The Heroic Age
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Du destin de l'Amazone

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Message  Ivy P. Isley Ven 1 Déc 2017 - 5:37


Peut-être pensent-ils que ce ne sont que quelques pierres moussues. Peut-être même qu’ils ne les ont jamais remarqués, qu’importe le nombre de fois où ils sont passés devant. Pourtant leur forme, en léger arc de cercle, est peu ordinaire. Il suffirait de soulever un peu de mousse pour mettre à jour de l’écorce. L’écorce d’un vieux bois, qui aurait dû pourrir en quelques années normalement. Mais elle est encore étonnamment solide et bien ancrée dans le sol. Et sous cette écorce se trouve encore une couche verte, liée à la présence d’une réserve de chlorophylle ; chose qui n’arrive que périodiquement dans les troncs des arbres vivants. A y prêter plus d’attention, comme on pourrait le faire en s’arrêtant et s’accroupissant, il n’est pas difficile de remarquer que les autres "pierres" alentours ne sont pas disposées au hasard, formant un large cercle. Il ne subsiste que quelques fragments de ce qui a jadis été l’écorce tandis que l’intérieur s’est depuis longtemps décomposé et transformé en humus, deux indices permettant de conclure que l’arbre a dû être coupé il y a 400 ou 500 ans, mais pourtant les vestiges de l’immense souche survivent encore. Les cellules se nourrissent de sucres, doivent respirer et se développer même un minimum hors sans feuille, donc sans photosynthèse, il est impossible de faire cela.

Les scientifiques en sylviculture et en foresterie avancent que l’on connait moins le fond de nos océans que la surface de la Lune ou de Mars mais qu’on les connait plus que nos forêts. C’est indéniable qu’il faudra des décennies pour que la première discipline soit à même d’exploiter ce que la seconde découvre depuis d’autres décennies et que, ironiquement, le mysticisme animiste prenait déjà en considération. Les forêts artificielles sont faibles et maladives, ses individus isolés ne devant survivre qu’une centaine d’année pour pouvoir être récoltés ensuite. C’est de l’élevage intensif, comme pour les animaux destinés à l’agroalimentaire. L’Homme s’acharne à élever des organismes isolés noyés dans la masse là où une forêt poussant naturellement, sans intervention extérieure, forme un super-organisme. Dans les forêts naturelles, et au premier rang d’entre elles les Forêts Primaires, ce sont des arbres qui auraient pu vivre des millénaires que l’Humanité vient abattre. Le secret de leur santé est le même qui maintient cette souche en vie. Même majoritairement décomposée et brisée en surface, elle continue de vivre sous la terre car les arbres voisins lui perfusent, par l’intermédiaire de leurs racines et de celles de champignons symbiotiques, les substances nutritives pour la maintenir en vie. Cet échange et cette aide sont ce qui manque à la plupart des cultures alors qu’ils sont la principale force du monde végétal.

Je n’ai ni besoin de racine ni besoin de champignon symbiote pour être connecté à cela. Mon esprit, qui parcourait précédemment cette zone où les végétaux sont entretenus sans être abattus ou plantés, se concentre à présent dans la souche. Son âge canonique la rend sage et résistante, ayant connus nombres de tourments dont elle peut partager les solutions à ses cadets alentours s’ils en viennent à les subir. C’est pour cette raison également que je fais appel à elle, la conduisant à faire un effort dont elle ne serait pas capable seule. Investie de ma volonté comme de l’énergie du Green, la voici à soulever cette mousse qui la recouvre alors qu’une nouvelle pousse s’échappe en son centre. Formant une fourche, elle commence à s’élever toujours plus en restant relativement droite malgré des aspérités et des bourrelets étonnamment symétriques. Les deux cimes sont étranges, développant un houppier de branches courtes dénuées de feuille, tandis que leurs troncs se rejoignent dans un élargissement. Cette largeur n’atteindra pas celle du tronc d’autrefois, se limitant à quatre-vingt-dix centimètres environ au lieu d’un bon mètre cinquante, et recommence à s’affiner à la manière d’un sablier. Un sablier inégal dont le tronc se creuse et se lisse d’un côté pour développer une forme de cœur de l’autre lorsqu’il en vient à s’élargir de nouveau. Un peu après se cœur s’étendent des branches épaisses, opposées l’une à l’autre, qui s’en viennent soutenir une dernière partie de tronc encore plus frêle et inégale, comme sculptée en un visage humain. De même qu’elle n’atteindra pas la largeur de l’arbre d’autrefois, il n’est pas question de régénérer un tronc de plusieurs dizaines de mètres et c’est une fois le mètre quatre-vingt approximativement atteint que la pousse s’arrête. Incapable de supporter son propre poids, la silhouette boisée rompt sa figure du poirier en un craquement  humide, séparant la nouvelle pouce de la souche qui lui a permis de naitre et confié les résultats de ses millénaires d’existence. M’étalant sur le sol, je suis parcourue d’une douleur bien plus lente que celle des humains et elle me fait rire nerveusement, la représentation faciale s’anima brutalement, sa bouche s’ouvrant alors que ses orbites restent vides.

Par Dame Nature… ça m’apprendra à brusquer une ancienne… désolée… et merci.

Ma propre voix raisonne autour de moi en un écho irréel. La lumière environnante caresser ma peau d’écorce tandis que les vents secs la frôle plus brutalement. Les senteurs de la réserve forestière me parviennent paisiblement mais s’accompagne des relents de pollution liés à l’urbanisation. La douleur qui me parcourt est analogue à celle que j’ai causée à la vieille souche et je referme donc sa plaie au plus vite avant de me préoccuper de la mienne. Les branches principales, qui soutenaient ma tête précédemment, se plient et craquent lourdement à leurs jointures puis je replie leurs nombreuses extrémités comme des doigts crochus. Leur contact vient se faire une nuque solide et font ployer les racines filandreuses qui commencent à pousser du sommet de mon crâne, comme une chevelure. Tous les signaux me parviennent avec autant de clarté que ceux de mon propre corps, délaissé en transe à l’abri de la forêt à laquelle je suis connectée.

Lorsque je parviens enfin à me redresser, je commence à me diriger vers ce que ces bois entourent et qui m’a motivé à venir ici. Peut-être s’agit-il d’un parc mais il a été préservé et je n’ai aucune raison d’intervenir en sa faveur mais ceux qui se considèrent comme ses propriétaires sont nécessaires à améliorer quelque chose de bien plus important : la plus grande forêt au monde, occupant prêt d’un tiers du continent sud-américain et symbolisant pour beaucoup la lutte écologique.

Les bruits comme les différences de luminosité m’indiquent des présences que je considère humaines et je lève donc les branches-mains en signe de non-violence, n’ayant qu’à les relever un peu plus pour que cela se transforme en reddition. J’ai appris de chacune de mes rencontres et si je continue de tenter la voie du dialogue, je n’offrirais pas l’occasion de m’enfermer de nouveau quand bien même j’ai des alliés pour m’aider à m’échapper. Je ne souhaite pas les mettre en danger, pas plus que je ne suis prête à accorder la même confiance aux Luchadores que je l’ai fait aux Last Sons. La situation de la forêt primaire présente au sein de leur territoire est cependant très différente et, moins que des revendications, j’ai des propositions à faire cette fois. Mais pour cela, il faut déjà ouvrir le dialogue.

Je souhaite parler à Axaya…

Ivy P. Isley
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