Reine Blanche et Chat Noir

Je regarde l’avion amorcer sa descente en me disant que ça a commencé avec un simple tweete et que, pour toute autre personne, ça s’en serait terminé avec ce même tweete. Pas pour moi. C’est con parce que tweeter me sert surtout à stalker les gens d’habitude et que, durant les semaines précédant cet échange, il s’était limité à un « carnet de vacances » pour résumer le stage ACE à Excalibur à mes proches sans avoir à casquer des sms à l’international. Je n’avais même pas remarquée l’annonce et ce sont mes potes qui m’ont fait voir. On s’est faite une bouffe dans un fast food comme celui où je travaillerai surement bientôt et ils m’ont fait rattraper mon retard sur les nouveautés de l’été ; principalement, il y avait Pokémon Go et l’American Tenkaichi Budokai. J’ai eu un avis assez négatif sur le tournoi que l’Union Européenne souhaitait organiser sous le coup de la colère et de l’incompréhension une fois mais, depuis, j’ai eu le temps d’observer et de comprendre. La compétition des Super-Héros est comme celle des sportifs de haut niveau, avec les aspects positifs et négatifs que cela implique ; pour les participants, c’est une chance offerte d’améliorer leur condition en prouvant leurs capacités non seulement aux médias mais surtout à leur milieu. Je ne cherche ni l’admiration ni la richesse, simplement à faire ce que je veux faire sans qu’on me punisse pour hors il me faut le respect de mes pairs pour cela. Démonstrations comme celle organisée par Emma Frost ou l’UE permettent de l’acquérir tout aussi rapidement, sinon plus, qu’en effectuant des missions ; je ne sais pas vraiment en fait. C’est pourquoi j’ai répondu, c’est pourquoi j’ai tentée ma chance. I’m the Lucky One.

Emma Frost @WhiteQueen

Lancement de l’American Tenkaichi Budokai. #ATB #VirtuslusSuperat
 

 

14:32 – 27 août 2016

 

1648 Retweets

7 273 j'aime

 

Lucky @TheLuckyOne

16ans, 157cm, 52kg, section junior #ACE, need help to come #ATB #pauvre

13:24 – 4 septembre 2016

8 Retweets

201 j'aime

Les neuf semaines du stage ACE à Excalibur m’ont permise de progresser mais, considérant qu’elles ne m’ont pas faite loupée la rentrée scolaire puisque celle-ci ne me concerne plus, le retour au quotidien risquait d’être assez déprimant : passer de huit heures d’entrainement super-héroïque à huit heures de travail non-qualifié n’est pas franchement quelque chose qui me fait envie. D’autant plus que j’escompte bien continuer de m’entrainer en solo, à défaut d’avoir le droit d’intervenir. Je n’avais rien à perdre à demander et tout à gagner ainsi voici mon lot : un séminaire chez les Hellions durant toute la durée du tournoi. J’avais déjà ouï-dire que les différents groupes de super-sécurité faisaient des échanges de membres, soit comme chez les Vengeurs pour « participer » soit pour partager les savoirs et les formations, mais je n’aurais jamais pensé que cela puisse m’impliquer moi. La chance faisant, je me retrouve dans une école mais je ne pouvais pas cracher sur l’opportunité. J’espère que les membres de l’Alliance ne verront pas cela comme une provocation ou une rébellion, considérant que je ne leur en ai pas référé avant d’accepter ; je l’ai fait avec mes parents mais, même si j’ai entièrement comprise Aislinn quand au fait que leurs choix soient plus importants pour moi que les miens, je n’ai toujours pas l’intention de renoncer à mon libre-arbitre.

Juillet et aout ont été passés en Angleterre à être formée par Valerie Braddock et d’autres afin de peut-être intégrer l’Alliance des Champions de l’Europe un jour ; octobre sera passé à l’Académie du Massachusetts afin de participer à une compétition professionnelle pour « honorer la puissance de chacun et nous permettre de nous dépasser ». Je suis de la catégorie des « simples humains ambitieux » même si je ne pense pas vaincre au premier match ; mon ambition n’est pas là, je peux perdre le combat et gagner beaucoup au dehors. Mon ambition reste la même que celle ayant déterminée mon approche avec les membres de l’Alliance : les rencontrer pour qu’ils ne soient pas de simples collègues ou les fonctions d’une organisation mais des personnes que je puisse déclarer connaitre un minimum. Bon, je ne vais pas rencontrer des collègues à l’Académie mais l’idée reste la même ; je veux connaitre des personnes, pas des images médiatiques.

Cela ne m’a pas empêché de chercher des infos sur Emma Frost ; Google est mon ami, Wikipédia aussi. Et pour le coup, la conférence TED au sujet des mutants avec Katherine Pryde me permettra d’être pas trop larguée si on aborde le sujet mais c’est hors sujet. Emma Frost a bien des titres : Présidente-Directrice Générale de Frost International, Docteure en Psychologie spécialisée en Sexologie, Directrice de l’Académie du Massachusetts, Chef des Hellions, White Queen… oui c’est son tweeter mais c’est tout aussi instructif sur elle que les autres. Dire que c’est quelqu’un tient de l’euphémisme en somme. Okay, j’ai rencontrées des légendes comme Captain Britain et Atalante ou encore des personnalités montantes comme Valerie Braddock et Marie Curie, mais ça n’empêche que je suis toujours épatée quand je « croise » des gens de ce calibre. Bon après, je sais pas si je vais réellement croiser Emma Frost ou si elle s’est contentée de m’offrir ma chance parce que je l’ai tentée au culot mais je lui en dois une tout autant qu’à Aislinn.

Tout le monde est prié d’attacher sa ceinture alors que nous atterrissons au General Edward Lawrence Logan International Airport, je le fais sachant qu’après c’est moi qui vais prier pour ne pas me paumer dans les cinq terminaux ; d’un autre côté, si j’ai une chance sur cinq, c’est comme si j’avais réussi. Je me formalise pour des trucs des fois… le stress de l’arrivée dans un nouvel endroit je suppose. Un nouvel endroit passablement plus grand que la gare de Saint-Pancras. Il y a foule et je ne suis pas des plus visibles en son sein, le mètre 57 n’aidant pas à voir par-dessus ou par-dessous les gens. La tenue me distingue un peu plus déjà, les mitaines sont du même vrai faux cuir que le traditionnel blouson de motard ouvert comme toujours sur un t-shirt simple qui descend sur un jeans encore en bon état lui-même maintenu des guêtres souples et recouvert de bottes montantes à semelles plates ; d’ordinaire, j’ai également une balle rebondissante et un cran d’arrêt dans les poches mais, même si je passe au travers des détecteurs de métaux des musées et galeries commerçantes de Paris, je n’ai pas tenté de les conserver à l’aéroport surtout considérant qu’il y aurait la douane. D’un autre côté, c’est un bon point de rendez-vous ça : « tu es où ? » « Avec les mecs de la sécurité, en observation ». Pas de risque de se tromper. Mais bon, mes affaires sont dans la valise à roulettes que je me trimballe une fois que je l’ai récupérée. Il ne me manque donc plus qu’à l’être à mon tour, récupérée, et je me dirige donc vers la sortie en usant de mon téléphone et d’une carte prépayée US pour expédier un sms à un numéro convenu afin de signaler que je suis arrivée et demander un point de rencontre ; j’ai l’habitude des trajets pour rencontrer des inconnus à force et il sert à rien de se chercher l’un l’autre quand on peut se trouver tous les deux avec un truc généralement plus voyant que l’autre suscité. Au pire, je m’en remets à la chance ; ça marche toujours avec moi.

Une chance sur cinq quand c’est moi qu’elle concerne c’est quasiment assuré que ça ce produise, d’une certaine façon. C’est pour ça que je ne me demande même pas combien de chance il y avait pour que le mec sensé me récupérer ait un problème de bagnole ; j’ai cheaté. Chier, normalement c’est dans l’autre sans que ça marche. Sauf si… ah mais je suis trop conne ! Et dans la merde, aussi mais d’abord le raisonnement : j’ai de la chance en Europe, peut-être que c’est comme pour le mec des Bronzés avec un nom à la con qui est comme un con en Europe et où tout lui réussi aux USA sauf que moi, c’est l’inverse… ça explique que j’ai été refoulée à la Young Force et que le chauffeur il soit bloqué. Encore que… tout ne me réussissant pas en Europe, je devrais pouvoir m’en sortir ici aussi ; Système D 4 Ever. Tiens d’ailleurs je dois toujours me le faire ce t-shirt, il sera du plus bel effet accroché sur ma mezzanine. Après, c’est pas à moi de le faire le Système D vu que le mec a signalé et qu’en toute logique on doit avoir envoyé quelqu’un d’autre me chercher. Je suis entrain de chercher quoi lui dire autre que « bonne chance », ce qui serait très con à dire de ma part, quand la bonne chance se rappelle à mon bon souvenir en me faisant heurter quelqu’un.

Mon téléphone ne touche pas terre que je l’ai déjà rattrapé de l’autre main alors même que mon visage se lève vers la personne qui me fait face. Mon excuse automatique s’interrompt quand je vois combien je suis douée de ne pas l’avoir vue, la discrétion de sa taille moyenne étant compensée par son habit blanc immaculé, et je fronce les sourcils avec un air suspicieux à la vue de son visage ; lequel n’est pas vraiment moins remarquable que le reste. Mon doute est partagé et percute à peu prêt en même temps qu’elle une seconde fois ; heureusement, c’est au figuré cette fois. Emma Frost, en personne… y’avait combien de chances que ça m’arrivent ? Ah oui… I’m the Lucky One.

J’hoche la tête, faisant un acquiescement massif à tout ce qu’elle me dit ; oui, je suis Lucy, oui c’est Emma Frost, oui le chaffeur qui devait venir a un empêchement et oui j’ai fait bon voyage. Quatre d’un coup, aller hop, emballé c’est pesé. D’ailleurs, en parlant de cela, Emma Frost s’en retourne déjà et il me faut un instant pour la suivre. J’ai un peu de mal à me dire que je la rencontre d’entrée de jeu mais j’en suis plutôt contente. C’était peut-être pas son intention que de venir mais elle l’a fait et… ben voilà. Je me comprends. Je suis bien la seule mais comme c’est ma tête j’y fais ce que je veux. Oui je sais qu’elle est télépathe, elle l’a dit à la télé ; tout comme elle a dit qu’elle ne rentrait pas chez les gens sans demander. Mais on sait jamais. D’ailleurs, c’est une télépathe donc j’ai enfin l’occasion de tester un truc ! Faut juste que je m’en souvienne ou que ça me revienne plus tard.  Genre après la conversation.


Je relève les yeux de mon téléphone qui a changé de fuseau horaire automatiquement dès que j’ai désactivé le mode avion, observant un instant la réaction de Mlle Frost.

Me taisant par la suite, je ne reprends la parole qu’arrivée à la voiture tout aussi blanche que sa propriétaire et avec tellement de chevaux sous le capot qu’elle en a même un devant. Ouais, les voitures ça m’intéresse pas beaucoup, quand une attire mon attention c’est souvent parce qu’elle a une alarme qui n’a guère apprécié que je grimpe dessus. Pourtant, si ça a des suspensions ça peut bien servir d’appui… enfin bref.


Je teste ma chance, mais alors à un point : soit ça passe et Emma a l’esprit au propre comme au figuré pour comprendre les jeux de mots et en rire, soit je vais encore être contente d’avoir neuf vies. Encore qu’à force il ne doit plus m’en rester beaucoup. Je parle assez vite malgré un accent français, lequel doit être bien moins dégueulasse du fait des deux mois à Excalibur, et avec entrain mais par contre, quand je me tais, je me tais. Ce beau pléonasme pour dire que j’attends la réaction de Mlle Frost avec une certaine appréhension même si je tente de garder la face. Le culot a marché une fois alors que j’étais même pas concentrée dessus, là j’y mets toute ma bonne volonté.

Je retomberais sur mes pattes, je retombe toujours sur mes pattes, reste à savoir si je vais le faire devant les phares de sa superbe voiture de sport ; j’ai pas les yeux qui brillent dans le noir mais ils doivent être bien dilatés pour le coup.

OMM, ça a marché ! Emma Frost éclate de rire en montant dans son véhicule. D’un coup, je me détends comme un élastique qu’on tire en mode lance-pierre et je ne m’allume même pas le doigt ce faisant. Je remercierai bien Dieu mais c’est pas parce que j’ai rencontré un ange que j’ai l’intention de devenir lèche-botte. Du coup je vais me contenter de mon contentement et embarque avec un grand sourire dans la voiture blanche en suite de la Reine Blanche manifestement aussi détendue que moi ; enfin, que moi depuis que j’ai réussi mon coup. Gardant ma valise sur mes pattes, je m’assois et m’attache en me mettant à mon aise.

On démarre rapidement, que ce soit niveau mouvement ou questionnement, et les choses vont assez vite. J’ai encore jamais vu d’autoroute huit voies, je suis encore jamais montée dans une voiture comme ça et j’ai encore jamais fait rire de personne de la qualité d’Emma Frost. Que d’aventure, j’en suis presque décoiffée. Presque parce que je suis pas coiffée de base. Et que le vent n’aide pas. C’est le problème quand il n’y a pas de capote, on en prend toujours plein la gueule.

Bon, le droit de l’appeler Emma quand on est à deux et Miss Frost le reste du temps, j’en prends bonne note avec un peu plus de contentement que précédemment. Et je souris un peu plus quand à l’acceptation du crash-test, il ne me manque plus qu’à faire un casque, même si je bug juste après au cadeau de bienvenue ; sérieusement ? Les explications viennent quand à la nature du cadeau et à son emplacement à défaut de la raison qui pousse à le faire, me laissant un peu gênée même si je m’en remets très vite. Je me contorsionne facilement pour atteindre la boite à gants sans trop savoir quoi dire, cherchant la micro-puce et la reniflant un instant une fois que je l’ai entre les mains. L’approchant de mon oreille, je la secoue brièvement et me rassure quand à son maintient dans la coque ; manquerait plus que je la casse toute seule. Cela étant dit, un détail me perturbe : pourquoi préciser qu’il faut connaitre la fréquence propre pour la griller ? A chercher, je pourrais utiliser les jours prochains afin de chopper un émetteur-récepteur communicant sur la fréquence mais ça serait de la triche ainsi en suis-je à égale contente du cadeau et perplexe. Ce qui n’empêche pas la politesse, même si elle arrive avec un train de retard.


Le fait de savoir que les cours sont à ma convenance me fait sourire de nouveau avec plus d’assurance et une pointe de mépris ; okay, connaissant ma convenance j’ai bien fait de commencer par le fait que je n’aurais pas de cours. Je dis pas qu’il n’y aura rien pour m’intéresser à l’Académie, je dis juste que la scolarité elle-même ne m’intéresse pas. Un projet personnel en revanche peut s’envisager, pour peu que j’en trouve un. J’hoche donc la tête à solliciter les profs ou user du matos, franchement plus intéressée par le second point que le premier même si je ne cracherais pas sur leurs compétences tant qu’ils ne cherchent pas à me les expliquer, et me dis que j’ai vraiment pas intérêt de merder si je dois présenter le fruit de ça à qui que ce soit. Quand à avoir un professeur à recommander… voici qui me fait passer ma main derrière ma nuque.


Bon, celle-là elle fini sur Twitter dans les prochains jours avec une photo qui va bien pour illustrer. Aparté mis à part, faut que je retrouve l’explication et c’est pas faute de ne pas l’avoir suffisamment entendu et répété ce diagnostique à la con. Mais entendre et répéter me sert pas à grand-chose, c’est justement là le problème. A du coup, je sais :


Je ne suis pas certaine que cela l’intéresse beaucoup d’ailleurs, elle a surement d’autres chats à fouetter maintenant qu’elle ne m’a plus moi, d’autant plus que je ne suis même pas encore certaine de ce que je peux faire comme travail personnel. Le rythme du Stage ACE m’allait pas mal même si les heures de théories auraient bien été en entrainement également mais je ne suis pas certaine de pouvoir faire un travail personnel sur mon entrainement solitaire. Et je suis encore moins certaine que ça intéressera Valerie, vu l’influence qu’aura son documentaire sur mon approche. Je grimace un peu et me perds en manipulation de la petite puce à antenne que j’ai dans une des mains pour le restant du trajet.

Lorsque la voiture s’arrête, je relève le nez et contemple le grand bâtiment de briques rouges qui se trouve, légèrement surélevé, devant le parking. Simple et élégant, avec des tours de fenêtres et une porte blanche, des arbres entre ses fenêtres et un parterre herbeux…j’en prendrais bien une photo avec mon portable si l’image ne devait pas se trouver sur le net. Je descends de la voiture pour entreprendre de suivre la Directrice de ce lieu le long d’un chemin contournant le bâtiment pour un autre semblable même si plus petit, grimpant les marches avec bien plus d’agilité que la valise que je traine derrière moi. Emma s’arrête au milieu des marches pour que je la rattrape et lui réponde, ce que je m’empresse de faire dans les deux cas.


Et bien j’ai besoin d’un instant de réflexion même si elle était relativement simple ; la question. Enfin, ma réflexion aussi mais je crois qu’elle n’est simple que pour moi. Bref.


Je dirais bien que c’est de la prévoyance que de prévenir dès maintenant mais la vraie prévoyance serait de prévenir que je suis très douée pour apprendre de mes erreurs de manière à en faire d’autres et que la discipline n’est pas mon point fort. Reprenant la marche pour suivre Emma Frost jusqu’à l’endroit où elle m’emmène, je reprends rapidement la parole également.


Je ne suis pas capable de parler de mon procès de façon sérieuse, c’est comme ça. Le sentiment d’injustice surement, ce qui est très con pour un groupe qui n’a jamais cherché à comprendre la justice et c’est contenté de lui apporter les coupables pris en flagrant délit sur son territoire. Enfin bref.

Si c’est pas grave, tant mieux. Je ne suis pas réellement certaine de savoir ce qui n’est pas grave parmi tout ce que j’ai dit mais tant que ce n’est pas grave… ben ce n’est pas grave. Logique. Pléonasme aussi, potentiellement. Mais je serais quand même curieuse de savoir ce qui n’est pas grave, dans le pas grave : Que je sois plus scolarisée ? Que je sois perchée ? Que j’ai des difficultés d’apprentissage ? Que Valerie Braddock ait été ma maitresse de stage principale ? Bref, le stage est donc honorifique ; héhé, je vais mettre Membre Honorifique des Hellions sur mon CV. Ça aurait autant la classe que ça serait mettre les pieds dans le plat avec les Braddock d’une telle manière que je le ferais aussi, le plat. M’enfin un stage d’un mois chez les Hellions ça doit quand même un peu compter pour justifier mes capacités, tout autant que les tournois à venir. A moins que ce séminaire serve surtout vis-à-vis du projet personnel que j’aurai surement plus de mal à commencer qu’à finir. Mais bon, j’y suis pas encore ; justement.

L’Académie a des cours innovants afin d’enseigner de manière moins académique ? Je fais la moue ne manière guère convaincue durant l’explication, regardant ailleurs et plissant les lèvres, et me dis que Socrate devait avoir de la bonne connaissance en lui s’il considérait qu’il l’avait déjà. La réminiscence, faut que je me souvienne de ça car c’est comme le CQFD : un truc dont on va regretter de m’avoir parlé tellement je vais le répéter par la suite. Mais bon, je trouve bien plus logique l’approche psychotechnique des méthodes d’apprentissage même si je ne suis pas limitée à l’induction et l’essai-erreur. J’en fais beaucoup mais je ne fais pas que ça ! Ceci n’est pas de la mauvaise foi. Non.

Emma se propose de rechercher des établissements en Europe… je la regarde avec des grands yeux ; j’ai ré-atterris sur mes pattes tout à l’heure mais me voici quand même en position d’hypnose devant les phares de sa gentillesse. Comment dire que ça fait déjà je-sais-pas-combien-d’années que je prends mon mal en patience avec l’école et que j’ai tout sauf envie d’y retourner ? « Si une clé n'a pas pu ouvrir une porte, ce n'est pas forcément que la porte est condamnée. »


Et c’est aussi un magnifique moyen de changer de sujet. Bon, ne pas imaginer que parce que je ne rentre pas dans le moule que je n’ai pas ma place est un peu plus complexe que ça car, si dans le sentiment c’est assez vrai, je m’en accommode assez bien et suis suffisamment têtue pour chercher à me faire ma place tout de même. Je ne pense plus pouvoir réussir une bonne scolarité parce que j’en ai marre mais je ne cracherais pas sur des défis créatifs et innovants. Miss Jefferson, le mardi après-midi, fait faire joujou avec de la chimie mais c’est pas vraiment un truc qui me tente : il suffira de partir de la liste des produits autorisés à la manipulation par la tranche d’âge de la classe et de faire par élimination vis-à-vis des propriétés de chacun pour arriver au bon. Les enquêtes policières pour recréer intellectuellement des actes historiques me passionnent bien plus à dire vrai, maintenant faut que je trouve une manière de demander sans l’admettre. Je me demande si Alexandra Gruff tient des cours particuliers aussi ou s’ils sont classiques.

Demander le matériel à l’intendance qui devrait me le fournir tant que ça reste raisonnable ; okay, je ne leur dirais donc pas ce que je ferais du micro-ondes. Encore que si je le dépiaute correctement ça leur fera plein de pièces de rechange ! Rien de se perd, rien de se créer, tout se transforme. Même les comptes d’Emma, vu que ça a l’air important qu’elle en ait plusieurs, malgré que j’ai pas le droit d’y toucher. Pas directement tout du moins puisqu’il est probable que ce qu’achète l’intendance soit fait avec de l’argent provenant des comptes suscités. Tiens d’ailleurs, je me demande si Emma a une carte blanche plutôt qu’une carte bleue.

Et en parlant de carte blanche, je peux aller où je veux dans l’Académie, même sur les murs ? Je fixe Emma avec les sourcils relevés et un petit sourire. Ouep, les Belle ont inventé le Parkour, d’abord dans les pompiers de l’armée française puis par en tant que sport ; Cocorico comme diraient quelques politiciens français, même si je n’ai pas envie d’être une poule. Le coq gaulois, chez moi, il est dans l’assiette. Cela étant dit, j’ai pas l’intention de me casser une patte.


Je frime un peu mais j’y crois vraiment. Je me suis déjà foutue la misère en entrainement durant le Stage Excalibur mais je ne pense pas refaire la même ici. Et au pire, ça me fera quelques jours au calme, genre pour chercher un projet personnel. Je guéris vite, c’est une chance de plus dans ma collection. Et visiblement deux photos vont la rejoindre, ladite collection. Je souris à Emma, toujours immobile auprès d’elle, et penche légèrement la tête en arrière alors que je sors discrètement mon téléphone.


Le déclique de l’appareil photo de mon portable se fait entendre et je souris avec plus d’amusement, l’engin contre la cuisse, afin de remonter l’écran sous mon nez pour voir le résultat ; j’ignore si j’ai réussi à avoir Emma niveau diversion mais je suis assez contente de comment j’ai réussi à l’avoir tout cours. Et je reprends la marche du coup, à défaut de savoir où je vais ; ou plutôt où se trouve le dortoir dans lequel je vais atterrir mais c’est quasiment pareil.

J’amuse avec mon histoire d’hackage du crochetage, qui est lui-même du hackage de serrure, et ça me suffit pour divertir et faire diversion. Viennent ensuite les conseils d’Emma concernant le tournoi, la directrice voulant manifestement que je me prépare au mieux. Me concentrer sur la puce car elle est ma seule chance de victoire, je conçois aussi, mais tenter d’immobiliser n’est pas vraiment mon truc, généralement c’est plus ma faiblesse. Blesser n’est pas ce à quoi j’aspire, même si je suis assez douée quand il s’agit de sonner les gens, et sortir la puce de l’arène risque d’être aussi complexe que l’immobilisation. Je suis d’accord que les bourrins seront rendus plus vulnérables par leur résistance obsolète mais viser les points fragiles du corps humain me semble aussi problématique que viser la puce, en connaissance du fait qu’une force classe 1 fasse croustiller les os humains. Quand à utiliser ça contre eux, je pense y arriver jusqu’à un certain niveau ; que nombre de gens auront probablement. En revanche, le fait que même une bille de verre pourrait être suffisante à briser la puce, si elle est bien lancée, me fait avoir un sourire confiant. Je range mon téléphone, n’ayant pas été prise dans ma photographie, puis m’en vais sortir ma balle rebondissante d’une autre poche avant de la lancer sur le sol et de la rattraper aisément.


Eviter les caméras me va aussi, ce n’est pas tellement une question de faire confiance à Emma que de savoir que c’est sa partie du deal et que je l’ai acceptée implicitement en venant ici. Etre présente au tournoi, je serais, quand à finir première…


Je trolle mais il y a beaucoup de vrai quand même : je viens faire de mon mieux, rien n’indique que mon mieux sera suffisant. Finir dernière prouverait que je n’ai pas le niveau alors même que je cherche à prouver que je l’ai mais on verra bien jusqu’où mon mieux me portera. I’m the Lucky One.

Marchant la valise derrière moi et la balle rebondissante devant, je suis Emma en écoutant ses quelques questions pratiques à régler. L’Intendance a à me fournir la clé et les draps de chambre en plus de tout le bordel que j’y foutrais et également les codes wifi et mes identifiants ; identifiant qui permettront de consulter les cours et les annonces. Il est donc probable que je ne les utilise pas pour cela mais c’est quand même cool de m’en avoir fait. Bon, mon téléphone m’aurait suffit à chopper le wifi et avoir des codes ne m’aurait pas pris plus de cinq minutes mais l’intention est cool quand même.


La visite guidée est intéressante, permettant de super-bien me rencontre compte que leurs bâtiments sont pas faits pour le parkour, et je crois qu’il y a tout ce dont je pourrais avoir besoin et même plus pour le prochain mois. Je fais mon commentaire humoristique autant que je le peux, profitant bien qu’Emma ait de l’esprit pour continuer de laisser aller le mien. Comme au Monopoli, on revient à la case départ et c’est là que la directrice me laisser afin que je me débrouille. Je regarde la « Reine Blanche » s’éloigner dans les couloirs du bâtiment administratif en me disant que son bureau ne doit pas être le plus difficile à trouver, pour peu qu’on ne m’y conduise pas pour une raison ou une autre. Bien qu’impatiente de la prochaine rencontre, je n’attends pas celle-ci et m’en vais finir l’installation et passer commande à l’Intendance. Emma ne m’a pas invitée à faire comme chez moi mais, à l’instar de son contrôle du discourt me concernant, c’était tacite dans le contrat.


Plusieurs jours et rencontres super-intéressantes se sont écoulés depuis mon arrivée à l’Académie du Massachusetts, j’ai déjà commencé à raconter des conneries sur Twitter afin de tenir au courant mes proches en m’évitant l’appel ou le sms à l’international. Les ordinateurs du bâtiment informatique pourraient sans doute m’aider mais je préfère rester sur mon smartphone dont le forfait internet est rendu illimité par la connexion wifi, particulièrement quand je suis réveillée trop tard ; car oui, pour moi, 4h du matin c’est tard, pas tôt. J’ai pas encore commencé à me recaler mais je pense que ça se fera à la mesure de mon échec à tenir mon emploi du temps. Et en parlant de temps, je suis à l’heure pour la convocation d’Emma, qui ne m’a pas vraiment surprise : l’acclimatation c’est comme avec les enlèvements, on sait comment ça fini après quelques jours. Je gratte à la porte du bout des doigts, le reste de la main toujours couvert de mitaines elles-mêmes en partie couvertes de ma veste puisque ma tenue n’a pas réellement changé depuis la dernière fois. Sous-vêtements et t-shirt si mais les premiers ne se voient pas et le second est le même modèle. Ma garde robe en ferait déprimer plus d’une considérant le nombre de modèle similaire que je possède de la plupart de mes vêtements, seul l’état d’usure les distinguant vraiment.

Une fois invitée à entrer, j’obtempère et pousse la porte pour voir Emma concentrée sur son ordinateur avec des lunettes, oh sacrilège, noires. Gardant un pas discret, comprenant sa réponse plus réflexe qu’autre chose, je m’en vais à la fenêtre de son bureau pour regarder l’extérieur. Encore une fois, les bâtiments de l’Académie ne sont vraiment pas propices au parkour ou à l’escalade mais maintenant que j’ai repérée la fenêtre, je saurais m’en faire une entrée prioritaire au besoin. Je me baisse un peu pour examiner le fonctionnement du système d’ouverture pour me redresse et me retourne précipitamment quand Emma prononce mon prénom. Le sourire de la Reine Blanche aux Lunettes Noires me fait me détendre à mon tour et j’obtempère à nouveau pour venir m’installer sur le siège et y croiser les jambes d’aise, cheville de l’une posée sur la cuisse de l’autre, m’étalant parfaitement.


Oui, parfaitement, mon projet personnel accompli au sein d’une grande université américaine consiste à prouver que je n’ai rien à y foutre et que j’apprends autrement. C’est pas du foutage de gueule mais je suis assez contente de mon niveau de troll pour le coup, d’autant plus que c’est parfaitement sérieux et me sera bien utile à l’avenir. Mais pour en revenir au présent, j’en reviens à Emma et me concentre un instant.


Heureusement que j’ai dit que je me concentrais un instant. M’interrompant, je croise les doigts et les pose sur ma cheville pour ralentir le rythme, continuant de fixer Emma avec le sourire.