Dans un combat défaillant (Sin Tzu)

Mon comportement avait beaucoup trop changé, mes attitudes n’étaient plus pareilles qu’avant. Depuis la date fatidique, je ne pouvais pas réfléchir convenablement, je vaguais parfois dans la base en recherche d’un but particulier et je me retrouvais souvent dans un vide complet. Je n’avais plus de buts, je n’avais plus de motivations. Avant, j’avais du plaisir à faire le tour de la base, de saluer certaines personnes, mais aujourd’hui, tout était complètement différent. Les couloirs semblaient beaucoup plus sombres qu’avant, les lumières me faisaient bien trop mal aux yeux maintenant. Je ne dormais que peu. J’avais enlevé l’horloge, je ne voulais plus calculer le temps, les heures que je restais dans ma chambre à essayer de me relever sans cesses. J’avais fais des simulations seules, mais l’opérateur m’avait bloqué après avoir vu les séances que je faisais. Digne des pires masos selon lui, affronter mon village et se faire démolir à chaque fois. Je ne savais pas pourquoi je demandais ce genre de simulations, on dirait que c’était plus pour me souvenir de mon échec. De me regarder dans le miroir et de voir comment je m’étais écroulée devant tous.

J’avais encore levé le ton avec Sergei de Boldarev, mais il me disait de prendre du repos, de passer du temps avec Pavel de Raspoutine ou d’autres amis. Plusieurs étaient arrivés depuis quelques jours, je regagnais un peu de confiance envers Sun, Anna et Hiroki, mais mes doutes restaient toujours autant importants. Je connaissais Sin de Tzu, mais elle faisait toujours très officielle du gouvernement chinois. Pavel de Raspoutine s’était montré aussi rigolo que Sun de Wukong, mais avec beaucoup plus de connaissances générales que les autres. J’avais demandé au Colonel Hing ce matin de me trouver des soldats pour un entrainement. « Tu es sûr Korra? » Je ne savais pas pourquoi il me le demandait, tous les gens avaient beaucoup changé de comportements envers moi depuis le Jour-J. Je voulais une vingtaine de militaire comme la dernière fois quand Slade de Wilson était venu me confronter au gymnase. Je n’avais peut-être plus mes capacités données par mes Dieux, mais je savais toujours autant me battre.

Je portais toujours mes habits entrainements habituels ; jaunes et noirs, avec toujours un regard autant vide qu’avant. Un ou deux militaires me demandaient avant de combattre de penser à me reposer avant. J’avais refusé. Je savais toujours me battre. Ils étaient dix-huit. Certains étaient bien plus forts que la moyenne, d’autres étaient juste des techniciens. Je connaissais la plupart de leurs techniques. Je connaissais la plupart de leurs mouvements, quand ils attaquaient et surtout pourquoi. Je commençais toujours avec un bâton d’entrainement et j’attendais. Le début était plutôt positif, je faisais attention, je bougeais de manière fluide, je frappais toujours leurs points faibles de mes adversaires. Je ne sentais pas le vent autour d’eux, mais j’avais toujours des bons réflexes. Mes coups restaient aussi précis, mais je sentais toujours autant de colères en moi.

Puis, j’avais donné un coup bien plus puissant à un soldat, lui cassant directement le nez. Qu’est-ce que je venais de faire? Pourquoi j’avais frappé en colère et non avec de la retenue? Puis, je recevais les premiers coups, un coup brutal, je m’étais mordue la langue et le sang commençait à s’étendre sur mes dents. J’avais répliqué avec autant de violences. Je ne me comprenais plus vraiment. Je continuais toujours le combat, j’avais toujours un avantage, malgré le sang qui coulait de ma bouche.

Mes coups devenaient de plus en plus violents et à chaque fois, je prenais du recul pour penser au coup que je venais de donner. Certains militaires en profitaient facilement. Je sentais bien la douleur de chacun de leurs coups. Mon corps s’écrasa au sol avec de la violence une première fois après un coup de pied au niveau du ventre. Je me relevai toujours aussi rapidement, mes coups créaient une certaine tension pour les militaires. Puis, j’étais une deuxième fois au sol après un coup de poing proche de mon œil. J’avais maintenant un bleu proche de mon œil, je respirais la fatigue. Certains militaires semblaient quitter. « Non… mais restez… » Je me relevais aussitôt pour montrer que je pouvais encore me battre, mais les six militaires semblaient avoir beaucoup plus de facilités. Les autres étaient en train de quitter et l’un des soldats avait hurlé d’arrêter le combat avant de partir.

Ils m’avaient jeté au sol deux fois de plus, j’avais encore de la difficulté de me relever. Le combat semblait si simple pour eux. Je ne comprenais pas pourquoi je faiblissais autant. Leurs coups m’atteignaient bien plus facilement, mais je me relevais toujours, je ne pouvais pas abandonner. C’était pendant un moment de fatigue, qu’ils avaient réussi à me propulser au sol pour me donner un solide coup de genoux. Je tombai au sol avec le visage en douleur, peut-être en perdant une dent. Je pouvais toujours me lever, je le sentais. J’étais en train d’essayer de me relever, quand un pied passait sur mon visage pour me faire rouler quelques mètres plus loin. Je restais sonnée sur le coup, mais les six militaires restants semblaient s’être arrêtés quand la porte du gymnase s’ouvrit.

Je pouvais toujours me battre, je le savais très bien, ce n’était pas mes limites. Je ne pouvais pas perdre contre eux. J’avais été entrainée pour être l’une des meilleures et encore une fois aujourd’hui, je m’écroule contre un adversaire. Après quelques secondes de repos, mes yeux étaient en train de se relever pour voir la scène. Sin de Tzu avait décidé d’arrêter le combat, mais je savais que je pouvais gagner ce combat. C’est la seule chose que j’avais besoin de ma vie, de gagner un seul moment dans ma vie. Je voyais ces grands Golems partir avec les soldats pendant Sin de Tzu venait proche de moi pour m’aider à m’asseoir et m’enlever un peu de sang au visage. Mon regard était toujours aussi vide, dans cette position, j’étais vaincue. Je me sentais débile et faible de vouloir continuer à rester ici. Peut-être que c’était vraiment l’Avatar qui me donnait autant d’avantages durant les combats martiaux. Mes genoux se retournaient vers moi et je commençais à les enlacer doucement.

Je tournais mon regard vers Sin de Tzu, quand elle venait me parler. Elle me sortait un vieux proverbe chinois sur la cicatrisation des blessures et j’avais décidé de répondre par une citation de l’un des mes anciens professeurs. « Le seul grand honneur dans ce monde est de mourir au combat avec sa famille. » Je me refermais un peu sur moi-même et une première larme était tombée. Je ne faisais pas cela pour être agressive contre mon amie, mais on pouvait toujours me dire de changer mes idées, mais tout ce que j’avais fait avant, étaient liés avec ce village maintenant vide. Les survivants avaient quitté le Village pour aller habiter dans des coins civilisés et oublier leurs passés. Je n’avais pas osé réapparaitre devant eux ou leur envoyer un message. Je savais que l’un de mes anciens mentors avait survécu, mais il avait disparu aussi dans la nature. Un jour, la neige allait enterrer ce qui restait de Kailash et on allait même être oublié des livres d’Histoire… juste parce que je n’étais pas là au moment de l’attaque.

Mes yeux commençaient à cumuler de l’eau. Je n’avais rien à faire de perdre dans un combat aussi stupide, j’avais juste besoin de me retrouver, de me sentir moins coupable, mais je savais que je l’étais. J’enlevais doucement l’eau dans mes yeux avant de répondre à Sin de Tzu sur a question de la capacité de marcher. « Ça va, laisse moi juste quelques minutes, je vais être capable de marcher. » Je ne la remerciais même pas, non parce que je voulais paraitre ingrate, mais je ne savais même plus communiquer correctement me perdant souvent dans mes idées. J’étais bien plus polie avant, mais c’était difficile de me concentrer aujourd’hui. « Ne le dis pas à Sergei, ils vont aussi me bloquer ce genre d’entrainements comme ils ont fait avec la salle de simulation. »

Je ne savais pas quoi faire de ma vie, ni de mes journées. Je restais toujours aussi pensive pour commencer ensuite à me lever tranquillement. Une jambe était boitant à cause d’un atterrissage raté durant le combat, mais cela allait partir avec le temps. Je n’osais pas vraiment regarder Sin de Tzu dans ces yeux, évitant même un regard avec elle, par honte d’être encore juger d’une nouvelle défaite.

Peut-être que je pouvais manquer de sentiments en ce moment, mais mon état mental était dans le négatif quand on parlait de compassions pour les autres. On pouvait même me raconter l’Histoire de Rémy sans Familles et je n’allais pas verser une larme ou un sentiment empathique envers ce jeune homme. L’histoire de Sin de Tzu était triste, mais mon mental bloquait totalement en ce moment pour retrouver mon empathie. Mon humanité disparaissait peut-être comme les gens qui ont construit celle-ci. Au fil du balayage, au fil du vent qui allait noyer Kailash, peut-être que c’était mon avenir de devenir une arme pour les Last Sons. Ma réponse paraissait peu naturelle surtout quand on me connaissait avant le massacre de Kailash. « Non, je ne peux rien me faire pardonner, soit heureuse, tu ne vas pas aller en enfer toute seule. » C’était peut-être la réponse la plus cruelle que je pouvais donné à être vivant. Je m’étonnai moi-même de ce genre de réponses. Elle parlait de rédemption. Mais de rédemption avec qui? Je ne pouvais même pas me faire pardonner par mes parents, ni par les gens de mon village.

Je ne savais pas ce que Sin voulait faire, mais je ne prêtais pas attention à ce qu’elle disait. J’avais compris depuis longtemps l’individualité de plusieurs entités différentes dans le gouvernement chinois. Je pouvais presque l’ignorer en me dirigeant vers ma serviette pour essuyer mon visage de la sueur et du sang restant. Pour une première fois dans un entrainement, je me dirigeais vers le système de glace au coin du gymnase pour mes blessures. J’avais vu des soldats s’en servir une fois après un entrainement. Je ne répondais pas aux provocations de mon amie, elle semblait avoir perdu autant d’humanités que moi devant ce qu’il s’était passé. Peut-être parce qu’un code moral s’était brisé, peut-être parce qu’elle sentait avoir trahi une confiance. De mon coté, je me sentais la seule responsable de ce qui s’était passé.

Je commençais à sortir de la glace pour coller sur mon visage. Je l’écoutais de nouveau, me promettant une vengeance pour mes siens, je restais toujours aussi de glace à ce genre de révélations. Je m’avançais de nouveau vers elle, mais gardant toujours une certaine distance. « Sin. Je ne veux pas me battre, je ne veux pas de vengeances, je ne veux pas de violences. Je veux juste les revoir. Je veux juste revoir mes amis, je veux revoir mes parents, je veux revoir mes mentors et je veux surtout revoir Mako.

Je ne veux plus voir les images de leurs morts, je veux voir quand mes parents m’ont donné le dernier câlin avant de partir, je veux revoir quand Mako m’a serré la dernière fois la main. Je ne veux plus voir les intestins de mon père écrasé par le démon. Je ne veux plus voir Mako se faire couper en deux par les dents du monstre. À chaque fois que j’y pense, cela me tue. Je me dis que je dois continuer à me battre pour eux, pour garder un souvenir noble d’eux, mais à chaque fois que je pense à eux, à chaque fois que je parle d’eux, je ne revois que ça! Je veux savoir s’ils m’aiment encore… je veux savoir si Mako me voyait plus que son amie, je veux savoir si mes mentors sont toujours fiers de moi. Je veux juste savoir. Je ne veux pas de vengeances, je n’en ai rien à faire de la vengeance! Je ne veux pas me battre! Je veux juste savoir… » À chaque fois que j’ajoutais une phrase, on dirait que cela me faisait de plus en plus mal. J’avais lâché la glace au sol pour le remplacer par une main, bloquant encore quelques larmes. Je ne voulais rien savoir de ces buts, de ce qu’elle allait faire et de son idéologie. Je voulais juste savoir.

Elle voulait m’aider ou me nuire? Je ne comprenais rien de ces intentions, pourquoi elle me parlait de la magie occulte sur la mort, quand presque même les pires criminels le déconseillaient? On pouvait peut-être devenir les pires êtres de l’univers quand on utilisait la magie de la mort aussi facilement. Grigori de Raspoutine, Tomi de Shishido et ainsi que plusieurs autres étaient devenus des véritables monstres après avoir vécu la mort. Je ne voulais pas faire revenir mes amis de la mort, comme les autres personnes des Kailash, ils ne risquent de jamais connaitre un repos en connaissant toutes les pertes qu’ils étaient obligés de vivre, je crains qu’ils ne supportent pas. J’essayais de comprendre ce que Sin voulait de moi.

Puis elle commença à parler contre moi. Je ne comprenais encore rien de la psychologie, je ne pouvais même pas entreprendre toutes les démarches qu’elle me disait. Syndrome du survivant? Je ne m’étais même pas battue durant la fin de Kailash, comment je pouvais être une survivante? Ma main était sur le front, surtout en train de réfléchir, puis elle confirma ses idées malsaines contre moi. Elle voulait que je fasse quoi? On était dans une base militaire spécialisée dans la défense et dans le combat de la protection mondiale. Il n’avait rien à faire dans cette base hormis se préparer au prochain combat.   « Je vais faire quoi ici, putain? » On ne pouvait rien faire d’autres que se préparer au combat et aux prochaines missions. Sergei de Boldarev ne me voulait pas en mission alors? Non, je venais de perdre ma dernière maison. Mon regard semblait juste désespéré à ce moment, me cherchant un peu. « Attends… je ne comprends plus rien. Tu vas dire à Sergei que je ne peux plus être dans les Last Sons? Je ne peux plus faire les missions, non plus? Je dois partir d’ici? Je n’ai plus de maisons, Sin… Comment je vais faire? » Je recommençais à pleurer un peu, elle était en train de me parler de la psychologie quand c’était peut-être la première fois de ma vie que j’entendais les termes de syndrome.

Puis elle restait en position de combat, prétendant toujours vouloir m’aider. Ma tête essayait de comprendre ces démarches. Je soupirais un grand moment. « Tu prétends vouloir m’aider quand tu n’arrêtes pas de vouloir contrôler mon comportement. Tu me dis que tu veux me venger quand je désire aucunement de me venger. Tu crois que cela m’aide à me sentir mieux? Est-ce que tu me considères vraiment comme une amie quand tu veux que j’arrête d’être dans l’équipe? En quoi tu veux m’aider? Et arrête cette position de combat, c’est complètement stupide! Je ne comprends rien à ce que tu me dis! »

Sin de Tzu semblait aussi perdu que moi. Peut-être qu’elle venait de briser son code moral à respecter, mais c’était différent pour moi. Je me perdais à cause que toutes les lois inscrites à mon code moral, étaient perdus dans un néant. On ne pouvait plus espérer de respecter un code moral tué par un massacre inédit. Je me sentais mal pour plusieurs concepts qui venaient de disparaitre dans ma vie. Les Dieux cherchaient toujours à communiquer avec moi, mais je ne pouvais vraiment pas. Je me sentais bien trop honteuse pour discuter avec eux et redemander mes pouvoirs. Peut-être qu’ils avaient de l’espoir pour moi comme Sin de Tzu, mais aujourd’hui, mon espoir s’était essoufflé depuis ce jour. Elle me parlait de la différence entre la Korra d’aujourd’hui et la Korra d’hier, mais c’était normal cette différence. Comment je pouvais rester si fière d’une Maison qui n’existait plus? Comment je pouvais me promener avec les couleurs de mon Village quand celui-ci avait été massacré par ma faute? Je ne savais pas où Sin voulait arrivée avec moi. Mes idées étaient beaucoup trop perdues pour le moment. J’avais accepté cette zone d’intimité pour retrouver une chaleur humaine avec un petit enlacement. On m’avait toujours apprit que le contact physique doit être rare et respectueux, mais en ce moment, j’en avais besoin bien plus que de me faire parler de syndromes.

Elle avait décidé de m’amener avec elle, mon état mental ne pouvait pas juste demander où et pourquoi. J’étais complètement bloquée, alors mon corps suivait naturellement mon amie sans réelle défense orale ou physique. Je me demandais durant un moment si elle voulait m’amener à l’extérieur de la base et me laisser devant l’entrée pour demander mon départ. J’avais toujours des doutes importants dans ma tête sur ma place dans les Last Sons. Je pensais même un moment que ceux-ci allaient me demander mon départ vu comment j’avais vécu les évènements. On se rendait à ses quartiers et elle semblait avoir autant de difficultés à se contrôler que moi, surtout quand elle avait monté le ton pour ces Golems.

J’écoutais un peu ce qu’elle disait, mais j’avais toujours de la difficulté à comprendre la séparation qu’elle faisait entre les deux Korra. C’était beaucoup plus une évolution de mon comportement, une évolution obligatoire. J’avais besoin de dormir, on dirait que ma tête allait exploser. Sin voulait m’aider, mais je ne comprenais pas comment elle pouvait m’aider juste en me parlant. « Je ne comprends pas ce que tu me dis. Vous ne me voulez plus dans les Last Sons? Je peux rester dans la base ou je dois partir? Je sais que tu veux m’aider, mais en ce moment, ma tête va explosée. Je ne comprends plus rien… En plus, tu veux que je fasse quoi en restant ici sans m’entrainer? C’est une base militaire pour s’entrainer et se combattre pour s’attendre au pire en mission. Je ne peux rien faire si on me bloque tout… » Comment changer des idées quand c’était une base spécialisée sur le combat et pour rien d’autres que cela?