Chronique d’un Super-Héros Démodé

Il y a onze ans, la plus grande équipe de super-héros que le monde est connu était dissoute. Si pour certains, cela vient de l’envie barbare, vindicative ou encore machiavélique de contrôler le monde et que celui-ci a lutté, je vais vous dire d’où cela provient. La Ligue voulait améliorer le monde, elle voulait l’aider de manière diplomatique. Elle a refusé de prendre part aux guerres et a déclaré vouloir aider les innocents. Quelle que soit leur origine. Et pour cela, elle a été décriée, poussée à bout, poussée à l’abandon. Quelle que soit leur origine. Je suis un Green Lantern. Ou le troisième Green Lantern, comme certains m’appelle.

Pendant six ans, l’humanité a vécu sans une grande équipe de super-héros. Sans un bouclier qui la protégerait des attaques d’ennemis de l’extérieur comme de l’intérieur. Mais, au bout de six ans, une nouvelle équipe apparaît grâce au projet Initiative : les Vengeurs. Son apparition était comme une délivrance pour beaucoup. Repoussant l’armée de Thanos et le Titan lui-même, ils prirent une place centrale au sein du monde occidental en prenant la relève de la Ligue. J’ai rejoint cette équipe en pensant qu’elle pourrait changer le monde, là où la Ligue n’a pas pu le faire. Elle a, elle avait, le potentiel suffisant pour être la plus grande équipe de l’histoire de l’humanité. Mais, parfois, les choses ne tournent pas exactement comme on le voudrait.

Nous voilà, cinq ans après ces évènements avec une équipe nombreuse, avec des membres puissants et intelligents. Cependant, les Vengeurs ne sont pas les protecteurs du monde que nous espérions, que j’espérais. Ils sont les protecteurs des Etats-Unis et du SHIELD, mené par le grand manipulateur Fury. Une équipe qui passe plus de temps devant les caméras que sur le terrain. Une équipe manipulée par le gouvernement américain pour mener les combats que son armée ne peut pas mener. Les Vengeurs ne sont pas une équipe de Super-Héros. Non, ils sont le groupe d’intervention de l’armée américaine. Et ça, je m’y oppose. Je pourrais vous parler des inepties politiques déblatérées par certain(e)s de ses membres ou encore de la manipulation opérée sur les membres mêmes de l’équipe. Mais ça, je ne le ferais pas. Ou du moins, pas encore.

Vous aurez remarqué que j’utilise la troisième personne pour désigner les Vengeurs. Vous aurez remarqué que moi, membre de l’équipe, n’utilise pas le même discours que les autres. Tout cela n’est pas pour rien. Pour reprendre une formule d’un membre de l’équipe. « La vérité, c’est que je suis un Green Lantern. ». Mais je ne suis plus un Vengeur.

Le futur est imprévisible, mais le passé est notre leçon. Nous devons apprendre du passé pour ne pas commettre une nouvelle fois les mêmes erreurs. Je pensais que cela était ancré dans les mentalités, je pensais que les citoyens de la Terre l’avaient compris, je m’étais fourvoyé. Nous reproduisons encore et encore les mêmes erreurs, transformant indéniablement ce qui aurait dû être bon en un fléau. Certains l’auront déjà compris, je parle des Vengeurs ou du moins, de certains Vengeurs. Mais, dans ce système, il n’y a pas qu’un seul fléau. J’aimerais vous rappeler qui a créer le projet Initiative : le SHIELD. Si les Vengeurs sont un fléau, peut-être est-ce la faute du SHIELD.

Dans cet article, je ne parlerais pas du rôle des Vengeurs eux-mêmes, car beaucoup d’entre eux sont bon, cherchant à faire le meilleur pour cette planète, mais bien du SHIELD. J’ai pu voir les choses de l’intérieur, j’ai pu me forger ma propre opinion et cela a mené à mon départ de cette équipe. Le SHIELD a transformé les Vengeurs en une équipe d’intervention tactique pour le compte des Etats-Unis. Si à la base, ils étaient là pour protéger le monde, ils ont fini par protéger les Etats-Unis. Certains y voient un salut, une bonne chose, j’y vois une manipulation politique d’un groupe. Nous, les Super-héros, ne sommes pas des soldats, nous n’avons pas d’intérêt à protéger un État plutôt qu’un autre.

Il y a quelque mois de cela, Nicholas Fury a demandé aux Vengeurs d’intervenir en Syrie. Ainsi, des super-héros allaient intervenir contre une menace terroriste. Bien sûr, le terrorisme est une mauvaise chose, mais est-ce vraiment notre rôle que de le stopper ? Le SHIELD n’utilise pas son équipe pour faire le bien, mais pour imposer l’idéologie politique qu’elle soutient. Si les Vengeurs doivent intervenir en Syrie, ce n’est pas pour régler le conflit, mais pour protéger les citoyens, les innocents, les vrais innocents. Si les Américains veulent intervenir contre les terroristes, qu’ils le fassent, mais ce n’est pas le rôle des super-héros. Il y a des menaces que nous seuls pouvons gérer, autant commencer par cela.

Sans parler des secrets gardés bien gentiment par le SHIELD. Lorsque j’étais membre des Vengeurs, on m’a fait remarquer que « certaines informations doivent rester secrètes ». Je ne peux contester cette déclaration. Mais doit-il en être ainsi de toutes les informations ? Comment le SHIELD peut-il cacher des choses à ses équipiers ? À chaque fois que j’ai entendu parler Nick Fury, je n’ai entendu qu’un discours de politicien. Peut-être qu’initialement, il voulait changer la donne, rendre le monde meilleur. Mais le parfait est l’ennemi du bien. Et comme Icare qui s’est brûlé les ailes en se rapprochant trop du soleil, Fury est en train de faire la même chose.

J’ai décidé de quitter les Vengeurs parce que Fury a voulu nous transformer en soldats et je n’en suis pas un. J’ai donc fait mon objection de conscience. Et j’invite tous les membres de l’équipe qui pensent comme moi à faire de même. Ne restez pas avec les Vengeurs juste parce que vous voyez des occasions de faire le bien alors que de l’autre côté, vous faites également des choses qui ne vous conviennent pas. Il y a d’autres manières de combattre le « mal ». Je ne vous invite pas à vous rebeller contre les Vengeurs ou contre le SHIELD. Je ne vous demande pas de suivre ma voie. Je vous demande simplement de penser par vous-même, d’observer et de vous faire votre propre avis pour agir en conséquence. Arrêtez d’écouter aveuglement le SHIELD et Fury. Forgez-vous votre propre avis.

Comme beaucoup l’aurons remarqué, cette chronique qui se voulait initialement bimensuelle a subit un coup d’arrêt de plus de six mois. Il y a de nombreuses raisons à cela, mais la principale est qu’il est difficile pour un super-héros, quelqu’un qui a vécu dans l’action, qui a connu tant de groupes, d’équipes différentes de faire le point en restant à l’épicentre de ses propres maux. Difficile de se rendre compte de ce qui ne va pas, de ce que l’on ne peut supporter ou alors de ce que l’on doit pardonner sans prendre le recul nécessaire. C’est pourquoi la Lantern a disparu des radars pendant une très longue période.

Comme je m’y attends déjà, certains parleront de lâcheté, d’incapacité à assumer mes propres erreurs. Peut-être ont-ils raisons. Mais le véritable but de mon aventure aux confins de l’espace était de trouver quelque chose de bien plus important qu’une raison, que des réponses ou même que les questions qui vont avec. Je devais trouver la chose qui faisait de nous des super-héros, la chose qui faisait que même si j’avais été désabusée par les Vengeurs et par le système en place dans notre État, j’avais toujours envie de continuer, de protéger les gens. Et c’est après une discussion avec un ancien camarade que j’ai trouvé la réponse. Je savais ce que je devais trouver. Si les Green Lantern représentent l’essence même de la volonté, si le Sinestro Corps représente l’essence de la peur ou encore si les Red Lantern représentent la colère, il devait forcément y avoir une entité capable de comprendre cette émotion. Je devais la trouver. Et je l’ai trouvé.

Si j’écris cet article, c’est justement pour parler de cette force qui est en chacun de nous, cette force qui nous pousse à continuer alors que d’autres ont abandonné, cette force qui nous montre le chemin dans le brouillard : l’espoir. Après plusieurs mois de recherche, j’ai trouvé l’essence même de l’espoir, sur une petite planète inhabitée, laissée pour morte, se dressait l’entité même de l’espoir. Sur cette planète nommée Odym, j’ai trouvé cette force et j’ai essayé de la comprendre, de l’apprivoiser.

J’ai alors compris que c’était l’espoir qui faisait de nous des êtres humains capables de combattre tous les maux qui nous consument. Qu’ils soient les nôtres ou ceux des autres. L’espoir nous permet de trouver cette lumière dans la nuit noire, de sortir la tête de l’eau. De comprendre la nature même de l’humanité et de son envie de progresser. Si pendant longtemps, je ne croyais qu’au pouvoir de la lumière verte de la volonté, j’ai rapidement compris que ce n’était pas une émotion qui nous guidait, mais bien toutes. La colère, l’avidité, la peur, la volonté, l’espoir, la compassion et l’amour, toutes ses émotions font des êtres vivants ce qu’ils sont.

Et après des mois à essayer de l’apprivoiser, remettant en question les raisons même de ma présence sur cette planète, j’ai compris pourquoi, j’ai compris comment. C’est l’espoir en la Terre, l’espoir en l’être humain qui m’a permit de continuer à faire mon activité. C’est cet espoir que l’être humain peut changer la donne quoiqu’il arrive, qu’il peut comprendre plus vite que les autres, qu’il peut évoluer alors que d’autres stagnent. C’est cet espoir en l’être humain qui m’a fait quitter les Vengeurs, c’est l’espoir en l’humanité qui me donne envie de combattre certains idéaux proches de l’obscurantisme. C’est l’espoir en l’humanité qui m’a permis d’appréhender la lumière bleue de l’espoir.

Aussi, je finirais par vous dire que l’espoir ne doit jamais mourir, l’espoir doit vivre en nous quoiqu’il arrive. Je ne renie pas le pouvoir de la volonté, loin de là, mais j’ai aujourd’hui compris que certains hommes sont des hommes de volonté et d’autres d’espoir. J’ai l’espoir en vous, l’espoir que vous ferez le bon choix lorsque vous devrez le faire. Ne laissez pas les gens penser à votre place, ne laisser pas les gens vous dire ce que vous devez faire. N’écoutez personne, ne m’écoutez pas, n’écoutez que vous. Et au plus profond de vous, je sais que vous trouverez cette force qui est maintenant la mienne. Pour reprendre la formule que j’ai utilisée dans mon premier article, je ne suis plus un Green Lantern. Aujourd’hui, je suis un combattant de l’espoir, je suis un Blue Lantern.

PS : Ah ! Oui ! J’oubliais… Et bonne année à tous !

On pourra me taxer de vivre dans le passé, de ne pas vouloir évoluer, mais je pense qu’il est temps de donner mon avis sur cette institution. On dit souvent que le passé nous apprend à ne pas refaire les mêmes erreurs. C’est une réalité que certaines personnes ne semblent pas vouloir regarder. Car oui, j’ai fait partie de la Justice League, je pense qu’il a s’agit d’une des plus grandes équipes de l’histoire de l’humanité, mais je ne suis pas aveugle au point de voir que nous n’avons pas fait quelques erreurs. Et si j’entends déjà les gens dirent que je crache dans la soupe, je voudrais tout de même leur demander de me laisser m’expliquer.

J’ai rejoint la Ligue au début de la fin de son ère. Lorsque je suis arrivé, la majorité des grands héros qui la composaient cherchaient à trouver leur relève. Contrairement à Supergirl, Nightwing et autres, je ne suis pas arrivé pour prendre la relève des Green Lantern qui étaient déjà là. Mon rôle était de former une équipe avec ces personnes, une équipe avec une autre vision, d’autres objectifs. Je dois tout de même dire que malgré les dangers que j’ai pu affronter, ce furent les plus belles années de ma vie. Les rencontres que j’ai faites à cette époque ont littéralement changé ma vie. Cela va bien évidemment de Supergirl à Superman, en passant par Batman et tous les autres membres de la Ligue. Cette époque m’a forgé sur plusieurs points. J’ai appris le combat au corps-à-corps et la stratégie aux côtés de Batman, la valeur de l’espoir aux côtés de Superman, la dure loi de la guerre aux côtés de Wonder Woman et j’en passe. J’ai plus appris de ces grands héros que de mon anneau ou même de mes anciens leader Green Lantern. Ils m’ont tous montré que l’on pouvait apporter quelque chose à ce monde, quelque chose de positif.

Mais, à la fin de cette ère, nous avons commencé à commettre des erreurs. Alors que l’humanité entrait dans l’ère de la communication permanente, nous avons stagné dans nos positions, comme on le faisait dans les années 1990. De par notre situation extérieure à la planète, nous nous sommes mi à dos une majorité des États du monde. Le monde nous a pris pour des tyrans, pour des prétendus dieux au-dessus des maux humains, c’était le début de la fin. En quelques années, la situation nous a échappé et nous avons été dissous. C’était une erreur de communication, nous ne sommes jamais apparu dans les médias comme cela se fait (trop ?) aujourd’hui, nous n’avons pas expliqué pourquoi nous étions là, quelles étaient nos valeurs. Et c’est là qu’a été notre perte.

Alors aujourd’hui, bien sûr, j’entends encore les paroles de certaines personnes qui disent que nous étions des tyrans, que nous pensions être au-dessus du monde, au-dessus des lois, au-dessus de tout, mais c’est faux. Au contraire. Nous avons toujours prôné une chose, une valeur : nous étions des héros, pas des politiciens et la seule politique que nous avons menée est celle de la non-ingérence. Nous avons toujours dit que nous étions des héros et que les affaires politiques, juridiques ou autres ne nous concernaient pas. Si nous croyons tous aux bienfaits de la démocratie, de la république, il n’était pas de notre devoir de l’imposer aux autres. C’est justement la liberté des États de choisir leur forme juridique, personne ne peut le leur imposer. Car c’est quand on veut le faire que l’on devient un tyran. Même imposer la démocratie est signe de tyrannie.

Voilà, nos erreurs n’ont pas forcément été perçues comme elles l’étaient. Et lorsque je vois l’omniprésence de certains « héros » dans les médias, je ne peux que penser que cela leur fera du mal. Si nous n’avons pas assez communiqué, ils communiquent trop. Et le jour où cette ère de communication absolue se terminera, beaucoup d’illusions tomberont. Plus il y aura de communication sur un sujet, moins il y en aura sur un autre. Et n’est-ce pas le bon moyen de mettre sous silence certaines actions ? Encore une fois, j’ai vu ce que certains Vengeurs faisaient, ce que le SHIELD fait, et ce n’est malheureusement pas de cela dont on parle à la télévision, dans les journaux. On ne parle pas des multiples dommages collatéraux que cette guerre entreprise pas les super-groupes armés américains peuvent engendrer.

Mais j’ai encore espoir. Je pense que les Vengeurs peuvent changer. Je pense que ceux qui agissent discrètement, en faisant leur travail et sans chercher à devenir des héros de la pop-culture, ce sont ceux qui peuvent changer la mécanique actuellement en marche. Je ne citerais pas de nom, car je pense que vous pouvez vous-même choisir ceux que vous supportez. Mais un jour peut-être, les Vengeurs pourront devenir une grande équipe de super-héros, une équipe qui ne fédère non pas le peuple américain, mais l’humanité toute entière. Ce jour peut arriver, il nous suffit de croire que certaines personnes peuvent changer la donne.