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Des deux côtés de la ligne jaune

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Message  Ivy P. Isley Sam 5 Jan 2019 - 17:13


Le sourire de Nikolaï me surprend et, quelque part, me rassure. Non content d’être l’expression la plus marquée que son visage ait portée jusqu’ici, j’ai l’impression que c’est la plus sincère. J’ai cessé le jeu, j’ai ôté les masques, durant la mise au monde. Il en a fait de même. Son pouffement est également une étrangeté appréciée, une surprise d’un agréable différent de celui de notre bras-de-fer verbal mais tout aussi puissant ; si ce n’est plus. Cependant, alors que je revêtis mes masques, pour taire les bruits de hantise, le jeune homme s’assombrit. Il n’est pas froid cependant. Il est résolu. D’un sérieux similaire et pourtant différent, je ne parviens pas à lire ou à comprendre ce qui se trame réellement dans sa tête, ou dans son cœur. L’ai-je ému ? L’ai-je réellement touché avec mon don qu’il n’y voit plus un engagement utilitaire ? Les questions apportent des problèmes et je ne les poserais pas. D’autant qu’il reprend la parole.

Je le vois honoré de la confiance que je lui offre, est-ce réellement là le fin mot de l’histoire ? Le sourire au compliment qui s’en suit nous concernant ne me détourne pas de cette interrogation, quand bien même je suis en accord avec le propos et qu’il est toujours appréciable de se faire complimenter. La polysémie du terme "parrain" a été bien entendue et mon sourire se fait d’un amusement satisfait lorsqu’elle est employée par Nikolaï mais l’assurance de protection familiale me renvoie à mes doutes : mes chéries, vous ne serez "que deux nouvelles additions à la famille", cela arrive à être à la fois réducteur et mélioratif. Réducteur par la formulation, négative, et mélioratif par le fait que vous soyez traitées à égal des humains. Nombre de gens feignent cette habitude lorsqu’ils me parlent, entrant dans mon jeu d’une manière à me brosser dans le sens du poil, sans réellement le penser cependant. Nikolaï, lui, me met le doute. Il serait fort malvenu de sa part de changer les règles qu’il applique à ses hommes pour vous, en effet, et le sourire ambivalent qui ponctue cette déclaration me convainc que, lui aussi, ne parle de mes enfants ainsi que parce que je suis là. Je ne l’en blâme pas, pour ne pas dire que je l’en remercie ; j’ai juste, durant quelques instants, cru qu’il comprenait ce que je ressentais. Moins une erreur pour moi qu’une réussite pour lui, dont le jeu est bien plus convainquant que ce qu’il laisse penser au premier abord.

Mon sourire reste finement présent dans une expression similaire à la sienne alors que Nikolaï vient vous examiner, s’approchant de moi plus qu’il ne l’a fait jusqu’ici. Après l’hameçonnage par la curiosité et l’ancrage par l’humour, la familiarité par le cadeau : ses défenses sont baissées. J’en suis là où je voulais et me surprend que vous n’en soyez pas là où lui le veut lorsqu’il indique à ses hommes de trouver un endroit moins intégré à la décoration de son appartement mais plus profitable à votre santé. Une attention appréciée qui change légèrement mon expression. Le jeune homme déclare fonctionner au donnant-donnant, chose que je comprends comme similaire à mon gagnant-gagnant et sans doute lié à l’éducation dans des milieux interconnecté au crime organisé, et mon sourire se fait d’autant plus assuré qu’il me donne l’occasion de montrer ce que j’ai avancé. Prête pour ton premier fruit, Anna ?

Sous mon regard, les cinq pétales de l’une de tes fleurs deviennent roses et une quinzaine d’étamines poussent autour de son style. Prunus persica, le pêcher commun, tu n’en verras pas souvent ma chérie : c’est une espèce autogame. Bravo, tu es un garçon manqué. Ou une transsexuelle. Qu’importe, je t’aime quand même. Et tu pourras lui produire une pêche avec une régularité allant du quotidien à l’annuel fonction de la nutrition qu’il te donnera, sans qu’il ait à te repolliniser. Je ne sais pas s’il est malin ou chanceux dans cette histoire. Ce que je sais, c’est qu’il continue de parler alors que je m’approche de toi ; heureusement, je suis capable de faire deux choses en même temps. Je ne sais pas s’il est malin ou chanceux dans cette histoire. Ce que je sais, c’est que j’ai réussi.

Nikolaï fait "preuve d’initiative à son tour", me dévoilant son plan pour s’implanter en Indonésie. Il m’invite à me sentir "libre d’y apporter des critiques constructives" car son plan est "tout nouveau-né lui aussi et personne ne naît parfait" ; sauf vous mes chéries, évidemment. Anna, ta fleur se change en fruit charnu à vue d’œil et, désormais que tu es "grande" – même si tu ne l’es pas beaucoup, je sais –, je n’aurais pas à me baisser pour le cueillir. Je me vois déjà passer ma main droite sous celui-ci. Je me vois déjà tendre ma main gauche, couverte des lianes allergènes qui ne sont pas dangereuses pour toi, et pincer du pouce et de l’index la jonction entre ta tige et ton fruit pour t’ôter ce dernier sans abîmer la première. Une cueillette douce et indolore, après laquelle tu pourras reproduire la fleur un peu avant le lever du soleil demain matin et le fruit pour le petit déjeuner même s’il pourra être conservé normalement après sa cueillette ; surtout considérant que celui-ci est climactérique. Je me vois déjà revenir vers ton parrain, désormais aussi mur que le fruit que je lui tendrais. Je nous vois déjà tous les deux face à face à échanger un fruit en guise de toast pour officialiser notre coopération.

« En bon businessman personne ne pourra donc me reprocher de m’intéresser de plus près à une possible reconversion dans les énergies renouvelables. Sans compter que le green washing est très à la mode ces temps-ci.

- Justement, on pourra vous reprocher de vouloir vous donner une image éco-responsable sans réellement agir, dis-je à Nikolaï sans détourner les yeux du premier fruit de ma grande fille. Evidemment, les gens qui feront cela considéreront leurs reproches comme une action écologique et l’on sera dans l’habituelle ironie humaine… Pour les autres, je pense que votre justification est suffisante. Elle sera toujours plus probable que votre association avec moi, même pour ceux qui savent que vous êtes parrain. »

Mon sourire vacille. Il y a tant de symbolique dans le geste que j’imagine que cela mériterait d’être aussi savouré que la victoire que c’est. Je n’y arrive pas. Tout est là où je voulais que ça soit, pourtant. Peut-être est-ce la familiarité avec le milieu du crime organisé inhérente au fait d’avoir grandi à Gotham, peut-être est-ce le jeu de dupe auquel nous avons tous les deux participés, peut-être est-ce la sincérité du moment de votre naissance, mes chéries… toujours est-il que j’ai réussi. J’ai réussi sans même y penser réellement. J’ai réussi l’hameçonnage par la curiosité. J’ai réussi l’ancrage par l’humour. J’ai réussi la familiarité par le cadeau. J’ai réussi à faire s’assoir mon interlocuteur pour qu’il accepte la négociation. J’ai réussi à faire se relever mon interlocuteur pour qu’il ne reste pas figé sur ses idées. J’ai réussi à faire que mon interlocuteur se sente suffisamment en confiance pour qu’il s’approche de moi par lui-même. Pour qu’il accepte de manger un fruit que j’ai fabriqué ; quand bien même le fait de proposer à tous, Nikolaï et ses hommes, comme de laisser choisir ledit fruit lui donnait l’impression de contrôler la situation ; qu’elle était sans danger.  L’est-elle vraiment ? Les questions apportent des problèmes… il n’y a aucune raison pour que les problèmes soient toujours pour moi. Les fleurs accrochées dans l’entrée de son appartement ont émis du pollen contenant ma phéromone de contrôle à l’arrivée de son équipe d’intervention et pourtant Nikolaï est prêt à manger un fruit que j’ai fabriqué.

« Pour être constructive avec votre plan, je pense qu’il faut axer votre recherche "d’énergies renouvelables" sur l’aspect renouvelable, continus-je, malmenée par mes pensées dans laquelle s’immisce l’horreur de la considération du bois comme une énergie alors que son abatage n’est pas différent de celui pratiqué sur les animaux et n’est pas toléré lorsqu’il l’est sur des humains. Vous gagneriez à partir sur un projet de sylviculture. Exploiter la forêt oui, cependant avec les "nouvelles méthodes" ironiquement anciennes : moins de rendement certes mais un vrai résulta écologique et plus de main d’œuvre impliquée. Je peux développer ce sujet, tout autant que ceux qui vous seront rentables immédiatement ; vos "besoins". »

Même s’il se trouve dans mon dos, Nikolaï doit sentir le changement de ton de ma voix ; parfaitement sérieux à son tour et dissimulant une pointe de lassitude. Oui, tel que prévu dans mon plan avant de venir ici, la pêche contiendra de mes phéromones de contrôle. Je n’ai même pas eu à me focaliser sur cet objectif pour en arriver là, je me suis contentée de jouer et de laisser mon naturel faire. Je me suis assumée comme je suis et… et quelque chose me bloque. Quelque chose de différent de l’ordinaire : j’ai peur que Nikolaï me trahisse, oui. Tout comme j’ai peur qu’Exodus ne le fasse. Tout comme j’ai peur que les Luchadores ne le fassent. Tout comme j’avais peur que le Genosha ne le fasse. Tout comme j’avais peur que Sebek ne le fasse. Tout comme j’avais peur que les Last Sons ne le fassent. Tout comme j’avais peur que Diana et le Wakanda ne le fassent. Pour la plupart, j’ai pris des garanties. Diana savait que je devais repartir du Wakanda libre si elle voulait revoir son lasso magique, que j’avais dissimulé dans la Forêt Primaire du Congo suite à sa défaite. Sebek a accepté un baiser, me permettant de le sensibiliser afin que je sois assurée qu’il ne me trahirait pas une fois que je souhaiterai le quitter. Le Genosha m’a laissé travailler à distance dans un premier temps et avait plus d’intérêt à me laisser repartir qu’à m’emprisonner. Les Luchadores doivent se douter que si je ne vais pas les voir eux j’irais voir la concurrence. Enfin, les Last Sons n’ont pas laisser s’installer de relation qu’ils auraient pu trahir en me plaçant en quartier d’isolement et j’ai bien intégré que mes chances de faire quoi que ce soit à Exodus sont nulles. Cependant, que je m’assure de la fiabilité de Nikolaï d’une manière analogue à celle de Sebek, et d’un petit nombre d’anciens collègues de Gotham qui n’ont pas toujours accepté de bonne grâce ce fait… cela me pose plus de problème qu’alors. Et oui les filles, c’est pour ça que vous serez mieux ici qu’avec Maman : elle se sabote souvent toute seule.

« En effet, si l’on n’en a pour l’heure pas parlé, c’est bien le fait de pouvoir profiter de mes compétences particulières qui vous a fait convaincu de notre coopération. Reste à discuter des emplois que vous en ferez. Avec mes connaissances en botanique et mes capacités phytokinétiques, je peux vous assurer des rendements et amélioration au niveau des cultures ; je pense particulièrement à la récolte du latex du pavot somnifère, aussi appelé opium, dont une simple méthode quoique médicale permettrait des améliorations notables. Dans un même ordre d’idée, avec un doctorat en biochimie et une capacité à synthétiser n’importe quelle toxine avec lequel mon organisme ait été en contact, je peux développer et cuisiner des drogues d’une grande qualité, comme la méthamphétamine. Je pourrais aussi vous faire un sérum qui augmente la résistance aux toxines ainsi que la force et l’agilité, possiblement utile à vos gardes du corps voire vous-mêmes. Evidemment, s’il m’est possible de faire quelque chose de légal, cela m’arrangerait ; mais je n’ai aucun souci à faire de l’illégal sous réserve qu’il n’y ait aucun mort. »

Vous voulez un exemple d’auto-sabotage ? Eviter le conflit quand on a la possibilité de produire des toxines et des armes biochimiques ; contre lesquels la plupart des super-héros ne pourraient rien. Que voulez-vous mes chéries, je suis comme ça. Je dirais bien que je préfère l’intelligence à la violence mais j’ai parfois l’impression d’être si conne… on dira donc que je préfère la manipulation plutôt que la coercition. Pour certains, c’est un problème. Pour d’autres, mon vrai problème se situe au niveau de la confiance. Je n’y arrive plus avec les humains. Je préfère les relations qui se font sans elle, où l’on s’assure que l’autre ne nous trahira pas ; que ce soit parce qu’il aurait à y perdre ou parce qu’il ne peut tout simplement pas ne m’importe pas, tant que je suis assurée qu’il ne le fera pas. L’idée qu’il n’ait aucune raison de le faire ne me suffit pas ; ne me suffit plus. Plus depuis Jason. Il m’aimait. Il m’a torturée à mort. Il disait vouloir se faire pardonner. Il a infligé le même sort à mes orphelins. Personne n’a été aussi proche de moi que lui. Personne ne me fera du mal comme il m’en a fait. Personne n’aura l’occasion ni de l’un ni de l’autre. "L’une des raisons pourquoi tu ne vois pas comment tes plans s’échouent par toi-même, c’est que tu évites les choses qui peuvent te blesser comme les choses qui peuvent te remettre en doute" m’a dit Diana. Je le vois à présent. Tout comme je vois ton fruit, Anna.

« Finalement, je n’ai peut-être pas si bien fait mes devoirs que cela : je ne connais pas vraiment vos produits. Ne le prenez pas mal, votre réputation m’a suffi. Le "Renard moscovite", un lieutenant mafieux influençant les deux côtés du Pacifique et de l’Atlantique. "Nikolaï Mikhaïlovitch Kolyakov", magnat du gaz dirigeant la filiale américaine d’une entreprise familiale tenue par son frère ainé en Russie et propriétaire de casino pour son compte personnel. Ça ne parle pas de votre sourire, cependant. Ou de votre appréciation des pêches ; la vôtre est bientôt prête, d’ailleurs. »

Ton premier fruit, bravo ma chérie ! Je n’ai jamais vue de pêche à la peau aussi veloutée ou à la couleur si bien lavée de rose-carmin. Elle est magnifique. Je n’ai pas à me baisser pour la cueillir. Je passe ma main droite dessous et tends ma gauche, couverte des lianes allergènes qui ne sont pas dangereuses pour toi, pour pincer du pouce et de l’index la jonction entre ta tige et ton fruit ; comme je l’ai vu. Je ne t’ôte cependant pas ce dernier sans abîmer la première. Si je le fais, je ne pourrais plus user de ton système vasculaire pour contrôler la dose de phéromones dans ton fruit. Si je le fais, je ne pourrais plus revenir en arrière. Mon sourire revient, fin et amère. C’est ce sourire, ce sourire qui m’a surprise, ce sourire qui m’a rassuré. Ce sourire qui a été l’expression la plus marquée du visage de Nikolaï et possiblement la plus sincère aussi. J’ai cessé le jeu, j’ai ôté les masques, durant votre mise au monde. Il en a fait de même. Il en a fait de même au point que je ne sache plus quand il a repris le jeu, quand il a remis les masques. Je sais pourquoi j’ai douté, à présent. Oui, je l’ai ému. Peut-être même plus, peut-être m’a-t-il comprise. Dans mon sentiment envers vous, mes filles. Peut-être était-ce ce qu’il me fallait, afin d’avoir le déclic ; afin d’hésiter quand au fait que quelqu’un puisse me faire du mal ne soit pas une mauvaise chose. Et oui ma chérie, elle est comme ça ta Maman : elle se met toujours dans les pires situations. Car je n’imagine pas de pire moment pour me trouver à hésiter sur le fait que je sois prête à ressayer de faire confiance ou non. Si je tarde trop, tout est perdu. Si je ne le fais pas, j’ai une chance sur deux de faire le mauvais choix. Et, bien évidemment, je n’ai pas la moindre idée duquel est-ce.
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Message  Nikolaï M. Kolyakov Lun 25 Fév 2019 - 15:19

L’avis des bienpensants m’est bien égal. Qu’ils se scandalisent à peu de frais si cela leur chante, je ne changerai pas de stratégie pour autant. Au contraire, il est bien souvent fort utile de tromper son monde en passant pour plus bête ou cupide que l’on n’est vraiment. Il n’est en effet rien de plus dangereux qu’un adversaire que vous avez sous-estimé. Raison pour laquelle je mets un point d’honneur à peaufiner ma réputation de dandy sans réelles capacités offensives. Certes mon intelligence n’est plus à prouver – surnom oblige – mais la ruse n’est que peu estimée dans le monde de brutes qui est le mien. Plus d’un parmi mes semblables croit que l’usage de pouvoirs surpuissants le dédouane d’avoir deux doigts de jugeotte et ce alors que j’ai jusqu’à ce jour prouvé le contraire à chaque confrontation. Qu’ils continuent néanmoins à tomber dans le piège, cela m’est très profitable.

De même que le business que me propose ma future partenaire, j’ai nommé la sylviculture traditionnelle. Ses rendements sont peut-être incapables de rivaliser avec la déforestation industrielle mais son économie est respectueuse de l’environnement et créatrice d’emploi local. Bref, du développement durable dans toute sa splendeur : économie viable, société développée et nature protégée. Et le tout en m’offrant une image de défenseur de la veuve et de l’opprimé. Que demander de plus ? Ce n’est certes pas mon domaine de prédilection mais si je tiens à renforcer mon image inoffensive, voire à me créer une image d’homme d’affaires prompt à se racheter une conscience écologique, la situation pourrait difficilement être plus favorable.

Rien cependant qui n’égale la suite des propos d’Ivy. Le lourd sous-entendu concernant la possibilité de mettre ses capacités à mon service me ramène donc dans ses pensées – que j’avais délaissées un moment pour me concentrer sur ses paroles – et je dois faire un effort conscient pour retenir un mouvement de recul en découvrant qu’elle compte déposer des phéromones de contrôle sur la pêche qu’elle s’apprête à m’offrir. C’est donc le peu de cas qu’elle fait de la confiance réciproque ? Je comprends le besoin de certitudes – je serais un hypocrite de premier ordre si je ne le faisais pas – mais de là à retirer toute capacité de décision à son partenaire… je me sens soudain bien refroidi à l’idée de m’allier à elle. Et ce bien qu’elle semble hésiter de son côté à user de ses dons.

En d’autres circonstances, je me gargariserai d’avoir réussi à lui faire suffisamment baisser sa garde pour qu’elle hésite à m’empoisonner pour faire de moi une marionnette de plus. Mais la situation est bien trop grave pour que je m’arrête à des considérations d’ego futiles et déplacées. Il en va non seulement de notre potentielle future alliance mais tout bonnement de mon intégrité physique et mentale. Car je ne sais qui est ce Sobek qui ne cesse de revenir dans ses pensées mais il est hors de question que je suive son exemple à acceptant de me plier à ses règles. C’est elle qui est venue à moi, pas l’inverse. Jamais donc je ne me déferai de mon libre arbitre simplement pour faire taire ses inquiétudes existentielles. Je suis par conséquent de nouveau complètement sur mes gardes, mon regard se faisant froid et calculateur alors qu’elle énonce les offres qui sont à ma disposition. Elle n’aura qu’à penser que c’est le businessman en moi qui refait surface devant la possibilité de profiter d’une aide providentielle.

La première option est banale : augmenter le rendement de drogues basiques. Rien de bien impressionnant mais je ne dis jamais non à remplir mes caisses. L’argent est le nerf de la guerre et cette dernière arrive toujours quand on l’attend le moins. La deuxième solution est bien plus alléchante, me permettant d’offrir des produits de qualité à ma clientèle habituelle. C’est après tout sur ce créneau que ma famille a prospéré : un produit de haut standing pour une clientèle de même degré. C’est néanmoins la dernière proposition qui m’attire réellement et ce sans surprise. La force physique est en effet mon point faible et, pour autant que je m’entretienne et sois létal arme de poing à la main, je ne fais pas le poids face au premier métahumain à la musculature surdéveloppée. Pourtant désormais que je la sais prête à faire de moi un pantin de plus, je suis peu enclin à me reposer personnellement sur ses capacités. Ce qui ne veut pas dire que je ne m’en servirai pas pour certains de mes hommes les plus proches. Car si mieux vaut ne pas rendre plus puissants d’autres qui pourraient vouloir se retourner contre moi à la première offre alléchante, j’ai une demi-douzaine de noms d’hommes à qui je confierai ma vie sans le moindre doute. Ne serait-ce que parce qu’ils sont au courant de mon don et savent qu’essayer de me duper est absolument inutile.  

Pour sa défense, les images horrifiantes qui défilent dans son esprit d’un homme à qui elle a tout offert et qui lui a tout repris transformerait la plus confiante des personnes en ermite asocial. Le simple fait qu’elle hésite d’ailleurs à l’idée de me faire plier à sa volonté démontrant une capacité au pardon que je n’aurai jamais. A moins qu’il ne s’agisse d’une naïveté hors du commun. Quoiqu’il en soit, elle semble être consciente de la faiblesse que cela représente et ce bien qu’elle ne sache pas que je peux lire la moindre de ses pensées comme un livre d’images. Pensées qui délaissent d’ailleurs l’autodépréciation pour s’extasier devant les qualités indéniables de la pêche de la discorde. Fruit que je vois soudain comme un point de non-retour dans cette discussion imprévisible à souhait. Soit je la laisse faire et réagis en conséquence, refusant son offrande si celle-ci s’avère à double tranchant ; soit je prends les devants, évitant ainsi à la Reine d’agoniser sur une décision qu’elle semble bien incapable de prendre et qu’elle regrette pourtant déjà.

Un instant, la partie la plus mesquine de mon esprit image de lui demander d’user de la pêche pour métaboliser le sérum qu’elle m’a promis pour voir comment elle réagira face à la possibilité de m’avoir sous son contrôle tout en m’offrant ce que je désire. Pourtant, les traces de vulnérabilité qu’elle a démontrées sans le savoir tout au long de notre échange m’en empêchent. Cela me rappelle trop la peur constante dans laquelle ma contrepartie enfantine vivait. Toujours inquiet de savoir quel geste ou parole déclencherait l’ire paternelle ou la malice fraternelle, toujours sûr que le simple fait de respirer était une déception familiale. Et ce jusqu’à l’arrivée inattendue du pouvoir dont je me suis enivré sans bien comprendre qu’il était en fait une nouvelle raison de faire dysfonctionner la cellule familiale entre ambition paternelle, crainte maternelle et dégoût et jalousie fraternels. Ces temps honnis sont désormais loin derrière moi mais pas assez pour que je me retrouve dans le rôle haï de l’abuseur. Le manipulateur aucun problème mais le bourreau jamais. Ma main vient donc se poser sur celle d’Ivy alors qu’elle hésite encore sur la marche à suivre et mon esprit se relie au sien cette fois-ci à double sens.


« Donnant-donnant vous vous souvenez ? Si vous retirez ma capacité à agir, que pourrais-je réellement vous offrir ? »

Et sachant à quel point elle déteste les questions, pour aussi rhétoriques qu’elles soient, je poursuis à voix haute.


- Il n’est que justice que je dévoile mon jeu si je veux que vous dévoiliez le vôtre. Alors voilà ce que vos devoirs vous avaient caché. Je suis télépathe. Et si je ne peux transformer vos pensées ou contrôler votre esprit comme vous sembliez disposer à le faire pour moi, je peux cependant savoir ce que vous vous apprêtez à faire à l’instant même où l’idée s’esquisse dans vos neurones. J’aurai ainsi pu faire semblant d’être sous votre influence pour mieux vous trahir ensuite, mais je crois dur comme fer qu’une alliance reposant sur une confiance réciproque plutôt que sur la certitude d’une destruction mutuelle assurée est bien plus solide. Rien n’empêche cependant quelques assurances. Vous connaissez donc désormais mon secret le mieux gardé, celui qui pourrait me coûter ma fortune s’il venait à se savoir. Vous ne pourrez donc me contrôler physiquement mais pourrez me détruire professionnellement.

Bon, là j’exagère un peu. Que mes capacités soient connues serait clairement un inconvénient majeur mais je saurai mettre cette découverte à profit pour en impressionner plus d’un. Pas la peine de m’attarder sur la question pour le moment néanmoins car cela ne change en rien que j’ai fait un pas énorme dans sa direction en m’ouvrant à elle. Voyons désormais si elle est capable de me rendre la pareille.


-Si tel est votre désir bien sûr car il me semble que vous étiez plutôt venue m’offrir un partenariat mutuellement bénéfique. Je me lance dans la sylviculture traditionnelle et vous produisez des drogues de qualité supérieure pour mes clients les plus pointilleux. Je protège hommes et plantes pour vous en échange de moyens de me protéger moi-même. Un échange gagnant-gagnant pour reprendre vos termes. Alors, qu’en pensez-vous ? Anna sera-t-elle la mère de mon premier fruit réellement frais depuis mon arrivée à New-York ou celle que j’ai accueillie en mon sein sera-t-elle l’instrument d’une trahison que vous semblez mépriser en tout point ?
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Message  Ivy P. Isley Lun 4 Mar 2019 - 11:31


L’une de mes mains soutient la pêche de sa paume, l’autre pince la tige de ses doigts. La sienne vient s’apposer à la première.

Mon sourire fin et amer se décompose alors que mes lèvres s’entrouvrent. Sa voix raisonne dans ma tête.

Ma bouche ce pince alors que mes yeux se closent. Mon cœur se presse à ses questions.

Je sais quoi répondre, je sais quoi raisonner. Les questions apportent des problèmes mais il en est une à laquelle je répondrais. A laquelle je répondrais par une autre question. Est-ce que je crois au libre-arbitre ? Quel choix ai-je ? Lors de ma spécialisation en biochimie, j’ai suivi un cours de neurologie et y ai découvert l’expérience de Benjamin Libet. Toute controversée qu’elle puisse être, elle a soulevé le fait que l’activation cérébrale précède la décision consciente de plusieurs centaines de millisecondes. Lorsque l’on fait un choix conscient, cela fait presqu’une demi-seconde que le cerveau a déjà décidé de son résultat. Contrairement à un télépathe, je n’assujetti pas la conscience avec mes phéromones, j’influence l’activité cérébrale qui la précède. Je ne retire pas la capacité à agir, je l’altère de manière à ce qu’elle obtempère à mes demandes. La conscience reste libre et peut même manifester son désaccord avec l’action qu’elle accomplit, simplement l’accompli-t-elle tout de même. Parfois elle lutte avec une désagréable d’agressivité, d’autres elle s’en accommode d’une façon créative, le cerveau détestant les contradictions : il suffit de regarder les amoureux transis qui composent vos hommes de main, leur biochimie ayant seule transformée une attirance physique en amour pour expliquer ce comportement qu’ils n’auraient qu’envers la personne de leur cœur. Que pourriez-vous m’offrir si vous étiez sensibilisés ? Exactement la même chose que si vous ne l’êtes pas. Ce que vous ne pourriez faire, en revanche, c’est me trahir. Pourquoi le feriez-vous ? Je pourrais trouver toutes les raisons du monde pour cela. Et lorsque ma propre raison arriverait à sa limite, je trouverais la chose la plus terrifiante que je puisse : le fait que je ne sache pas. Je ne sais pas pourquoi vous pourriez me trahir. Ça ne vous empêcherait pas de le faire. Plus jamais.

L’une de mes mains soutient la pêche de sa paume, son dos soutenu à son tour. Le contact est chaud, d’une chaleur différente de celle de la caresse du soleil. Le contact est doux, d’une douceur différente de celle du duvet du fruit.

Les mots s’accompagnent d’une odeur, cette fois. Une odeur qui contient plus d’informations que ma conscience ne saurait en connaitre. Une odeur qui s’adresse directement à mon cerveau, l’haleine contenant elle aussi des phéromones.

Nikolaï dévoile son jeu. Afin que je dévoile le mien… n’avez-vous pas tout découvert ? Les questions apportent des problèmes, si je n’ai plus mon propre esprit pour taire les miennes… je suis perdue. Mais c’est là un constat aussi polysémique que notre emploi du mot "parrain". Je ne peux pas transformer vos pensées non plus, ni contrôler votre esprit ; et je ne suis pas certaine que l’on puisse le faire des miens sans maitriser également la vie végétale. Je ne peux pas savoir ce que vous vous apprêtez à faire à l’instant même où l’idée s’esquisse dans vos neurones. Si c’était le cas, je n’aurais pas besoin… je n’aurais pas peur… Comme maintenant. Télépathe. Vous devez pouvoir effrayer tant de personnes avec ce simple mot. Qu’importe qu’il soit chez vous plus limité que chez d’autres. Il vous suffit à savoir quand les autres font semblants et, allié à votre capacité à faire semblant, il vous immunise à leur influence. Comme à la mienne. Télépathe. Vous devez pouvoir effrayer tant de personnes avec ce simple mot. Pourtant, moi, il me rassure. Pas parce que je peux vous croire, que cela soit sur vos limites ou sur vos croyances. Pas parce que je peux vous faire confiance. Je suis complètement folle, n’est-ce pas ? Folle de considérer que ce qui vous permet de m’atteindre et de m’acculer comme très peu d’autres choses le peuvent rend réel un sentiment, une impression, que vous avez sans doute perçu.

Mes épaules s’abaissent. J’inspire profondément.

Lutter envers vous est futile, tout comme cela l’était envers Exodus. Il y a une certaine paix en cela. Une paix renforcée par mes filles, par le parc qui se trouve sous votre fenêtre et ceux qui sont encore au-delà ; sur l’île, comme à ses alentours. Une paix renforcée par les assurances qui, à tord ou à raison, prennent une senteur de bienveillance. Vous n’êtes pas le premier à préférer m’en donner que d’être sensibilisé mais vous m’en donnez quand même. Surtout, vous ne feignez pas de me les donner pour vous protéger de mes capacités en dissimulant les vôtres. Cela ressemblerait presque à de la confiance. Non, cela ressemble à de la confiance. Vous savez mieux que personne que vous ne pouvez pas me faire confiance et pourtant vous le faites…

Mes mains se crispent sur leur prise. Mes lèvres se crispent l’une sur l’autre. Mes épaules se crispent, se serrant autant qu’elles le peuvent.
Mon cœur son crispe. Seul mon visage reste impassible, clos.

Je n’ai pas le désir de détruire, seulement… seulement je reste humaine. Je reste douée pour cela. Que je le veuille ou non. Je suis toxique, dans toutes les cellules de mon corps, dans toutes les fibres de mon être, peut-être même jusque dans mon âme. Cela expliquerait pourquoi j’ai toujours eu plus de facilité avec les gens comme vous, les gens qui ont des choses à se reprocher, plutôt qu’avec les gens irréprochables, qui ont souvent des choses à reprocher aux autres. Vous vous lancez dans la sylviculture traditionnelle et je produis des drogues de qualité supérieures pour vos clients. Vous protégez hommes et plantes pour moi et je vous aide à vous protéger vous-même. Gagnant-gagnant selon mes termes. Donnant-donnant selon les vôtres. C’est plus compréhensible que s’en remettre à l’altruisme. Même si, en définitive, c’est que l’inverse soit vrai qui me sécurise vraiment.

Ce que j’en pense ? Ce que j’en pense ? Ce que j’en pense… les questions apportent des problèmes.

J’inspire profondément. Je tremble un instant.

« Anna sera-t-elle la mère de votre premier fruit réellement frais depuis votre arrivée à New York ou celle que vous avez accueillie en votre sein sera-t-elle l’instrument d’une trahison que je redoute en tout point… »

Tout comme mes lèvres, mes yeux s’ouvrent. Mes doigts aussi. Mes mains se retirent, délaissant le contact du fruit. Celle couverte de mon sumac vénéneux revient contre ma gorge, doigts repliés et avant-bras contre mon torse. Celle nue hésite à quitter le second contact qui la soutient. Ce contact qui a risqué l’empoisonnement pour la toucher. Elle glisse sur lui, son dos puis celui de ses phalanges contre la paume puis le poignet qu’elles quittent ensuite.

« Vous savez que j’ai déjà pris ma décision… »

Vous l’avez su au même moment que ma conscience, une demi-seconde après que mon cerveau l’ait enclenché. Vous l’avez su peut-être même avant, considérant l’orientation de vos questions. Les questions apportent des problèmes…

C’est au tour de ma main de se placer sous celle de Nikolaï, paume contre dos, puis de la soutenir jusqu’au contact de la peau veloutée. D’une poussée, légère mais décidée, mes doigts conduisent les siens pour raffermir la prise puis ceux torsadés de poison s’en reviennent immobiliser la tige afin d’éviter de la casser, de te blesser ma chérie.

Seras-tu la mère du premier fruit réellement frais de ton parrain depuis son arrivée à New York ou, alors qu’il t’a accueillie, seras-tu l’instrument d’une trahison ? Me concernant, Diana témoignerait en ma défaveur puisqu’elle a perçu mon départ du Wakanda et mon interpellation par les Last Sons comme une trahison envers elle. Heureusement, te concernant, Anna, tu ne partiras jamais d’ici. Tu ne veux trahir et ne trahira pas, volontairement ou non. On va apprendre votre parrain à ramasser les fruits correctement, mes chéries. Comme au temps de vos grandes sœurs et de mes orphelins. Comme au temps où il y avait encore des humains pour avoir de l’importance dans mon cœur… une importance cultivée à s’occuper de la nature ensemble.

Ma bouche se plissent en un sourire doux et vacillant ; face au présent, face au passé, face au futur.

Mon cœur se gonfle avec une tendresse émue ; face à ce qui se passe ici, c’est passé et pourrait se passer.

La main de Nikolaï enserre la pêche, l’une des miennes au-dessous. En contact.

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