis. Avec ce que j’ai vécu, c’est devenu instinctif d’être discret sur ma mutation, c’est donc en hébreux que je poursuis

- Ma mutation est plus modeste, je ne fais que « déplacer », pas construire.

J’hésite sur le terme approprié pour « déplacer », vu que j’ai appris l’hébraïque par défi vis-à-vis de ma mère qui peine sur les langues orientales. J’ai appris cette langue sous sa forme littéraire et ne connais que très peu les usages de la langue parlée.

- C’est une capacité qui est vraiment en accord avec ton choix de carrière, continué-je. J’espère qu’un jour le gêne X soit intégré comme une composante normale d’un individu et ne charrie plus ce lot de craintes ou d’envie. Personnellement cela m’a plus attiré des ennuis qu’autres chose.

C’est bien la première fois que je dévoile cet aspect de ma personne à un inconnu. Mais Yitzhak est lui aussi un mutant et je me sens à l’aise avec lui. Puis soyons honnête, cela fait du bien de pouvoir tomber le masque et de lâcher ce que je suis réellement.


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Message  Yitzhak Anavim Mer 17 Juin 2015 - 18:52

Le moins qu'on puisse dire, c'est que Nathaniel est vraiment passionné. Je suis tombé sur le genre de  personne qui se donne toujours à 100 % pour parler dans les détails de son métier on dirait. Il accepte vraiment la discussion avec plaisir, trouvant apparemment tout naturel que je m'intéresse de près à ses activités. C'est agréable d'avoir à faire si peu d'efforts pour engager un bon contact. Le passage sur les imprécisions de la traduction lui donne l'occasion d'évoquer toutes les difficultés qu'on peut avoir à saisir les nuances en switchant d'une langue à une autre, surtout quand, dans un même pays, selon la région, la personnalité de l'interlocuteur, on peut avoir des variations sur un tas de formules. Je l'approuve, sans trop en rajouter de mon côté. Je pratique l'hébreu avec presque autant d'aisance que l'anglais, alors je pourrais aussi partager mon expérience, mais ça étendrait un peu trop la conversation. Si on arrive au bout des deux heures sans avoir pu dépasser les anecdotes de traduction, sujet qui ne devait être qu'une amorce, ce serait un échec. En même temps, ça signifierait aussi qu'on s'est bien entendu, l'entretien est loin d'être terminé et ça donnerait une bonne raison de se voir dans un lieu un peu plus intime que l'espace bar ouvert d'un parc d'exposition. En soi, je m'en plaindrais pas. Rien ne presse, j'ai des idées modulables, alors si j'ai la chance de bien discuter avec un beau gosse, je vais pas non plus tout faire pour éviter de le revoir. Le problème, c'est que si l'échange ne semble pas assez intéressant pour nécessiter un autre rendez-vous, et si, justement, l'impression de se faire rencarder le gênait, j'aurais dépensé de l'énergie pour rien. Du coup, je me contente de lui parler de mon grand-père et, forcément, Nathaniel a une admiration automatique pour l'homme qui a tenu à transmettre une partie de son patrimoine oral. J'approuve avec un large sourire. J'ai un respect énorme pour mon grand-père, je suis toujours heureux d'avoir une occasion de dire tout ce qu'il m'a apporté de précieux, quel genre de personne géniale il est à mes yeux.

– En quelque sorte, mon grand-père a reporté ce qu'il a échoué à faire avec mon père. C'est un historien qui a consacré un partie de sa vie à l'étude de la culture hébraïque. Je lui suis reconnaissant pour tout ce qu'il m'a fait partager.

Je n'ai pas forcément envie d'imposer tous les détails de mon histoire familiale à un inconnu, je n'ai pas l'habitude de trop en faire et je crains de l'ennuyer. Mon père a rejeté la culture de sa famille parce qu'il ne voulait pas être autre chose qu'un citoyen américain bien intégré, et qu'il garde une imagination que je considère très pauvre et terre-à-terre. Les liens que j'ai avec mes parents sont très distants. Ils m'appellent de temps en temps pour m'inviter à manger à la maison ou avoir de mes nouvelles, mais, à part me poser des questions sur mes études, ils n'ont pas grand-chose à me dire, et moi non plus d'ailleurs. J'ai souvent eu le sentiment que mon père n'était qu'une anomalie entre mon grand-père et moi. Mes parents disaient qu'il était à moitié fanatique et voulait m'enrôler dans sa « secte juive ». Ils se sont montrés injustement cruels avec lui. Il y a peut-être des choses que je n'ai pas saisies à l'époque, ou refusé de comprendre, peut-être une souffrance véritable et inexprimée de la part de mon père par rapport à son enfance, mais je n'ai jamais pu voir papy Levy comme un religieux cinglé, il est plutôt du type croyant désabusé, pas du tout à faire du prosélytisme ou toutes ces choses dont l'accusent des personnes trop obsédées par leur boulot pour capter ce qu'il se passe autour d'elle. Bref, je m'égare, l'histoire de ma famille est inutilement complexe, je vous avais prévenus.
Je suis beaucoup moins réservé pour parler de ma mutation. Nathaniel n'a aucun mouvement de recul en voyant mon petit drone se matérialiser dans ma main, il a l'air au contraire fasciné et m'avoue être un peu largué niveau technologie. Bah, j'ai pourtant rien créé de terrible, un gadget tout bidon qui vole de la manière la plus rudimentaire du monde. Pendant qu'il est à son étonnement, j'ajoute vaguement :

– Je ne peux pas matérialiser des engins dont je ne comprends pas le fonctionnement. Ma mutation s'arrête avec mes connaissances, en quelque sorte.

Puis, soudain, mon ami traducteur fait un truc inattendu. Il fait disparaître ma création, je sais pas trop comment, et la fait revenir juste sur le bord de mon verre. Wah, dément ! Cette fois, c'est mon tour de faire de grands yeux surpris. Si je m'attendais aussi à tomber sur un mutant, les copains ! Je tapote le drone du doigt comme pour vérifier qu'il est toujours aussi réel, et je tourne un sourire complice à Nathaniel. Je suis toujours enchanté de rencontrer des congénères. Là, il se sent obligé de me dire que son pouvoir est un peu plus nul que le mien, en s'exprimant à nouveau en hébreu. Effectivement, ça devient plus prudent pour la suite, et il a bien compris l'utilité de profiter de notre souplesse avec les langues. Bon, on sent que l'hébreu n'est pas sa « meilleure » langue, il a une bonne expression mais un quelque chose qui manque de naturel, les mots sont trop choisis, les phrases trop parfaites pour venir d'un local. Ça n'a absolument rien de dérangeant ceci dit.

– Pas la peine d'être humble, ça m'a l'air vachement intéressant ce que tu sais faire aussi ! J'aurais peut-être mené des études un peu différentes sans cette capacité, mais je pense aussi que l'on doit essayer d'avoir une vie en accord avec son gène x quand on en a la possibilité. On en vient parfois à rejeter des individus qui ont des pouvoirs utiles à tous, sous prétexte qu'un être humain normal ne pourrait atteindre leur niveau aussi facilement. C'est dommage.

Je ne cache pas mon pouvoir, mais je n'irais pas jusqu'à dire que je suis vu d'un bon œil par tout le monde à l'université. On me tolère en général, mais certains enseignants ont exigé que je fasse tout « à la main » et des étudiants considèrent que je devrais être noté plus sévèrement. La paranoïa prend vite quand on est un mutant, surtout si on a le défaut d'être doué. J'ai beau expliquer que si je réussis à créer de bonnes machines, c'est parce que je me suis exercé manuellement avant, que j'ai sans doute beaucoup plus d'heures, d'années de boulot à mon actif qu'eux et que, non, je fais pas apparaître des circuits électroniques par magie, par la seule force de ma volonté, beaucoup restent sceptiques. Ça les arrange de rester sceptiques, ça excuse leur médiocrité. En tout cas, je vois bien ce que Nathaniel peut avoir vécu de son côté. Je réfléchis à l'instant au genre de problèmes qu'on peut s'attirer avec un pouvoir comme le sien. J'ai assez vite une idée précise de ce que je serais tenté de faire dans son cas.

– ça donne pas mal de possibilités pour contourner les lois ton truc… J'imagine que ça doit être difficile de toujours résister ou attirer des convoitises aussi.

Chose qui arrive à tous les mutants qui ont une mutation pas trop naze. Mais je préfère ne pas développer davantage parce que j'ai l'impression que Nathaniel est prêt à parler et je suis toujours très attentif aux histoires des autres mutants. Montrer son pouvoir, l'assumer pour les autres, c'est aussi leur donner l'opportunité de se révéler, de discuter. Puis bon, faut quand même avouer que, je me trouve assez chanceux. Je pourrais récupérer un traducteur doublé d'un mutant pratique et, c'est toujours utile d'avoir de nouveaux mutants dans son carnet d'adresse pour savoir vers qui se tourner en cas de besoin, sans le forcer à rien, évidemment. Il m'a fait confiance en me révélant sa mutation, je suis capable de respecter ça.
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Message  Nathaniel Wade Lun 22 Juin 2015 - 8:11





Mutant ²


J’écoute avec intérêt ce que Yitzhak me dévoile sur une partie assez personnelle de sa famille. Je note aussi sa grammaire, les élisions qu’il fait. Je ne sais pas si son langage est celui qui se pratique en Israël, mais c’est au moins ce qui se dit à New York. Je ne boude pas cette discussion pour ce doute, car ce qui m’intéresse ce sont bien les langues vivantes, celle qui sont effectivement parlées, même si elles s’éloignent de la langue pure que peu de gens utilisent… sauf les traducteurs consciencieux…  J’adapte un peu ma prononciation au fur et à mesure, ce qui fait sourire mon interlocuteur. Il est évident que je parle comme un livre et cela ne me convient pas, car cela me donne un ton snob ou pédant, qui est aux antipodes de ma personnalité.

Je perçois pas mal de non-dits sur son histoire familiale. La culture hébraïque, et l’histoire des juifs en général est d’une grande complexité liée à un peuple qui a beaucoup bougé au fil des époques et qui s’est adapté au fur et à mesure des contraintes qui n’ont pas manquées d’être nombreuses et difficiles, pour ne pas dire indicibles. Pour bien comprendre une langue, il faut avoir une bonne connaissance de l’histoire des gens qui la parlent. Cependant, le moyen orient est un tel imbroglio politique qui prend ses origines sur plusieurs millénaires qu’il est difficile de vraiment avoir une vision objective de la situation actuelle. Puis comme tout un chacun, on se laisse influencer par le courant de pensée générale. Je me garde donc bien de m’aventurer sur ce terrain, que je trouve miné. Je ne veux pas non plus vexer ou froisser mon interlocuteur par une remarque maladroite ou malvenue, même si c’est involontaire de ma part. Ce que je conclus approximativement, c’est qu’Yitzhak adore son grand père et le respecte énormément. Il s’est aussi approprié ses origines en apprenant la langue de ses ancêtres. J’en déduis qu’il n’est pas ce genre de jeune qui se fond dans la masse et fait le mouton pour ne pas se retrouver différent des autres.  Ce même si de prime abord, son apparence pourrait le laisser croire.

Le changement de sujet sur nos mutations inverse un peu les rôles. Car c’est de mon côté qu’il risque d’y avoir des non-dits. J’ai dû utiliser cette capacité de manière criminelle. Même si cela a sauvé la vie de Max et la mienne par la même occasion, mes rêves sont souvent hantés par le cœur de cet allemand qui bat encore dans ma paume. J’ai lu par la suite que le muscle cardiaque n’avait pas besoin du cerveau pour battre, je peux tristement le confirmer… Cependant l’assurance de Yitzhak avec ce gêne qui nous fait parfois craindre des autres, me rassure quelque part. Je n’ai que peu de contact avec les autres mutants, vu que je garde mes capacités pour moi. Autant je suis ouvert dès qu’il s’agit de langue et d’échanges sur les gens et leur vie, autant je me recroqueville avec ce que j’appelle une calamité. Car si je n’avais pas eu cette capacité, jamais j’aurai atterri à Londres en 1941, Ni connu Max et encore moins cet allemand que j’ai finalement assassiné en déplaçant son cœur hors de son corps.

Le discours rassurant de mon interlocuteur sur la manière d’appréhender ce don, sans pour autant m’affranchir de mon vécu, me libère d’un poids, me disant que c’est possible de vivre avec. Je n’y peux rien d’être né ainsi, et il est vrai que dans l’absolu, il serait idiot de ne pas utiliser les capacités que m’a donné la nature.

– Ça donne pas mal de possibilités pour contourner les lois ton truc… J'imagine que ça doit être difficile de toujours résister ou attirer des convoitises aussi.

Je fais une grimace de circonstance. L’étudiant est prompt à la réflexion et trouve sans mal tout l’intérêt de mon don. Le pire, c’est que je ne vois aucune utilisation saine de ma mutation, mis à part déplacer mes courses directement chez moi et m’éviter à devoir les porter.

– La résistance à la convoitise varie d’un individu à l’autre. De même que le contexte peut transformer un homme honnête en larron d’occasion… C’est malheureusement le principal intérêt de ma mutation… Certains ont déjà voulu m’utiliser dans ce sens, c’est pour cela que je reste assez frileux pour parler ouvertement de mon gêne X.

Je consulte ma montre, j’ai encore largement le temps avant ma prochaine intervention. Nous regardons un groupe de conférenciers passer bruyamment pour aller s’installer au bar. Le genre avec le ventre qui déborde largement du ceinturon. Ils vont sans doute refaire le monde autour d’un verre et comme le soulignait Yitzhak un peu avant, et s’auto féliciter de leur brio respectifs. Mes pensées vagabondent un peu et je me dis que nous avons tous nos lâchetés. Et que sommes toutes, Yitzhak et moi ne sommes pas si différents du troupeau de mouton qui nous entoure. Nous avons l’impression d’être au-dessus, ou du moins avoir conscience de la médiocrité générale de l’être humain, mais à regarder la paille dans l’œil de son voisin… on oublie la poutre qui se trouve dans le nôtre. Être conscient de ce travers de l’homme, nous rend-il meilleur ? J’en doute fortement. Je me reconcentre sur l’étudiant en robotique et le scrute d’un œil nouveau. Quelles sont ses faiblesses et ses travers ? D’apparence, il ressemble à un étudiant content de notre échange et mature d’une certaine intelligence de vie. Mais quelle est la zone d’ombre qui se cache derrière son sourire et sa mine enjouée ? Je me secoue mentalement, je deviens mélancolique et trop sujet à l’introspection.

– Je peux te retourner la question. La capacité de maîtriser des drones ou des systèmes mécaniques simples peut aussi être une arme redoutable dans certaines activités très en marge de la loi, continué-je avec un sourire entendu.

Plus je réfléchis à son don, plus j’imagine des possibilités nombreuses et variées. Je hausse les épaules de manière désinvolte pour lui faire comprendre que ce n’est certainement pas moi qui le pointerais du doigt. Comme il le dit, il est difficile de résister à une utilisation purement personnelle et égoïste. J’ai tué de cette manière, car je ne suis pas un soldat et que contre un officier allemand sur entraîné, je n’avais aucune chance avec mes moyens de simple humain. Je sais avoir prolongé la vie de Max de quelques mois, puisque j’ai retrouvé la date de sa disparition quand j’ai cherché à retrouver sa tombe. J’avais espéré qu’il survive au conflit de la deuxième guerre mondiale, qu’il trouve une épouse et fonde une famille…

Avancer vers l’avenir… cela commençait-il par m’accepter moi-même ? Moi et cette foutue mutation ? Je regarde Yitzhak, a-t-il la recette miracle pour ça?

– Ce n’est pas simple, dis-je dans un soupire.



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Message  Yitzhak Anavim Mer 1 Juil 2015 - 16:55

Le petit avantage à avoir une famille à moitié juive, c'est que, même si on se laisse aller à évoquer des problèmes personnels, le gouffre culturel fait que la plupart des gens préféreront s'abstenir d'avoir une opinion. On ne sait jamais, ça pourrait entraîner sur une pente glissante. Il y en a qui essayent toujours, bien sûr, pour leur seul plaisir de vous balancer gratuitement leurs convictions politiques à la figure, mais ça ne m'intéresse pas. Mes parents ou mon grand-père n'ont aucune raison d'amener avec eux de grands et stériles débats sur le dernier conflit israelo-turquo-palestinien du moment ou sur les manipulations des médias. Je ne me suis pas gêné avec Nathaniel parce qu'il ne ressemble pas à ce genre de personne toujours convaincu d'avoir des avis essentiels sur tout. Il comprend vite que ma confidence n'est qu'une précision en passant qui ne mérite pas d'être développée. Moi, par contre, j'ai des choses à creuser et moins de scrupules à lui tirer le plus d'informations possibles concernant sa position vis-à-vis de sa mutation. Je devine beaucoup trop de vérités cachées à travers ses propos pour ne pas mourir d'envie de le travailler un peu. Puis, même si c'est plus risqué, si je dois lui révéler des choses à mon sujet pour l'inciter à poursuivre, je préfère aussi que ça concerne mon pouvoir. Là, les informations sont nettes, techniques, ça n'implique pas de sentiments vraiment douloureux si j'arrive à contourner toute la partie vécu. Pas de ressentiment, rien, juste des faits à livrer. Le changement de langue permet au traducteur de se sentir un peu plus libre avec moi. Il a quelque chose sur le cœur. Je saurais pas trop vous dire quoi mais ça se sent, à sa manière de regarder un peu dans le vide, de chercher ses mots, et de me fixer de temps à autre comme si j'étais sur le point de lui révéler une vérité incroyable. D'ailleurs, quand je suggère que ses capacités avaient de quoi pousser au crime ou attirer des personnes peu recommandables, il ne cherche pas à me dissimuler son malaise. Son visage se crispe. Mon sourire reste intérieur. Je suis heureux d'avoir pointé du doigt un élément intéressant et, en même temps, je sais que les coulisses sont probablement très graves.

Pour une fois, je vais éviter de me lancer des fleurs. Toute mutation qui augmente le seuil des possibles a été mal employée un jour, ne serait-ce que pour tester ses limites morales à l'adolescence. Alors oui, je ne crois pas que le pouvoir de téléporter des choses puisse ne pas être sollicité pour vérifier s'il est vraiment possible de retirer impunément un objet d'une vitrine. Et, même si le mutant était réellement la personne la plus honnête au monde, un accident est toujours très vite arrivé quand on découvre son gène x. Combien de familles ont été détruites à cause de l'apparition d'une force indomptable pour un petit bout de douze ou treize ans ? Je ne compte plus les histoires assez sinistres qu'on a pu me rapporter à la Confrérie. De ce côté, j'ai été plutôt chanceux, épargné avant d'aller mettre moi-même le nez dans les vrais problèmes. Quand il s'exprime, Nathaniel a l'air assez blasé. Il m'avoue qu'effectivement, il n'a pas été une très bonne chose pour lui de faire connaître sa mutation. Je ne vois quand même pas trop pourquoi il estime que voler est presque le seul truc intéressant qu'il peut faire. Drôle de façon de voir les choses. Enfin oui, moi je vois de suite les choses comme ça, mais je ne suis pas une personne très honnête. Mais sérieusement, pouvoir téléporter des trucs, même pour en faire un pur usage quotidien, c'est super cool !

– Hey, c'est pas parce que des cons ont voulu se servir de toi que ta mutation ne peut pas être intéressante pour un tas de choses utiles. Pouvoir rester dans son canap' avec tout à sa portée, déjà, c'est le rêve de tout américain moyen. Puis le jour où tu pourras sauver quelqu'un ou te sauver toi-même en téléportant une arme ou un truc dangereux, tu seras bien content d'avoir ce gène !

Je fais de mon mieux pour être encourageant. C'est pas parce que je suis un mauvais exemple que je ne peux pas croire non plus possible de faire de belles choses avec sa mutation, tous les super-héros de l'histoire l'ont prouvé. Et puis je suis passé maître dans l'encouragement des mutants en dépression, enfin, je crois. Quand il me fait remarquer en retour que ma capacité à créer des outils technologiques même « simples » peut causer de graves dégâts, je pourrais lui sortir mon discours habituel, déjà calibré pour me la jouer bon mutant. J'hésite un peu. Mais ça ne me semblerait pas pertinent dans cette situation. Nathaniel a une partie d'ombre, il ne sera pas disposé à se rapprocher de moi si je garde une image de bon samaritain. Cela voudrait dire que, dans le fond, une partie de moi réprimerait sa faiblesse à avoir accompli les actes condamnables qu'il m'a soufflé. En plus, il me tend une perche idéale pour l'amener là où je veux, c'est à dire lui faire comprendre que je suis bien plus qu'un étudiant qui se désole de la bêtise ambiante d'une convention trop populaire pour son intelligence. Il m'en a révélé assez pour que je puisse déterrer des informations compromettantes sur lui avec quelques recherches orientées. Je peux bien lui rendre la pareille, et le sourire que je lui rends est assez éloquent. Juste en coin, plus vraiment sympathique ni complètement innocent, de quoi lui signifier qu'il commence à me cerner.

– Rien n'est simple, même pour une personne qui ne possède pas de pouvoir surhumain particulier. Nous avons peut-être des capacités plus grandes que la moyenne mais tout est assez souvent une question de choix, non de circonstances, ce serait trop facile. Je peux devenir redoutable, oui. Au début, j'ai surtout utilisé mon pouvoir pour m'amuser, puis j'ai voulu le mettre au service de personnes qui me semblaient mener un combat juste. Elles ont profité de ma naïveté d'adolescent. J'aurais pu finir en armes humaine, le cerveau grillé, comme trop d'entre nous si je n'avais pas réussi à me sauver à temps. Depuis, je ne m'en remets plus à personne. Je ne jugerai pas ce que tu as pu faire, j'ai contourné des lois aussi, pas forcément avec ma mutation d'ailleurs, j'en ai pas besoin derrière un ordinateur. Mais j'ai du mal à me tourner les pouces quand je vois des comportements dangereux que je pourrais arrêter.

Même si je doute que le bourdonnement général et l'hébreu puisse permettre à quelqu'un de saisir notre conversation, j'ai baissé d'un ton. Je n'irais pas jusqu'à murmurer parce que je ne suis pas un adepte du « on est jamais trop prudent ». Rien de pire qu'une personne qui a l'air de faire une confidence pour forcer tout le monde à dresser soudain les oreilles. Je reste le moins précis possible ceci dit. Il y a beaucoup de choses que je ne suis pas prêt à dévoiler et certainement pas dans un espace ouvert, surtout concernant la manière dont on a voulu m'utiliser. Je n'évoque pas souvent cette période de ma vie, c'est encore plus risqué que de dire que j'ai volé des données, ou même assassiné des gens. Faut pas toucher au secret militaire... J'attends de voir comment mon traducteur va recevoir ce genre d'aveu et de quelle manière il choisira de les interpréter. Pour l'instant, rien de méchant je crois. Je peux passer pour un justicier solitaire, ce qui reste positif tant qu'on a pas une idée claire des méthodes que je suis prêt à employer pour calmer les indésirables.


Dernière édition par Yitzhak Anavim le Lun 10 Aoû 2015 - 14:27, édité 1 fois
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