Anti-terrorisme ésothérique

Je ne suis pas professionnelle, je le sais et il est nombre de gens pour l’avoir perçu depuis 1994. Je ne suis pas professionnelle et je ne suis pas réellement une enquêtrice car, si ma perception des énergies magiques comme mes connaissances occultes et mon intelligence naturelle sont utiles en investigation, ma partie principale reste l’élimination. Je suis plus une limier qu’autre chose, au sein du BPRD, et mon organisation a le bon sens de juger plus aux résultats qu’aux chiffres. Mes missions sont plus de la recherche et destruction que de l’appréhension de coupables et mes « interrogatoires » vont dans ce sens.

L’agacement fait plaisir à voir mais mon contentement passe au second plan puisque c’est ta réponse qui m’intéresse en premier lieu. L’aspect cobaye m’indiffère au plus au point et, si cela peut te rassurer Adrian, tu n’es pas intéressant : ce qu’il y a de l’autre côté de ton cerveau si. Il est vrai que je ne me suis pas méfiée de toi dès que nous nous sommes rencontrés mais, il faut me comprendre, je ne suis pas paranoïaque à ton instar. Cela étant, j’aurai détectée l’émanation lorsqu’elle se serait activée et crois avec une certaine sérénité que la situation serait globalement la même ; peut-être aurais-je été plus polie sur la demande quand a Néxus Dimensionnel au sein de ton crâne mais ça ne change pas grand-chose. Et ce qui t’aide ne cherche pas plus les ennuis que l’Hydra, c’est notre job que de leur en apporter si nécessaire. Et visiblement, « Ça » en est conscient puisque « Ça » a fuit.


Ma question est purement rhétorique, ne t’en fait pas. Je démontre un point et il me fait assez plaisir de savoir que celui-ci me porte en position de force. Si « Ça » n’avait rien eue à craindre de moi, « Ça » n’aurait pas réagit à ma présence. Il faut croire que ma véritable nature effraye et  cela implique soit une faiblesse de la part de l’entité adverse soit une crainte des créatures démoniaques ; ce qui peut la placer du « bon côté » même si, en définitive, tout est une question de point de vue.

Ma théorie se construit à chaque étape de ce que tu me dévoiles, volontairement ou non, Adrian ; tant que tu ne me mens pas et ne te trompe pas, elle devrait se tenir. Je n’exclue cependant pas la possibilité de l’erreur et c’est bien pour cela que tu auras surement le droit à un petit entretient avec le mage que tu as rencontré tout à l’heure mais je suis actuellement seule présente alors je le fais à ma manière. Quand à la dangerosité ou l’hostilité et le fait que tout ait été bénéfique, cela me fait sourire d’ironie. Adrian, mon cher Adrian, oublies-tu à qui tu t’adresses ? A quoi tu t’adresses ?

Te frapper est tentant, si tu savais à quel point, mais je m’en abstiendrais car je m’en voudrais d’entacher la réputation du BPRD pour mon plaisir personnel. Si cela avait été utile, je l’aurai fait, mais je n’éprouve pas le besoin de savoir si ton entité veut se confronter aux miennes ou encore si la formation du SHIELD permet de contrer un reliquat demi-millénaire du monde des Assassins. Partant du principe que ton entité c’est vraiment retirée, tu es seul face à moi.


J’ai l’impression qu’il s’agit d’une différence entre le SHIELD et le BPRD : le SHIELD ne cherche pas à comprendre, il fait son travail sans se préoccuper des conséquences tant que le travail est fait. Le BPRD veut faire le travail mais veut également être assuré que sa manière de leur faire et les moyens mis en œuvre ne nuiront pas plus que ce qu’ils ont empêché. Ce n’est pas pour rien que la Justice League n’a jamais fait confiance au SHIELD alors qu’elle a plus d’une fois collaborée avec le BPRD.

Je pousse un soupire avant de pencher ma tête sur le côté tout en te regardant.



Je me relève nonchalamment du bureau qui t’es prêté afin de te surplomber de biais de toute ma taille et de poursuive avec un sourire narquois.


Je sais pertinemment que je tourne ça de manière hautaine mais cela rentre autant dans mon attitude que cela sert mon propos. Je serais plus apte à détruire l’entité qui t’utilise, Adrian, qu’à réellement comprendre sa nature et ses motivations même si je suis, en la matière, supérieure à tout ce que le SHIELD a pu faire. Néanmoins je fais pleinement confiance à mon supérieur pour avoir les connaissances nécessaires à cette analyse, la seule contrainte étant le temps.

Je te tends la main, Adrian, avant de conclure sans rien perdre de mon air.

Adrian, Adrian, Adrian… si ce truc ne cherchait rien à part vivre, il ne t’aiderait pas. Il vivrait dans sa dimension tranquillement sans se mêler d’affaires qui ne le concernent pas. Si ça intervient ici, c’est que ça a un objectif concernant cette réalité. Et cela fait parti de ce qu’on doit découvrir avant de le considérer comme bénin ou non. Mais pour ça il faut l’étudier, idéalement communiquer même si les risques de mensonges sont forts présents.  Cette créature est liée à ton esprit et est capable de manipuler ton corps pour te défendre, Adrian, ainsi si je comprends ta volonté de soumission envers elle je n’ai pas l’intention qu’elle soit un danger pour les membres du BPRD présent dans cette base. Que tu te foutes complètement d’être un danger pour tes collègues voir des inconnus m’indiffère mais que tu sois incapable d’accepter que, malgré ce que je leur fais subir, je me concerne pour les miens relève de l’inconscience. Tu es un bon agent du SHIELD, à n’en pas douter ; incapable de laisser les autres faire leur travail et incapable de voir au-delà des apparences.

J’agis en fonction du pire scénario parce qu’espérer le meilleur ne rime à rien ; au mieux aurais-je l’agréable surprise de m’être préparée pour rien, au pire serais-je dans mes prévisions et ainsi prête à agir. Il est étonnant que le SHIELD réussisse à entreprendre quoi que ce soit en partant du principe que les choses sont au mieux. Mais bon, sans doute considérez-vous cela comme preuve de votre efficacité : les choses sont au mieux parce que vous êtes vous, des héros qui sauvez des gens et des faire-valoir pour des super-héros qui sauvent le monde. J’ai déjà dit que nous ne percevions pas la même réalité, j’aurai cependant escompté que tu sois capable d’appréhender la mienne Adrian. Manifestement, tu ne l’es pas.

J’écoute ta fausse acceptation du marché que je t’ai proposé et contemple un égo au moins équivalent au mien en ramenant ma main contre ma hanche. Autant je puis parfaitement convenir qu’il ne faille pas te sortir de ta zone de confort et de demander de faire preuve d’endurance face à des choses que tu as toi-même avoué être incapable de comprendre, autant changer la close de contrat pour qu’il n’arrange que toi et ne te coûte au final rien est une grossière tentative de m’arnaquer.


Jusqu’à preuve du contraire, la seule différence entre ce que tu as dans la tête et l’arme-démon c’est qu’on sait qu’il faut activer celle-ci alors qu’on ignore tout de toi et que tu ne veux pas nous laisser t’étudier afin de fournir la preuve suscitée. Pourtant, l’occasion est bien présente si l’on prend en considération ce qui se passe autour de nous. J’ai déjà faite la demande, à notre arrivée, à un officier du BPRD de faire des recherches sur les principaux Néxus dimensionnels présents dans le Maryland et de croiser ces informations avec les entreprises pouvant servir de couverture à l’AIM ou les bases potentiellement contrôlée par l’Hydra ; ces recoupements faits, il ne restera probablement plus qu’une ou deux possibilités et les éléments apportés par le SHIELD, comme la présence du véhicule dont il a récoltées les traces, devraient être suffisants à ce que tu trouves la localisation de la base que l’on devra détruire. Parallèlement, mon supérieur c’est déjà avéré étudier la Goétie afin de pouvoir apporter une nouvelle expertise sur la mienne une fois l’arme-démon sécurisée, ce qui permettra de confirmer ou d’infirmer mes propres analyses faites au sein du SHIELD. Cette enquête commune se déroule déjà, ce n’est qu’une question d’attendre les résultats afin de se coordonner et de se préparer à l’intervention. Te rends-tu compte, Adrian, que le seul paramètre hasardeux ici c’est toi ?


Je suis parfaitement calme quand je dis cela et le ponctue même d’un clin d’œil car je suis sincère dans ma parole. Cela n’est en rien contre toi ou pour mon plaisir, cela est simplement une preuve de ma responsabilité. Si je ne peux sauver tout le monde, je sauverais le plus de monde possible et tant pis si ça signifier condamner une partie. Je ne m’attends pas à ce que tu le comprennes et fais même mon possible, tant par mon attitude que le signe de connivence que je t’ai offert, pour que tu me considères comme la salope que je prétends être. Tout comme moi, tu dois avoir l’impression d’avoir fait le tour de qui je suis. Mais tu es trop penché dans ton microcosme pour le voir, tu ne fais pas confiance aux autres pour leur accorder une ouverture en-dehors des interactions de ton univers. Tu es dans ton travail, le reste ne semble pas t’importer. Une rencontre qui aurait due changée ta vie et l’a manifestement fait, des années auparavant en Alaska, n’est rien de plus qu’une utilité pour ton travail et tu ne veux pas savoir si c’est dangereux pour les autres ou même si cela ce sert de toi. Tu as l’envie de bien faire mais une étroitesse d’esprit t’empêchant de concevoir les choses de façon plus large et si cela fait de toi un bon servant pour le SHIELD, c’est réducteur et dommage. Tu pourrais valoir tellement mieux qu’un ordinateur accomplissant la tâche qu’on lui confie et ne cherchant même pas à comprendre ce qu’est ça petite vie.

Je te laisse à cela pour m’en aller m’assoir sur l’une des chaises de la table de réunion, m’appuyant sur le dossier et posant mes pieds aux chevilles croisées sur le plan de travail. De ma veste de tailleur, je sors une sucette dont j’ôte et laisse négligemment trainer le film plastique avant de la porter à mes lèvres. Ce geste a une signification bien plus grande que la simple matérialisation du fait que je ronge mon frein mais je n’en dirais rien, de l’une comme de l’autre, et attends simplement de tout le monde fasse sa partie tout en faisant la mienne : mes yeux lunaires ne te quittent pas, cher Adrian.

Le moindre mal n’était pas une notion que la Justice League portait dans son cœur ; c’est même à cela que l’on reconnait la plupart des membres dits « radicaux » de l’ancienne organisation. La Justice League voulait le meilleur et se battait pour le meilleur par le meilleur, portant des valeurs humanistes alors même que très peu d’entre eux avaient une origine humaine. C’est là son véritable tour de force : ils n’ont pas incarné le meilleur d’une espèce en espérant que celle-ci suive son exemple, ils ont incarné un idéal que toute espèce intelligente pouvait souhaiter atteindre. Là où les mythes et les comptes des civilisations humaines cherchaient généralement à faire craindre la punition afin de faire respecter la loi, la Justice League a prouvé que l’espoir pouvait en faire de même. Cet espoir a changé le monde puisqu’il trouve encore aujourd’hui écho dans de nombreux cœurs qui reprennent donc son flambeau, transformant l’échec qu’aurait pu être sa dissolution en réussite que sont les formations des groupes qui lui sont affiliés.  J’ai contemplé cet espoir parce que nombre des membres de la Justice League ont essayé de me l’enseigner et je me suis brulée les yeux à le regarder car je suis simplement incapable de le partager, indigne de le porter. Cela ne leur a pas empêché d’espérer autant pour moi que pour le reste de l’Humanité mais je pense également que cela les a conduit à cette même déception envers moi qu’envers les autres, déception responsable de la dissolution du groupe. Même si je ne l’ai jamais dit et ne le dirai jamais, j’avais plus qu’un marché avec la Justice League. Le marché est aujourd’hui avec le BPRD parce que des gens comme Diana, Ororo, Clark, T’Challa, Mari et Zatanna, ont su me pousser à plus avant notre séparation. Mais ce plus est un moindre mal.

Adrian, ton acceptation de cette méthode et de cette condition pourrait entrainer un moment de sincérité mais, comme la plupart des gens, nous nous en détournons avec une normalité presqu’affligeante. Je ressors de ton monde et de tes intérêts, tu restes sous ma surveillance, les choses sont où elles doivent être. Enfin, mise à part le Néxus qui se trouve dans ta tête, cela va de soit.

Le temps passe, me laissant tout loisir d’envisager quelques chansons que je n’ai cependant pas l’esprit à murmurer, et je me retiens de bailler face au labeur cliquetant d’analystes taiseux. J’en viens même à me demander  si ton assistant et toi travaillez ensemble Adrian, considérant l’absence totale d’échanges entre vous. Sans doute se font-ils par le biais informatiques mais c’en serait choquant de vous savoir ainsi connectés alors que vous n’êtes qu’à quelques mètres. Néanmoins, à la réflexion, c’est une bonne manière de m’isoler comme vous en avez fait du reste du BPRD, prouvant votre volonté de coopération plus que limitée.

Ta surprise ne m’alerte pas parce que, si elle est suffisante à briser ta concentration, ma propre intention est partagée entre l’activité du Néxus et le goût de ma sucrerie. Cependant le fait que tu t’adresses à moi m’enjoint à lever les sourcils et à t’accorder un peu de mon attention vis-à-vis de tes analyses.


Cette question me semble stupide considérant ma promesse de mort précédente, même si je conçois parfaitement qu’il faille un comportement suspect pour me pousser à l’action ; d’un autre côté, quand quelqu’un regarde à travers un judas, il est difficile pour la personne regardée de savoir ce qui est suspect ou non. Mais je tâcherai de n’être mauvaise langue qu’à l’oral, le stress et la peur de « Ça » n’étant pas des choses dont je compte me moquer en pensée. Hors donc, ma réponse équivaut à un « non » même s’il n’est pas sensé être rassurant.

Ta machine me semble trouver la réponse à ta réaction et tu y retournes dans l’instant, te faisant surprendre encore. Mais c’est qu’il semble se passer de nombreuses choses sur ton petit écran, pour la brève durée que tu y as passée. Brève durée qui est suffisante à ce que ton travail soit terminé et que la base adverse soit localisée ; et bien, pour les quelques minutes que cela prend à les trouver, je ne parviens pas à comprendre comment l’Hydra peut-elle toujours exister aujourd’hui. Oh, si, j’ai trouvé : l’incompétence du SHIELD.


Je décroise mes jambes et pivote sur ma chaise de manière à les ramener au sol, me relevant pour poursuivre en ta direction comme à ton attention.


Ce qui est peut-être l’objectif d’ailleurs, qu’ils donnent leur aval sans avoir pris le temps d’aller plus loin que le sommaire, mais cela ne serait qu’une preuve supplémentaire de l’inaptitude du SHIELD à faire bon usage des moyens mis à sa disposition. D’un autre côté, une demi-centaine de page expliquant une recherche Google Maps, je ne suis pas certaine que même Strange y verrait le moindre intérêt. D’un autre côté, ce cher Stephen a une chose qui semble manquer au SHIELD : de la confiance en ses subordonnés et leurs compétences. Mais dans le cas du SHIELD c’est peut-être une preuve de compétence que de ne pas avoir confiance en ses subordonnés. J’ignore et n’éprouve pas la moindre envie de savoir.

Bras croisés à te regarder ainsi que ton ordinateur en convenant parfaitement de l’inutilité d’Hugh, je regarde l’affichage de la zone industrielle de Baltimore. Voici qui explique, il n’y avait pas à chercher bien loin. Et en parlant de chercher bien loin, je relève mon regard un instant avant que l’officier s’étant chargé de notre accueil ne revienne, une tablette tactile en main, et retire la sucette de ma bouche lorsqu’il commence à parler.


Je souris d’amusement face au rictus de mépris de notre invité pour vous, Agents du SHIELD, qui témoigne que la méfiance envers vous n’était pas déméritée. Néanmoins, le professionnalisme permet de ne pas plus s’attarder sur votre cas que sur le mien et l’officier poursuit.


Je penche la tête sur le côté, roulant des yeux pour signifier de s’en tenir à l’essentiel même si le rapport est déjà bien succins.


Je redresse la tête mais affiche un sourire en coin des plus amusés face à la nouvelle absence de commentaire. J’offrirai bien un verre à ce cher officier s’il ne s’agissait d’un marché entre nous et d’une normalité qu’il offre son aide dans la mesure de son possible. Pauvre de lui.


Je ne perds pas mon sourire mais il se fait moins méprisant alors que je remonte mes lunettes et reprends avec nonchalance.


Et là, on en revient à la recherche des Néxus et la confirmation de la dimension sur laquelle ils ouvrent.


Même si je préférerais attendre la nuit, pour des raisons lunaires comme d’évitement des médias, il est plus sage d’éviter de laisser trop de temps à l’Hydra pour continuer ses préparatifs, surtout si ceux-ci ont été accélérés suite à la perte d’une de leur installation à Washington.


Le laissant repartir, ce qu’il fait moyennant le dépôt de sa tablette d’informations sur la table de réunion, je m’avance ensuite vers ces données pour y passer les doigts d’une main sur l’écran tactile pendant que l’autre rapporte ma sucrerie à ma bouche. Une fois que j’ai confirmé que je n’ai rien à faire de ce qui y est écrit, je prends l’appareil et le tend à Hugh puisque tu n’as manifestement pas besoin de plus de preuves qu’un mécanisme de défense informatique qui a trahi la présence d’un lieu intéressant alors même qu’il est conçu pour le défendre. Mais comme je le disais, l’Hydra semble du niveau du SHIELD. Et en parlant du SHIELD, je me prépare à parler de nouveau en fixant la sucette au bout de mes doigts.


Je marque un silence tout en tournant mon regard vers toi. Cette pause est d’une théâtralité bien  moins bruyante que la tienne mais non moins voulue et significative. Cette considération passée, je reprends avec mon sourire en coin.


Je prends une inspiration et conclue sur un soupire d’aise ; je vais enfin avec l’occasion de faire joujou avec ces trucs. Je n’ai pas encore de véritable idée sur comment les détruire puisque leur spécialisation suscitée hôte l’utilité à la plupart de mes familiers démoniaques, même si Baal ou Gomorrah devraient toujours pouvoir faire quelque chose, et que mon arsenal démoniaque me semble inadapté. Pourtant, il est lui-aussi composé d’armes-démons, simplement que celles-ci sont faites pour être manuelles, pas automatiques.

Réfléchissant à cela sucette en bouche, je laisse les soins aux autres de poursuivre. Sans doute seras-tu mécontent que je sous-estime ton travail Adrian mais réfléchis-y à deux fois : j’ai dit que tu avais trouvé aux autres et te dis que cela reste à confirmer à toi tout en t’emmenant à préparer la suite. Il ne s’agit pas là d’incohérence, même si ça n’étonnerait pas grand monde venant de moi, mais simplement de parer au pire. Tu as trouvé quelque chose de planqué là-bas, indiscutablement. Néanmoins il est beaucoup plus d’organisations secrètes que la simple trinité Hydra-AIM-Main. L’Arme X pourrait employer similaire contremesure électronique et profiter de l’isolement et de l’apport en matière première pour ses expériences, sans parler de la Ligue des Assassins qui saurait contourner le problème environnemental et profiter du port et de l’aéroport pour pouvoir agir en toute discrétion. Je n’irai pas jusqu’à soupçonner des organisation dont le SHIELD ignore l’existence, les X-Men comme la Batman Incorporated ne me semblant pas avoir d’intérêt à placer une base à Baltimore, mais trouver quelque chose ne signifie pas avoir trouvé ce que l’on cherche. Comme avec le Néxus qui se trouve dans ta tête, il nous faut plus de preuves. Mais comme avec le Néxus qui se trouve dans ta tête, je préfère être prête à intervenir pour le pire.

Adrian, ton mépris est apprécié à la hauteur de ce qu’il est, sois-en assuré. Ta réplique est intéressante, tant parce que tu t’estime capable d’une chose sans le chaperonnage d’une entité que parce que tu cherches à te défendre à nouveau mais pour une chose sans importance. Je dois avouer avoir du mal à conceptualiser des signatures différentes lorsqu’elles sont composées de 0 et de 1 mais je n’y connais rien et n’ai pas envie d’y connaitre quelque chose. Qu’il soit possible de nuancer les codes comme il l’est des dimensions n’est pas improbable.

Le fait que tu donnes la suite des opérations à ton assistant l’est déjà plus et me surprend mais, à par vous regarder discuter, je ne fais pas grand-chose. Les éléments loyaux dans le SHIELD étant membre de la TARGE me semblent être un oxymore mais je ne connais pas réellement la nature de celle-ci, envisageant simplement que tu sois un traitre à ta propre organisation en l’utilisant pour les buts d’une autre. Votre politique interne ne me concerne pas tant que je n’y suis pas mêlée, garde cela à l’esprit Adrian.

Ta demande concernant la transformation d’un agent du BRPD en agent du SHIELD me conduit à apporter les mains à mes hanches en émettant un raclement de gorge contrarié ; que tu te soucis de la santé de tes collègues est une chose normale, même si l’on pouvait en douter considérant vos relations, cependant que tu n’écoutes rien de ce que je dis me laisse simplement l’envie de discuter avec la seule personne qui me servira d’intermédiaire à présent. Ton assistant en charge des opérations. Je cherche du fait comment répondre à une ineptie telle qu’elle en serait un parfait trait d’humour si elle en avait le ton. Et tu reprends, me faisant levers les yeux au ciel et soupirer lourdement.


Voici pourquoi je voulais faire une pause dans les recherches si le Néxus s’activait, afin de ne pas avoir à devoir être à deux endroits à la fois. Ne le pouvant pas, je suis simplement obligée de prioriser et je ne pense pas que le temps de préparation de l’opération permettent de faire les recherches nécessaires à comprendre ta magie, Adrian, surtout considérant que Baltimore est assez éloigné d’ici.


J’ai toute confiance en mes collègues pour s’assurer que tu ne puisses pas nuire de la même manière que je le faisais précédemment mais je n’ai pas l’intention de risquer leurs vies contre une arme-démon. Zatanna ou Stephen pourraient sans doute s’en occuper sans trop de difficultés mais ils ne sont pas ici, pas plus que Mari ou Jubilation qui auraient déjà plus de problèmes du fait de leurs capacités principalement physiques ; et puis je n’aimerai pas laisser la Petite Fée ou ma sœur de clan s’en aller confronter un danger encore inconnu. Me détournant de cette pensée comme de toi Adrian, je me tourne vers Hugh.


Je suis des plus sérieuses en disant cela, plus que je ne l’ai été durant mes dernières paroles. Je ne me concerne pas autant pour les vies des agents du SHIELD que pour celle de mes collègues du BPRD ou encore celles des civils, c’est un fait, mais je préfère éviter les dommages collatéraux quels qu’ils soient. Une habitude de la Justice League et, comme on dit, les mauvaises habitudes ont la vie dure.

Reprenant mon attitude normale, je recommence à parler avec un sourire en coin.


Concluant avec ma sucette en bouche, je ne tarde pas reprendre la marche au travers des couloirs du BPRD afin de trouver ce cher officier en escomptant qu’il ait finie sa recherche satellitaire grossièrement qualifiée de « Google Maps ». Toutes les données sont en possession d’Hugh et il n’a donc plus rien à attendre de nous ni aucune raison pour sortir de la pièce allouée, je lui laisse le bénéfice du doute à faire les choses correctement. Une manière de faire que je tente d’accomplir avec toi aussi, Adrian, retirant ma sucrerie de la bouche pour continuer sur mon ton nonchalant.


Peut-on considérer la crainte d’une chose dépassant la compréhension comme irrationnelle ? Je dois avouer y répondre un « non » franc pour la raison que c’est l’incompréhension qui génère la crainte. L’incompréhension n’est pas irrationnelle et fuir ce que l’on craint non plus. Préserver sa vie n’est pas égoïste, on pense d’abord à soit avant de penser aux autres, c’est humain. Il faut trouver le courage ou l’inconscience de faire face et généralement le courage prend plus de temps. Tu t’excuses par politesse, Adrian, mais tu n’as pas à le faire. On ne s’excuse pas de ses faiblesses, on apprend à s’améliorer. Ce sont les erreurs faites pour de mauvaises raisons dont il faut s’excuser et je n’ai pas l’impression que tu sois dans ce cas. Mais évidemment, je ne te le dirais jamais.

Réaffirmer son humanité n’est pas inutile. La Justice League aussi avait une notion très positive de l’Humanité. Mais allons, Adrian, tout geek que tu sois tu dois bien être suffisamment analyste pour voir que l’Humanité c’est autant pouvoir faire le meilleur que le pire. Etre humain est une condition, il ne faut pas confondre cela avec des valeurs humanistes. La plupart des membres de la Justice League n’étaient pas des humains mais portaient des valeurs humanistes faisant d’eux plus que les meilleurs philanthropes. Quand à tuer une centaine de personne en appuyant sur un simple bouton, quelle lâcheté. C’est tellement plus intéressant de leur faire face et de les voir lorsque l’on presse la détente qui détruit leur vie.  Là, la question n’est pas de savoir si l’on ne fait plus qu’un avec la machine de guerre. Là, la question c’est de savoir ce qu’on est réellement. L’Humanité  fait aussi bien l’aide aux personnes sinistrées que les camps d’extermination mais un meurtrier a l’occasion à chacun de ses morts de se demander dans quelle partie il est, vers quel pôle il se dirige. Tuer est un acte naturel, les animaux le font quotidiennement. Mais les animaux font ça par besoin, pas par haine ou envie.


Tu es assez incroyable dans tes raisonnements, Adrian, j’en perds ma sucette. Ta place n’est pas aux côtés des gens d’intervention, ta place est dans un laboratoire afin d’analyser les éléments pour qu’eux puissent se préparer au mieux et donc courir le moins de risques possibles une fois sur le terrain. Que ferais-tu si cette entité était « trop dangereuse » ? Tu la laisserais mettre en danger tous tes alliés ? Tu utilises tes responsabilités comme une excuse parce que tu es incapable de laisser les choses aller sans toi, tu es incapable de faire confiance à tes suivants pour réussir sans toi alors même que tu es incapable de te tenir à une décision ou de savoir véritablement où tu en es.

Appuyer sur un bouton pour tuer une centaine de personnes, tu l’as dit toi-même. Ne faire plus qu’une avec sa machine, tu l’as dit toi-même. Appuyer sur la détente et voir quelqu’un mourir ce n’est pas cela, ce n’est pas une idée qui te fait te demander si tu appartiens à quelque chose de dénaturant. Tuer quelqu’un lorsque tu lui fais face se fait avec naturel car tu dois le tuer avant qu’il te tue, car tu ne réfléchis pas aux conséquences de tes actes. C’est seulement lorsque tu le vois mort que t’interroge sur ta propre nature parce que ce que tu perçois et ressens est direct. Pour la plupart des gens, c’est horrifiant parce que votre culture place le meurtre comme une chose terriblement négative. Mais qu’est-ce qui est le plus dérangeant en réalité ? La plupart des humains ne souffrent pas de donner la mort aux animaux alors qu’à leurs semblables, nombre de questions peuvent venir : qui ai-je tué ? Pourquoi était-il là ? Tu parles de tuer une centaine de personnes en appuyant sur un drone parce que tu n’as pas l’occasion de voir les cadavres que tu fais et conceptualise donc en quantitatif. Regarde le visage d’un mort que tu as fait, Adrian. Prends la peine de t’interroger sur lui et de le considérer comme une personne à ton égale. Une personne avec un passé et un futur, des espoirs et des craintes, des proches. Tout humain à cela et retirer à des gens leur droit à l’Humanité c’est leur refuser cette condition pourtant naturelle et normale. Cela aide de se dire qu’on tue des terroristes, qu’on tue des méchants. Qu’on tue cent personnes. Maintenant, regarde bien cela non-pas en termes de chiffres mais en termes d’humain. Qu’est-ce que cela te ferait ?

J’ai la chance de venir d’une culture liée aux assassins et de n’avoir à me poser les questions que toute personne « humaine » se pose quand elle tue mais la Justice League me les a fait me les poser. La plupart des membres, même ceux provenant de cultures guerrières, reniaient le meurtre parce que plus ils y réfléchissaient et plus cela les horrifiaient. Certains étaient, et sont toujours, prêt à concéder le meurtre pour des raisons divers mais je pense qu’ils y voient tous un sacrifice inévitable, celui d’un adversaire qui n’est pas forcément si différent qu’eux, qui n’est pas inhumain. Pour moi, tuer est un acte naturel, j’existe pour cela, j’ai été entrainée pour cela. Tuer me permet d’être à ma place et de laisser s’en aller tout le poison qui encombre mon âme. Faire souffrir quelqu’un c’est lui faire exprimer cette souffrance que je ne peux exprimer car, comme lui, j’en décèderai. Je ne tue pas quand je peux l’éviter parce que je comprends la chaine de destruction que cela enclenche, parce que j’ai faite la promesse à des personnes valant bien mieux que toi et moi de me restreindre au mieux là-dessus. Mais j’ai suffisamment tué et vu mourir pour savoir que ceux qui souffrent de la mort ce sont les vivants.

Je te regarde avec tristesse Adrian. Je n’ai pas pitié de toi, si cela peut te rassurer. Je contemple simplement une réalité bien plus horrible que celle dans laquelle tu sembles vivre et je ne te souhaite pas de la découvrir. Je comprends tes peurs pour tes proches tout comme je comprends le fait que tu puisses préférer risquer ta vie à leur côté que d’envisager de la faire sans eux. C’est pourtant une grande partie de la vie que d’apprendre à vivre avec la mort des autres. Les parents partent souvent les premiers, même si quelques chanceux ont des animaux de compagnie pour mourir avant et les préparer à ces sentiments, puis viennent les amis, les amours, parfois même les enfants. Personne n’est égal dans cet écoulement du temps mais la seule constante c’est de perdre peu à peu les autres jusqu’à ce qu’on se perde soi-même. Comme je l’ai dit, ceux qui souffrent de la mort ce sont les vivants.


Je prends un énorme risque car, si tu es prêt à mettre en danger toute l’équipe du SHIELD avec ton entité, je n’éprouve pas du tout l’envie de devoir la gérer simultanément à des adversaires démoniaques. Heureusement que la simultanéité est un concept malléable lorsque l’on manipule le temps. Dans tous les cas, je souhaite pour toi n’avoir à me donner des raisons de t’abattre. Je suppose que tes hommes ne l’apprécieront guère et je n’aurai aucun mal à expliquer au SHIELD la destruction de leur équipe dans une zone contrôlée et brouillée par l’Hydra.


Je ramène ma sucrerie en bouche et te congédie de la main. Je te donne une chance que je ne devrais pas mais mon absence de professionnalisme n’est pas à prouver. C’est d’ailleurs ce qui me permet d’éviter le moindre commentaire de l’officier, qui s’acharnait à faire les scanners alors que l’on perdait « des secondes et des minutes importantes », lorsqu’il s’en vient me faire face. Il est trop tôt pour qu’il ait la devise permettant de m’épargner les combinaisons hazmat mais il est plus que temps de savoir s’il est le Néxus que l’on cherche dans le Maryland.